Mediapart s’est procuré les noms des signataires ayant déposé un recours devant le Conseil constitutionnel contre la loi sur les langues régionales, adoptée le 8 avril dernier. Le député breton Paul Molac, instigateur de cette loi, pointe du doigt le cabinet du ministère de l’éducation.
Paul Molac ne décolère pas. Dans le collimateur du député morbihannais : Jean-Michel Blanquer. Il en est certain, le ministre de l’Éducation nationale a une influence sur ce recours.
Pourtant, la loi, qui apporte une reconnaissance et une protection inédite aux langues régionales en France, a bien été adoptée il y a un mois. Et à une très large majorité : 247 voix contre 76.
Parmi les votes favorables, 100 provenaient de la majorité, 57 marcheurs étaient toutefois défavorables à la loi. Le Premier ministre et les groupes majoritaires n'avaient pas voulu saisir le Conseil constitutionnel.
Jean-Michel Blanquer aurait influencé les signataires
Alors comment-est ce possible que deux semaines après le vote, 61 députés de la majorité aient déposé un recours ?
Paul Molac s’interroge et a interpellé le ministre de l’Éducation à ce sujet ce mardi 4 mai. Selon lui, Jean-Michel Blanquer aurait incité les députés à déposer ce recours.
“C’est bien un membre de votre cabinet qui a rédigé le recours”, assure Paul Molac à l’Assemblée nationale en s’adressant à Jean-Michel Blanquer.
“L’influence que vous avez exercée auprès de ces parlementaires nous interroge sur la réalité de la séparation des pouvoirs alors que ni le Premier ministre ni le Président de la République n’ont souhaité saisir le conseil constitutionnel en ce sens”, poursuit-il.
Les signataires s’opposent au forfait scolaire
Officiellement, le contenu de la saisine des 61 députés n’a pas été publié. Mais le journal Mediapart (article payant) s’est procuré le texte et les noms des 61 signataires LREM qui demandent la censure d'un des articles de la loi.
L’article en question concerne le forfait scolaire. Il s'agit de sommes versées par la mairie de résidence, à l’école publique d’une commune voisine pour chaque enfant qui y est scolarisé.
La nouvelle loi prévoit la création d'un forfait scolaire également pour les écoles privées, associatives sous contrat, dispensant une scolarisation en langues régionales. Diwan réclamait depuis longtemps le droit d’en bénéficier.
Lors des débats parlementaires, le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer s’était opposé fermement à cette disposition, tout comme à la reconnaissance de l’enseignement immersif.
Les 61 députés signataires de la saisine jugent inconstitutionnel d’obliger une commune à prendre en charge le coût de cet enseignement qu’ils estiment “facultatif”.
Aucun député breton parmi les signataires
Mediapart assure que la saisine a donc bien été signée par 61 députés LREM, “dont plusieurs députés qui ont voté pour l’adoption de la proposition de loi en deuxième lecture à l’Assemblée nationale”.
Parmi les signataires, il n’y aurait pas de députés bretons, mais un élu de Loire-Atlantique, Luc Geismar, comme l’assure Ouest France (article payant).
“L’article 6 risque de mettre en cause la libre administration des communes et le financement des écoles privées. Je préfère une saisine que d’avoir, plus tard, des contentieux quand les maires devront payer la facture. Si le Conseil constitutionnel le valide, le texte sortira renforcé” a-t-il confié au journal.