Les vétérinaires sont de moins en moins nombreux à s'occuper des exploitations agricole, surtout dans le Berry. Une situation qui pourrait vite tourner à la pénurie.
La désertification médicale ne touche pas que les humains. Dans le Berry, il devient de plus en plus compliqué pour les exploitants agricole de trouver un vétérinaire, et de plus en plus dur pour ces derniers de joindre les deux bouts. A Aubigny-sur-Nère, Pierre-Marie Contet et son équipe s'occupent d'animaux de compagnie, mais il a dû mettre un terme à son activité "rurale", c'est-à-dire la clientèle regroupant les animaux dits "de rente", comme les vaches ou les moutons.L'activité rurale de moins en moins rentable
"Dans les grandes régions d'élevage, il peut y avoir des cabinets à huit ou dix vétérinaires qui peuvent ne faire que du rural, se partager les gardes et même avoir des vacances", explique le praticien. "Mais dans la majorité des cas, on a une clientèle mixte, avec peu de vétérinaires qui se partagent 80% d'animaux de compagnie et 15 à 20% de rural". Dans cette région où les élevages sont pauvres et éloignés les uns des autres, l'activité rurale est peu rentable. Son cabinet est d'ailleurs le seul à 30 kilomètres à la ronde. Après trente ans de ce régime, il a fini par se recentrer sur les animaux de compagnie, notamment exotiques."Ce qui se passe, c'est qu'on est dans une situation où la densité d'élevages de bétail se réduit dans le Berry", explique le docteur Laurent Perrin, président du Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral, dont la clinique se trouve au nord de l'Indre. Avec la baisse de l'activité, il est de moins attractif pour les vétérinaires de la région de continuer à desservir les élevages. Ils sont donc de plus en plus nombreux à abandonner le rural, tandis que de moins en moins de jeunes vétérinaires s'y dédient.
Une conséquence de la crise de l'élevage
"Il arrive un moment où la clientèle rurale est tout simplement trop peu nombreuse", poursuit Laurent Perrin. "Pas mal de mes confrères font désormais jusqu'à 85% d'animaux de compagnie." Car, lorsqu'il s'agit d'animaux d'élevage, les interventions peuvent être longues, mais surtout lointaines : là où un propriétaire emmènera sont chat ou son chien à la clinique, il faut que le praticien se déplace lui-même, sur des distances parfois très longues, pour examiner d'urgence une vache ou un cheval.En résultent des heures passées sur la route, et des conditions de travail de plus en plus compliquées. Lors de son installation à Valençay, le docteur Perrin a récupéré la clientèle "d'une dizaine de cabinets", et intervient désormais dans un rayon de 50 km. Mais le maillage du Berry en cliniques vétérinaires rurales continue à se distendre. "Si cela continue, le ministère de l'agriculture va avoir de plus en plus de mal à suivre la situation sanitaire dans la région", déplore Pierre-Marie Contet.
Former plus, former mieux
Entre les professionnels qui se détournent du rural et partent en retraite, et les jeunes qui renâclent à s'installer dans des cliniques mixtes au milieu du Berry, la situation est en effet de plus en plus tendue. Cette tension se ressent d'ailleurs aussi du côté des éléveurs, qui eux non plus ne comptent pas leurs heures, pour un salaire très souvent inférieur au SMIC. "A un certain stade, la facturation du transport, qui représente un temps pendant lequel le praticien ne peut pas faire son métier, va devenir intenable pour les éleveurs", diagnostique Laurent Perrin. Alors, la solution ? Peut-être du côté des collectivités locales ou de l'État, avec par exemple une aide, "similaire à ce qu'on a mis en place pour les transports scolaires", afin que les éleveurs puisse continuer à faire soigner leurs bêtes."Il y a aussi des erreurs qui sont commises au moment de la formation", ajoute le docteur Contet. "On sélectionne sur concours une "élite" qui n'est pas forcément prête à travailler avec des vaches, qui va se prendre un coup de pied d'une bête et retourner s'occuper des chiens et chats". Un élément de réponse pourrait donc venir d'un meilleur encadrement des étudiants par la profession, et d'une formation reposant moins sur le bachotage et davantage sur la réalité du terrain.