A l'occasion des cinq ans de la signature des accords de Paris sur le climat, France 3 Centre-Val de Loire revient sur les problématiques environnementales de la région.
Cinq ans après la signature des accords de Paris le 11 décembre 2015, qui visent à maintenir la hausse du réchaufement climatique sous la barre de 1,5°C, la France et le monde font le point. La situation n'a fait que se dégrader : en 2019, les émissions de gaz à effet de serre ont battu tous les records, et la production de charbon, de pétrole et de gaz n'a cessé d'augmenter. L'occasion de se pencher sur les principaux enjeux environnementaux dans le Centre-Val de Loire, sur lesquels la région peut agir.
Les villes prospèrent au détriment des espaces agricoles et naturels
Lorsque l'on pose la question à Isabelle La Jeunesse, maîtresse de conférences en géographie à l'Université François Rabelais de Tours, elle répond d'abord : "L'artificialisation des terres". Il y a de plus en plus de population dans les villes, alors elles sont contraintes s'étendre. Et en s'agrandissant, les villes grignotent les terres autour d'elles. Dans une région où près de 60% du territoire est occupé par des surfaces agricoles, ce sont surtout elles qui sont touchées : entre 2006 et 2015, 50 000 hectares de terres cultivables ont été perdus, d'après un rapport de la DRAAF paru en 2017. Selon lui, chaque année, 4 000 hectares de terres agricoles s'urbanisent.
Les espaces naturels, comme les forêts, sont aussi touchés par l'artificialisation des terres. L'expansion des villes détruit petit à petit et menace la biodiversité. En 2015, 30% des habitats naturels étaient menacés en Centre-Val de Loire, selon un état des lieux de l’Observatoire Régional de la Biodiversité. Si ce sont surtout les terres agricoles qui disparaissent, la région a perdu près de 50 000 hectares de forêts en 20 ans d'après Global Forest Watch.
Problème déjà connu au niveau national et contre lequel l'Etat veut lutter : en 2014 entre en vigueur la loi Alur. Elle vise à favoriser l'accès au logement, mais aussi combattre l'étalement urbain et l’artificialisation des milieux naturels et agricoles périurbains. Malgré la loi, en 2016, la consommation d’espace par habitant en région Centre-Val de Loire représente près de 1 300 m2 par habitant, soit 1,7 fois supérieure aux données nationales.
"Il faut sortir de la promesse des grands pavillions résidentiels pour chaque famille", note Isabelle La Jeunesse. D'après un rapport environnemental rendu en 2019 par la Sraddet Centre-Val de Loire, l'artificialisation progresse notamment le long de la Loire, de l'autoroute A85 et autour des villes. "L'étalement urbain est la conséquence d'une politique d'aménagement du territoire qui dure depuis 50 ans, continue la spécialiste. On a trop bouloté d'espace, cela cause des problèmes. Si on continue de s'étaler, il faut aussi penser à l'argent que coûtera les transports en commun ainsi qu'à leur impact environnemental."
La transition énergétique à développer
La réduction des gaz à effet de serre est primordiale pour lutter contre le dérèglement climatique. Un phénomène que l'on peut déjà observer à l'échelle de la région : sécheresses parfois tardives qui gagnent en intensité au fil des années, élévation de la température de la Loire qui menace la biodiversité aquatique... En 2016, plus de 18 000 000 tonnes de CO2 dans l'atmosphère ont été rejetées par la région Centre-Val de Loire, selon Ligair. D'après l'observatoire de la qualité de l'air, le transport routier est responsable de près de 35% de ses émissions et est donc le premier polluant de la région. Vient ensuite l'agriculture (25%) et le résidentiel (18%). Si ce dernier secteur pollue tant, c'est notamment à cause des mauvaises isolations qui entraînent une utilisation intensive du chauffage. "A Tours, c'est même la première cause de pollution au CO2", indique Isabelle La Jeunesse.
"L'urgence, c'est vraiment l'atténuation du changement climatique". Pour l'enseignante-chercheuse, il est donc important de développer un maximum la transition énergétique et passer aux énergies renouvelables. Dans la région, 11,3% de la consommation d'énergie provenait d'énergies renouvellables d'après l'Oreges (Observatoire régional de l'énergie et des gaz à effet de serre). En comparaison, cette proportion est de 16,3% au niveau national.
Si Isabelle La Jeunesse a tenu à citer ces problématiques, c'est parce que "nous pouvons agir dessus" assure-t-elle.
"Les solutions existent"
"Les solutions existent toutes, affirme Isabelle La Jeunesse. Même moi, je pensais avant que la problématique était technologique ou technique. En fait, elle est financière. Il suffit qu’on investisse massivement dans les solutions, et plus on le fait tôt plus ce sera facile".
C'est pour agir à son échelle que Centre-Val de Loire a créé en 2019 sa propre Cop (Conference of the Parties, à l'image des conférences mondiale sur le climat). Isabelle La Jeunesse en est d'ailleurs la vice-présidente de son conseil scientifique. Reconnaissant "l’urgence climatique", la cop Centre-Val de Loire veut encourager les initiatives qui s'inscrivent dans le cadre de la transition énergétique et "pousser le plus grand nombre de citoyens, d’entreprises, d’organismes, d’associations à se mobiliser", explique-t-elle sur son site internet.
#JournéeMondialeDuClimat ? La Région #CentreValdeLoire est engagée dans la transition énergétique et en faveur du climat avec la @CopCVL !
— Centre-Val de Loire (@RCValdeLoire) December 8, 2020
? Il s'agit de mobiliser tous les acteurs du territoire pour répondre aux urgences climatique et sociale.
➡️ https://t.co/cojIi0S0YN pic.twitter.com/nANaojHVBx
La Cop du Centre-Val de Loire veut aussi définir avec tous les acteurs "la stratégie, les objectifs et les moyens adaptés pour relever ce défi crucial et de prendre des engagements pour passer de l’ambition à l’action". La Cop régionale s'est notamment lancée comme but de suivre les objectifs fixés par les accords de Paris. Elle soutient les engagements locaux et aide dans leur démarche les particuliers.
"C'est une action primordiale dans la lutte contre le changement climatique, soutient Isabelle La Jeunesse. Ce n'est pas juste du greenwashing, c'est un vrai message positif."