"On ne peut pas payer la facture, on arrête de se chauffer", le douloureux constat de la Fondation Abbé Pierre

Pour lutter efficacement contre la précarité énergétique, il faut la détecter et la mesurer. Des collectivités locales ont mis en place des services de diagnostic sur le terrain, qui permettent à la Fondation Abbé Pierre de publier un éclairage statistique sur la situation en Bretagne.

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Chaque année la Fondation Abbé Pierre publie L’état du mal-logement en France. Pour 2020, l’agence Bretagne de la fondation s’est fixée un objectif de mise en lumière des priorités. Il est vrai que le mal-logement peut s’entendre de différentes façons. Pour les moins bien lotis, à la rue ou chez un tiers, il s’agit déjà d'accéder au logement. Pour d'autres personnes mal logées, les questions majeures et qui peuvent se cumuler, sont celles de la surface du logement (habitat surpeuplé), de sa salubrité (habitat dégradé ou indigne) et de son isolation (passoires thermiques).
 

Le défi de la rénovation des passoires thermiques


En France 3,8 millions de ménages modestes occupent un logement avec une étiquette énergétique F ou G. Ces passoires énergétiques représentent 17% des résidences principales. En période de réchauffement climatique, la rénovation de cet habitat est à la fois une priorité sociale et une urgence pour la planète. Mais pour la Fondation Abbé Pierre, rien n’indique que les actions entreprises par le gouvernement soient à la hauteur du défi. D'où l'importance pour la Fondation d'accroître les actions de repérage, d'aider les ménages à comprendre et faire de bons choix et d'orienter les financements vers des opérations de rénovation ambitieuses et durables au profit des plus modestes, plutôt que de distribuer des chèques énergie.
 

La Bretagne est particulièrement touchée par la précarité énergétique


Dans notre région le logement individuel prédomine (maison, pavillon, ferme) et une grande partie affiche de mauvaises performances thermiques. Le nombre de logements sociaux en Bretagne est aussi inférieur à la moyenne nationale (11,8% des résidences principales contre 17,1% au plan national).  
Or, souligne la Fondation, ce sont les locataires du parc privé qui, plus pauvres et vivant dans des logements de moindre qualité que la moyenne, comptent parmi les principales victimes de la précarité énergétique.

Selon une étude de l’INSEE Bretagne de 2015, un quart des ménages bretons souffriraient de vulnérabilité énergétique (soit 203 000 ménages). Cette notion englobe les dépenses d’énergie pour le logement mais également celles liées aux transports.
 

Des outils pour comprendre la situation


Parce qu’il existe peu d'information « de terrain » sur la précarité énergétique en Bretagne, la Fondation Abbé Pierre s’est appuyée sur les premières données statistiques produites par les Services Locaux d’Intervention et de Maitrise des Énergies (SLIME) en Bretagne, grâce à un outil logiciel
Les SLIME, mis en place par des collectivités locales ont pour objectif de recenser et d’accompagner les ménages qui donnent des signes de précarité énergétique.
 

Un premier travail statistique à partir des données des SLIME


En Bretagne le premier SLIME est né en 2014, à Brest Métropole, avec le soutien de la Fondation Abbé Pierre. Puis les Côtes-d'Armor ont emboîté le pas au Finistère. Depuis 2018 la Fondation Abbé Pierre s'implique auprès du Conseil Départemental du Morbihan. Il n'existe pour l'instant pas de SLIME en Ille-et-Vilaine ce qui n'empêche que comme ailleurs, des lieux d'information, des structures de détection des besoins et de mise en place d'aides existent, mais les personnes les plus isolées et les plus modestes ignorent souvent comment y accéder.

Tout l'intérêt des Services Locaux d’Intervention et de Maitrise des Énergies (SLIME) tient donc à cette part active de détection et à une étude sur le terrain avec un relevé des données socio techniques qui permettent d'établir un panorama des situations et des besoins sur nos territoires.

Les principaux donneurs d'alerte dans les signalements de situation sont les collectivités territoriales (41%) et les CCAS (12%) puis viennent les Espaces Info Énergie et les associations. Les Fournisseurs d'énergie et les professionnels de santé ont un rôle très limité (1%).

En 2018 les premières données portent sur 1500 visites réalisées par les SLIME principalement dans le Morbihan et le Finistère.

Les principaux motifs de signalements aux SLIME 
  • des factures importantes d’énergie (29 %)
  • des difficultés à payer (16 %)
  • des impayés (16 %).
Les aspects budgétaires sont donc majoritaires (deux tiers des visites), devant les questions liées au confort du logement.


Les ressources des foyers visités par les SLIME
Ce sont essentiellement des personnes modestes (72 % ont moins de 1 000 € par mois), mais les SLIME interviennent aussi auprès de ménages « englués » dans des situations d’endettement lié à l’énergie. « Au démarrage du SLIME de Brest Métropole, nous avions des ménages aux profils très sociaux. (…) Aujourd’hui, c’est Monsieur et Madame tout le monde, ça montre l’ampleur générale du sujet», indiquent ces salariés d'Éner'gence, l'agence Énergie-Climat du Pays de Brest.

Les profils des foyers visités
En 2018, les visites des SLIME ont concerné principalement des locataires (63 %), mais aussi une part non négligeable de propriétaires occupants (27 %) et quelques ménages en situation d’occupation précaire, notamment en hébergement chez des tiers (1 %).

Parmi les propriétaires en difficulté, on trouve de nombreux ménages « captifs d’un héritage familial immobilier » ou d’une accession à la propriété compliquée, qui les plonge dans l’enfer de la précarité énergétique et du mal-logement.

Un tiers des propriétaires visités par les SLIME utilisent des chauffages d’appoint, en complément des installations du logement.

Ces propriétaires occupent principalement des logements construits avant 1949, de plus de 75 m² (48 %), aux faibles performances thermiques.

Compositions familiales
Toutes les catégories de ménages sont concernées par les visites des SLIME. Après les personnes seules (qui représentent 42 % des visites), les familles monoparentales (22 %) doivent faire l’objet d’une attention particulière : suivant les données du logiciel Solidiag (créé par le CLER et cofinancé par la Fondation Abbé Pierre), 70 % d’entre elles ont déclaré souffrir du froid et 68 % ont restreint leur consommation d'énergie.

Le piège de l'accès à la propriété
Prévenir les échecs de l’accession à la propriété est toujours une question d’actualité: des ménages modestes attirés par un foncier plus économique au premier abord, se retrouvent finalement confrontés à des opérations immobilières catastrophiques.

Pour y remédier, le Département du Morbihan a mis en place des visites-accession pour permettre aux futurs accédants de prendre la mesure des travaux à réaliser et en intégrer les coûts au moment de l’achat (réalisation d’un diagnostic financier et d’un diagnostic technique du logement, estimation du coût des matériaux et frais annexes).


La précarité énergétique touche aussi le parc HLM


27% des signalements recensés par les SLIME concernent des locataires du parc social, en raison de difficultés budgétaires et de dettes énergétiques importantes. Mais il faut remarquer que certains logements n'ont toujours pas de VMC et sont loin d'offrir des performances énergétiques satisfaisantes. Dans de telles situations, les locataires vont parfois choisir de chauffer une partie du logement avec un poêle à pétrole.
En Bretagne, 13% du parc HLM est considéré comme énergivore (classement E,F,G) avec des disparités : 6% pour Saint-Brieuc Armor Agglomération ou 19% pour Dinan Agglomération

Pour la Fondation Abbé Pierre la priorité est à une rénovation ambitieuse du parc le plus ancien.
 
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