L’association Rêves de clown fête ses 25 ans. Elle a vu le jour en 1998 à Lorient. A l’époque, ils n’étaient que quelques clowns bénévoles. Ils posaient une journée pour faire entrer un peu de rire dans les chambres des enfants hospitalisés. Aujourd’hui, les clowns hospitaliers se sont professionnalisés. Les docteurs Mimiche, Ornicar, Edmond Prochain et compagnie, ils sont 26, interviennent dans 18 établissements de soins bretons, dans tous les services pour semer ici et là des petits instants de bonheur.
"Un clown qui rentre dans une chambre d’hôpital, c’est un rayon de soleil, une bulle de bonheur", s’émerveille Michel Vobmann, le fondateur de l’association Rêves de clown.
En 1998, il pose une petite boule de plastique rouge vif sur son nez et toque aux portes des chambres de l'hôpital de Lorient. Son chapeau noir orné de pastilles de couleur et sa veste trop large font immédiatement naître des sourires.
Les enfants hospitalisés, leurs parents, les soignants éclatent de rire, lui font des clins d'œil, des blagues... Le docteur Mimiche en est aussitôt convaincu : "Ce sourire ou ce moment de bonne humeur qu’il vient de provoquer, ça remonte le moral des jeunes patients et le moral, c’est la moitié de la guérison !"
Bonheurologues diplômés
Le docteur Mimiche et ses comparses créent l’association Rêves de clowns et tissent des liens de plus en plus serrés avec les équipes médicales.
Avant de pénétrer dans chaque service, ces drôles de médecins font toujours un point avec les soignants. Les infirmières leur indiquent les chambres où leur présence ferait le plus grand bien, celles où les patients sont en souffrance.
Aujourd’hui, les clowns se faufilent partout : de la néonatologie, aux services de soins palliatifs, en passant par les centres de rééducation, les unités Alzheimer, les Ehpad, les urgences. Les clowns sont partout où il y a besoin d’eux.
Décontractologues expérimentés
"Oui, les clowns ont vraiment une place super importante aux urgences, assure le docteur Mimiche. Quand les gens arrivent, ils ont mal, ils ne vont pas bien, ils ont peur. Quand on passe avec nos grandes chaussures et nos vestes multicolores, on fait dégonfler l’angoisse. Après des années de pratique, le calinologue le sait : les résultats d’une prise de sang, c’est deux heures d’attente. Les gens cogitent, s’inquiètent. Si on arrive à les apaiser, on les met dans de meilleures conditions pour les premiers soins et si les premiers soins se passent bien, les soins d’après se passeront mieux aussi. On le voit avec les petits. Si l’intervention est douloureuse, ensuite, ils auront peur de toutes les blouses blanches qu’ils vont croiser."
Les clowns rassurent dans les moments difficiles, Mimiche et les autres essayent donc d’être présents quand il faut amener les enfants au bloc opératoire. Les praticiens en bêtises sont parfois présents pour les prises de sang, les changements de pansements, les examens un peu douloureux...
On ne voit pas la maladie, on voit la personne qui est là, dans un lit, et on se demande juste ce qu’on peut lui apporter
Docteur MimicheRêves de clown
Les clowns hospitaliers ne font pas un numéro. Ils improvisent dans chaque chambre, en fonction de chaque malade, de chaque instant. "On ne va pas faire la même chose si on se retrouve face à une petite fille toute seule et qui semble souffrir, ou s’il y a son papa, sa maman et ses frères. Les clowns s’adaptent. Parfois, ils vont faire juste un petit coucou, envoyer un sourire, un baiser… "
D’autres fois, les docteurs es-clowneries vont sortir tout leur attirail : des instruments de musique, des ballons de baudruche, des tours de carte. "C’est la magie de l’instant. On doit donc intervenir avec joie, humanité et tact, résume Mimiche. On ne voit pas la maladie, on voit la personne qui est là, dans un lit, et on se demande juste ce qu’on peut lui apporter."
Calinologues confirmés
Depuis 2005, le métier de clown hospitalier est reconnu, au même titre que celui de boulanger ou de pharmacien. Les clowns de l’association suivent tous des formations avant de rentrer dans les chambres des malades. Car la spécialité médicale est exigeante.
"Notre nez rouge nous protège. Quand je le pose sur mon visage, je ne suis plus Michel Vobmann, je suis Mimiche. On voit les enfants parfois pendant des semaines, des mois et toutes les histoires ne se terminent pas bien" témoigne Michel Vobmann.
"Quelques fois, on a des parents qui craquent, on met notre clown en pause et l’humain prend le dessus. Il faut trouver la juste place. Quelle est la juste place du clown qui vient ? Qu’est ce qui a du sens pour les personnes qu’on va voir ? Une chanson, un dessin… c’est une rencontre, un instant. "
Sourirologues certifiés
Michel se souvient avec émotion d’une de ses petites patientes. "Dans un hôpital, il y avait un petit bout de petit être qui avait une maladie incurable. Elle me demandait à chaque fois de lui dessiner un Tchoupi. Elle adorait Tchoupi, alors chaque fois, je lui dessinais des Tchoupis, c’était notre lien. Petit à petit, on s’attache à la famille, on en fait partie. Mais au fil des jours, la petite fille s’éteignait. Elle avait un regard magique, extraordinaire. C’est ma première patiente qui est partie dans les étoiles. Je me dis qu’elle est arrivée là-haut avec le sourire."
En ce mois de novembre 2023, l’association fête ses 25 ans.
Au début de l’année prochaine, elle devrait célébrer son 500.000ème patient visité. L’association rêve toujours de clowns et a besoin de dons pour continuer à faire naître les sourires. 85% du budget de l’association provient des dons.