Alors que l'avortement est remis en question en Europe comme en Pologne, dans son film "Un temps de réflexion" diffusé sur France 3 Bretagne le 17 octobre, Juliette Touin aborde la question de ce choix et donne la parole à plusieurs femmes.
Sigrid, Bianca, Nathanaëlle, Marina ont accepté d'être suivies par Juliette Touin, alors qu'elles décident d'avorter. La réalisatrice de "Un temps de réflexion" (diffusé le 17 octobre sur France 3 Bretagne) les a accompagnées avec sa caméra et recueilli leurs nombreux questionnements, doutes, dans un laps de temps très réduit. "Le tournage s'est fait dans l'urgence, au regard de l'urgence de l'acte lui-même. Je les ai filmées pendant deux, trois jours maximum."
Pourquoi avoir choisi de travailler sur la thématique du choix de l'avortement ?
JT : Inconsciemment, j'ai un attrait pour les thèmes féminins. Le court-métrage que j'ai réalisé avant, à Cuba, et qui s'appelle "La Casona" parle de la maternité, des complications pendant la grossesse, de l'attente de l'accouchement. Pendant que je filmais là-bas, j'ai été très étonnée car à Cuba l'avortement est légal depuis plus longtemps qu'en Europe. Les femmes en font beaucoup chacune (6 à 7 pour certaines) et sont décomplexées par rapport à cette pratique. C'est aussi facile d'accès, sans jugement de la part de la société.Quand je suis rentrée, le parlement espagnol était en train de remettre en cause ce droit. Je me suis dit qu'en France, nous n'étions pas à l'abri d'un nouveau débat à ce sujet. Je voulais aussi faire un film ancré dans le présent et non pas sur l'histoire de l'avortement. J'assume dès le départ ma position. Je suis pour le choix de l'avortement, même si ça ne se voit pas dans le film."
Comment avez-vous trouvé les personnages du film ? Pourquoi ont-elles accepté d'y participer ?
JT : "J'ai fait beaucoup de repérages. J'ai commencé par me rapproche des plannings familiaux et de la maternité des Lilas à Paris, très connue pour son engagement affirmé par rapport à l'avortement, dans le sens où ils font tout pour simplifier la vie des femmes qui font ce choix. C'est à travers les médecins et pendant les consultations que j'ai pu parler aux futures protagonistes de mon film.Celles qui ont dit oui à mon projet l'ont fait pour trois raisons : parce qu'elles avaient déjà fait le choix au fond d'elle, pour certaines c'était aussi un positionnement féministe. Il y avait également une volonté de vouloir aider d'autres femmes. Celles qui n'ont pas accepté, c'était celles qui étaient dans une grande phase de doutes, très vulnérables, et encore dans une très grande réflexion intérieure.
Dans le film, vous montrez les consultations et même l'avortement (par voie orale), où les médecins expliquent la procédure de façon très détaillée, comment expliquez-vous ce choix ?
JT : C'est un parti pris que de faire entendre la procédure. C'est-à-dire que ça se passe comme ça. C'est bête de se cacher que l'avortement cela peut-être une aspiration, une expulsion dans les toilettes. Je ne me voyais pas l'occulter. A ce propos et lorsque j'ai fait visionner ce film à des hommes, j'ai vu que beaucoup d'entre eux ressentaient du dégoût, de la gêne, bien plus que les femmes. C'est un peu une manière de lever un tabou sur le corps des femmes.
