Le parquet a décidé de classer sans suite l'enquête ouverte sur des militaires soupçonnés d'avoir prêté main-forte aux forces de l'ordre dans des opérations anti-émeutes à Lorient. La justice s'était saisie du dossier après le signalement effectué par trois députés bretons.
"Faute de plainte et d'infraction constatée", le parquet de Lorient annonce, ce lundi 15 juillet 2024, sa décision de classer sans suite l'enquête ouverte sur des militaires soupçonnés d'avoir participé à des "interpellations" lors d'opérations anti-émeutes fin juin 2023.
L'ouverture de cette enquête faisait suite à un courrier adressé au parquet de Lorient par trois députés bretons LFI, le 17 juillet 2023. Les parlementaires demandaient à la justice de se saisir de ces faits, sur le fondement de l'article 40 du Code de procédure pénale.
Une trentaine de militaires en civil ?
Les élus s'appuyaient également sur plusieurs articles de presse évoquant, témoignages à la clef, la participation présumée d'une trentaine de militaires en civil à ces arrestations musclées, dans la nuit du 30 juin au 1er juillet, remettant ensuite à la police les "interpellés". Ces violences urbaines s'étaient déroulées dans la foulée de la mort du jeune Nahel lors d'un contrôle de police en région parisienne.
Les députés s'inquiétaient dans leur courrier au procureur de l'existence de groupes de militaires au visage masqué qui auraient pu agir ce soir-là "en concertation avec les forces de police", comme des "milices privées" interdites par la loi.
À une question posée le 19 juillet par le député morbihannais Paul Molac en commission des lois, Gérald Darmanin avait répondu : "D'après les informations des services des renseignements que j'ai eues, il y aurait des militaires, qui, pour des raisons que je ne comprends pas bien, auraient prêté main-forte sans aucune espèce de loi, ou de règlement, qui le permet".
"Aucune plainte déposée"
Le procureur de la République de Lorient, Stéphane Kellenberger, souligne qu'il a mis en œuvre "des investigations conséquentes" dans ce dossier, notamment l'analyse de vidéos et des auditions de témoins et de "hauts responsables de l'état-major de la Force maritime des fusiliers et commandos, de la police nationale, etc." 4.000 militaires de La Marine nationale sont présents à Lorient.
Il est ressorti de l'enquête confiée à la gendarmerie que "certaines personnes jeunes, vêtues de joggings, jeans, t-shirts, apparaissaient dans le centre-ville, cette nuit-là, visiblement sans casser quoi que ce soit, mais, au contraire, pour éteindre des débuts d'incendies sur des terrasses de restaurants ou préserver des vitrines de commerces".
"Aucune personne n'était vue en train d'interpeller quiconque, ni de commettre d'éventuelles violences. Aucune plainte n'a d'ailleurs jamais été déposée en ce sens" indique le magistrat.
"Pas de mouvement organisé ou commandé"
Aucun "mouvement organisé, piloté ou commandé" susceptible d'avoir constitué "une milice" n'est intervenu cette nuit-là, mais seulement "quelques jeunes", visiblement "du côté de l'ordre", "sans leader" et agissant de façon ponctuelle, ont conclu les gendarmes.
Quant à l'exploitation des vidéos, "aucune arme n'était visualisée. Aucune violence physique n'était enregistrée, pas plus qu'une quelconque interpellation" précise le parquet de Lorient.
Au vu des éléments dans le dossier, le procureur de la République a donc décidé un classement sans suite "des infractions visées par le signalement" des trois parlementaires.
Une enquête de commandement avait été déclenchée par le ministère des Armées. Selon un porte-parole de la Marine nationale, elle avait conclu à l'absence de faits justifiant des suites disciplinaires.