Si la rentrée est prévue le 11, ce n'est que le lendemain que les élèves pourront reprendre le chemin de l'école. Voilà pour la théorie... Car pour ce qui est de la pratique, c'est un peu plus flou. Un véritable casse-tête pour les élus locaux et les équipes pédagogiques.
Sur le papier, ce n'est pas simple. Mais dans la réalité, c'est encore pire.
Prenons cette école située dans une petite commune de la campagne trégorroise. Pour sa directrice, qui a souhaité préserver son anonymat, "c'est le grand flou". Jusqu'à présent, elle n'a pas eu d'échange avec la municipalité sur la future rentrée. Quant aux préconisations du Ministère de l'Education nationale, elles semblent très compliquées à mettre en oeuvre, dans cette école qui compte trois classes à double ou triple niveau.
Pousser les murs de la classe
Autant dire que cette enseignante attend beaucoup de la visio-conférence à laquelle elle est conviée lundi prochain par l'inspecteur de circonscription. "J'ai plein de questions à poser. J'espère avoir les réponses pour être prête le 12 au matin," avoue-t-elle. "Dans notre école, nous avons des classes assez exiguës, avec pas mal de mobilier, on va sans doute devoir sortir des meubles pour faire davantage de places pour les élèves." Un exemple très concret auquel il faut ajouter la question des masques, du gel hydroalcoolique, des repas le midi, la liste est sans fin.
Presque aussi longue que le Protocole sanitaire préparé par le Ministère dont une version, encore à l'état de projet, circule depuis plusieurs jours, notamment via les réseaux sociaux.
Je viens de lire le protocole sanitaire d'accueil.
— Piekielny (@karenine2) May 1, 2020
Franchement, c'est très simple, je ne vois pas pourquoi vous paniquez.
Il suffit juste de transformer chaque école en hôpital.#protocolesanitaire
Projet Protocole sanitaire Ecoles maternelles et élémentaires
Sans attendre la version définitive, qui doit être publiée ce 1er Mai sur le site du Ministère, un courrier a été adressé par Emmanuel Ethis, le Recteur de l'académie de Rennes aux directeurs et directrices d'école de la Région. Les inspecteurs et les directeurs académiques de l'Education nationale l'ont également reçu. En date du 30 avril, il donne les "consignes de reprise d'activité pour le 1er dégré du public".
Dans cette note de trois pages, le Recteur rappelle que "la mise en oeuvre des consignes sanitaires s'opère au niveau de chaque école en collaboration entre le directeur d'école et le maire de la commune (ou président de l'intercommunalité), avec l'appui de l'Inspecteur de l'Education nationale".
Un calendrier à géométrie variable
Quant au calendrier, la journée du 11 mai sera une pré-rentrée dédiée aux enseignants.
Avec au programme, "la prise de connaissance des consignes sanitaires, l'oganisation pédagogique, l'analyse et les besoins des élèves".
Ce n'est donc que le mardi 12 que les élèves sont appelés à regagner leurs classes.
Une reprise progressive. D'abord les grandes sections de maternelle, les CP et les CM2 le 12 mai, puis les petites et moyennes sections, les CE1, CE2 et CM1 le 14 mai. "Ce calendrier peut toutefois être adapté en fonction des organisations locales", précise le Recteur, "notamment dans le cas de classes multi niveaux ou de priorité différentes liées à la fragilité de certains élèves".
Les groupes doivent en tous les cas être limités à 15 élèves maximum dans le primaire, et 10 en école maternelle.
Les parents peuvent librement choisir que leur enfant ne revienne pas en classe. Mais "il est préférable que ce choix puisse s'exprimer sur l'ensemble de la période allant de la date de reprise à la fin de l'année scolaire", précise Emmanuel Ethis. Les enfants qui resteront chez eux devront pouvoir bénéficier de la continuité pédagogique.
Comment se déroulera la scolarisation de mon enfant à partir du #11mai ?
— Ministère de l'Éducation nationale et Jeunesse (@EducationFrance) April 30, 2020
- Priorité sanitaire
- Organisation par école
- Instruction obligatoire et pédagogie personnalisée
Les précisions de @jmblanquer pour réussir ensemble l'enjeu du #deconfinement #COVID19 #FranceUnie pic.twitter.com/CuuB6DsI83
A Guingamp, par exemple, la rentrée se fera le 12 au matin pour tous les élèves à l'exception des petites et moyennes sections de la maternelle. "Nous avons eu une réunion avec les directeurs des écoles concernées jeudi après-midi, les trois écoles publiques et l'école Diwan", nous explique Philippe Le Goff, le maire de Guingamp. "Et nous avons choisi de faire des demi-groupes, avec une journée d'école sur deux. Ça nous permet d'être sous les seuils préconisés".
Des plateaux repas
Un courrier sera envoyé lundi aux familles des 400 enfants scolarisés dans les quatre établissements, "afin d'informer les parents, et de connaître leurs intentions pour cette rentrée".
De quoi adapter la restauration. "Nous avons pris l'option d'un plateau repas", poursuit le maire, "mais nous ne savons pas encore si nous pourrons aménager des espaces dédiés dans les réfectoires, avec plusieurs services, ou si les repas se prendront directement au sein de la classe".
A Brest, ce sont plus de 7600 èlèves qui sont scolarisés dans les écoles publiques. Pour la restauration, tous les scénarios sont là aussi envisagés.
En fait, quelle que soit la taille de la ville, l'équation à résoudre reste la même. Il va falloir faire preuve de réactivité et d'imagination. Et surtout de solidarité. Comme l'écrit François Cuillandre, le maire de Brest, dans un communiqué, "nous considérons que les objectifs et les conditions de la mise en oeuvre de la réouverture des écoles doivent impliquer l'ensemble du monde éducatif : l'Education nationale, les parents, les partenaires associatifs et la collectivité".
Flou existentiel
De quoi aider à dissiper le flou évoqué par notre directrice d'école trégorroise. Une incertitude ressentie tout autant par Nathalie Appéré, la maire de Rennes. Pour elle aussi, "nous avons besoin d'un cadre clair pour organiser, avec la Préfecture et l'Académie, un retour sûr et serein dans les classes".
Je déplore en revanche le flou autour de la reprise de l’école. De nombreuses interrogations restent sans réponse. Nous avons besoin d’un cadre clair pour organiser, avec la Préfecture et l'Académie, un retour sûr et serein dans les classes. 3/4
— Nathalie Appéré (@nathalieappere) April 28, 2020
"Est-ce qu'un jour on va revoir les gens?". C'était la question posée par une petite fille de l'école maternelle trégorroise à son père. Un flou existentiel qui ne demande qu'à se dissiper. Reste à savoir si ce sera chose faite le 12 mai prochain.