D'un côté deux associations de protection de l'environnement et de l'autre, le porteur de projet d'une future grande zone commerciale. Au milieu, une bataille juridique pour savoir si les travaux sur la commune de Pluvigner dans le Morbihan, ne vont pas nuire à la faune locale. Une affaire jugée en référé devant le Tribunal Administratif de Rennes ce 29 août 2024.
C'est un projet de grande envergure. La construction d'une zone commerciale de 7.500 m² sur la commune de Pluvigner dans le Morbihan pour héberger des enseignes comme Super U, Mr Bricolage et Lidl.
Depuis mai dernier, l'association Bretagne Vivante et le collectif de riverains PARé (Pluvigner Avenir Respect équilibre) multiplient les recours pour faire stopper les travaux de terrassement qui ont commencé sur le lieu-dit Bodévéno. Selon elles, "cinq espèces d'oiseaux patrimoniaux" et "deux espèces de chauves-souris" sont menacées.
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Ils dénoncent les risques que fera peser cette zone commerciale sur le commerce de centre-ville. Autre grief, les conséquences des travaux sur la biodiversité.
Ils ne respectent pas les mesures de protection mises en place.
Maître Thomas Dubrueilavocat des deux associations
C'est l'objet d'un référé déposé ce jeudi 29 août 2024 devant le tribunal administratif de Rennes.
"Ils n'ont pas tenu compte de toutes les mesures d'évitement qu'ils devaient suivre, comme le respect d'un calendrier pour ne pas nuire aux oiseaux qui nichent, la construction d'un talus, d'un merlon à proximité d'un talus où se reproduisent les animaux. Ils ont terrassé comme des violents" se désole Maître Thomas Dubreuil, l'avocat des associations.
Une dérogation environnementale pas nécessaire
En juin dernier, les deux associations avaient déjà été déboutées d'une première demande pour un premier arrêt des travaux. Elles avaient motivé leur demande en indiquant que ces travaux n'avaient pas bénéficié d'une "dérogation environnementale". Le tribunal n'avait pas suivi. Le préfet du Morbihan jugeant cette autorisation pas nécessaire.
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Une autre action avait permis la suspension pour le mois de juillet. Cette suspension doit être levée le 2 septembre 2024.
Maître Bernard Cazin, l'avocat du porteur de ce projet de la zone commerciale, parle quant à lui "d'une action judiciaire très intense et très inhabituelle de la part des associations". Et il ajoute "nous avons démontré que les travaux n'avaient occasionné aucune destruction d'espèces."
Les travaux vont redémarrer le 9 septembre.
Maître Bernard Cazinavocat du porteur de projet
Devant les parties, la magistrate du Tribunal Administratif a estimé que le dossier était complexe. Elle a demandé au porteur de projet de reculer du 2 au 9 septembre le redémarrage du chantier afin de donner le temps nécessaire à l'étude des nouveaux faits avancés par les associations. "Nous avons accepté de respecter ce délai pour commencer la 3ᵉ phase de ces travaux de terrassement" précise Maître Cazin.
Pas de quoi convaincre Marine Leduc-Esvelin, de l'association DARé. "À l’heure actuelle, une société d'élagage effectue une taille sévère à tous les arbres de la prairie alors que l'étude a demandé ne pas élaguer avant le 31 août. Le porteur de projet agit par pur intérêt économique".
Nous sommes déjà le pays d'Europe où il y a le plus de grandes surfaces.
Corinne Lepageancienne ministre de l'écologie et avocate spécialisée dans l'environnement
En Bretagne, les litiges liés à l'environnement se multiplient. Pour Corinne Lepage, ancienne ministre de l'Écologie et avocate spécialisée dans le droit de l'environnement, "C'est inévitable, car l'inertie des pouvoirs publics pour gérer ces dossiers est terrible." Et elle ajoute "Je comprends ces recours d'associations vis-à-vis de ces grandes surfaces. Nous sommes déjà le pays d'Europe où il y en a le plus. Ce n'est plus le temps de faire cela" conclut-elle.
Le rendu de l'ordonnance du tribunal administratif de Rennes ne devrait pas être connu avant vendredi 30 août ou lundi 2 septembre 2024.