RÉCIT. Procès du meurtre du berrichon Arthur Noyer par Nordahl Lelandais : du premier jour au verdict

Quatre ans après les faits, Nordahl Lelandais a comparu du lundi 3 mai au mardi 11 mai devant la cour d'assises de Chambéry pour le meurtre du jeune militaire Arthur Noyer, originaire de Bourges. L'accusé a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle.

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Les jurés se sont retirés longuement pour délibérer. Mais à 23h30, après sept heures de débat, le verdict est enfin tombé : Nordahl Lelandais est condamné à 20 ans de réclusion criminelle. Il est toujours mis en examen pour le meurtre de Maëlys d'Araujo et des agressions sexuelles contre deux de ses cousines mineures.

Les derniers mots du procès

"Monsieur Lelandais, levez-vous." Alors que cette journée d'audience touche à sa fin, le président demande à Nordahl Lelandais s'il a quelque chose à ajouter. "Je tiens à vraiment vous présenter mes excuses", commence l'accusé. "Le pardon n'est pas une formule magique mais pour moi il est nécessaire." Il salue la "dignité" de la famille d'Arthur Noyer, les remercie d'être allés vers sa propre famille. "Monsieur, Arthur Noyer, je n'ai jamais voulu sa mort. Je présente les plus sincères de mes excuses à vous, la famille, les amis... à vous monsieur Arthur Noyer."

L'audience est suspendue, peut-être pour la dernière fois. Sur le parvis du palais de justice, Alain Jakubowicz répond, pour la première fois depuis le début du procès, aux questions des journalistes. "Nous avons été digne au cours de ce porcès, qui a été un procès de haute tenue", salue l'avocat. "Quel que soit le verdict qui sera rendu, je rends grâce à notre justice, qui sait prendre le temps d'analyser les choses, d'analyser les âmes aussi parfois."

Le père d'Arthur Noyer a lui aussi témoigné devant les caméras. "Il y a le droit, et puis il y a les tripes" reconnaît Didier Noyer après ces dix jours extrêmement éprouvants. "Nous serons dans l'acceptation du verdict. Vous commencez un peu à nous connaître, on veut gardez ce que vous avez appelé 'notre dignité'. C'est pas toujours facile je vous l'accorde ! Nous accepterons le verdict quel qu'il soit."

Arthur il est... mort. Ça, on le sait. Six pieds sous terre. On sait que l'Autre est vivant, qu'il va rester vivant encore un grand moment. Mais quelque part, c'est son problème. Ça m'indiffère.

Didier Noyer, père d'Arthur Noyer

 

Pour Me Jakubowicz, "tout le réquisitoire, ce sont des suppositions"

 

Dans la suite de sa démonstration Me Jakubowicz retrace la fatidique nuit du 11 avril 2017. L'assistance suit Nordahl Lelandais au cours de sa soirée et de sa nuit. Ses déambulations dans le carré Currial, la grande place chambérienne, puis vers un bureau de tabac. Sa prise de cocaïne. Son départ "entre 2h40 et 2h58". Parallèlement, Arthur Noyer quitte, lui, prend son dernier verre au RDC vers 2h du matin. Mais entre son départ de la boîte de nuit et le moment où il croise la route de Nordahl Lelandais, à 3h03, il y a "largement matière à dessoûler" nuance l'avocat.

Le reste des information est donné par deux repères temporels incontestables : "A 3h08 on retrouve le véhicule en images à St Baldoph. Il repasse au même endroit à 5h40." Entre les deux, rien d'autres que les pas enregistré par une application de santé sur le téléphone de l'accusé. "Nous avons des pas entre 3h10 et 3h19. Neuf minutes, neuf minutes. C'est là que ça se passe, c'est là que ça se passe...", poursuit Me Jakubowicz. "Il n'a pas choisi l'endroit. L'endroit est noir, il n'y a aucun éclairage. C'est le moment de la bagarre. C'est totalement cohérent."

S'appuyant sur cette "cohérence" et les éléments incontestables du dossier, Me Jakubowicz remet en question les conclusions de l'avocate générale. "C'est vrai qu'Arthur n'avait rien à faire à St Baldoph. Mais tout le réquisitoire de la procureure générale ce sont des suppositions." Le "besoin sexuel" de Nordahl Lelandais ? Il aurait pu l'assouvir dans la journée. "Imaginons que le mobile soit sexuel... So what ? Ça ne montre pas qu'il veut le tuer. Ça ne montre pas qu'il veut le tuer." Battue en brèche également, la supposée "vulnérabilité" d'Arthur Noyer, qui bien que n'étant pas bagarreur, "sait se battre".

A l'inverse, l'avocat de la défense cherche à entretenir le doute raisonnable sur ce qui s'est réellement passé lors de ces neuf minutes. "Ce qu'il s'est passé avant le coup porté, il faut en être indifférent. Ce qu'il s'est passé après n'a absolument rien à voir", tacle Me Jakubowicz. "Ce n'est pas parce Nordahl Lelandais est allé en soirée le 13 qu'il a voulu tuer Arthur le 11." Il termine en s'adressant aux jurés. "Ici vous êtes des juges. Les incohérences, les mensonges, le silence d'un accusé ne font pas la culpabilité. Le mensonge est un droit, il ne constitue pas la qualification d'un crime. Le silence est un droit. Ainsi que celui de ne pas s'auto-incriminer." Il rappelle également comment le droit s'est appliqué dans une autre affaire, l'assassinat d'Alexia Daval après lequel son époux, Jonathan, a été condamné à vingt-cinq ans de réclusion. "Ça ne vaut pas trente ans, ça ne vaut pas trente ans !" scande l'avocat. Et de conclure : "Jugez, Jugez... Jugez fermement mais jugez justement. Je vous remercie."

"Ce n'est pas un monstre que vous jugez, c'est un homme. Un homme !"

Il est 14h40 lorsque Me Jakubowicz s'avance à la barre, prenant la suite de son confrère et de sa consoeur. "C'est cela un procès d'assises", débute-t-il. "L'émotion, l'indignation, les sourires, les pleurs, la souffrance, l'intimité mise à nu, le concentré de souffrance. Un mot qui résume tout cela : l'humanité." Et une image aussi, celle de Didier Noyer tendant la main à la mère de Nordahl Lelandais, "il a franchi le Rubicon", commente l'avocat.

Et c'est bien de l'humanité de l'accusé dont il est question dans cette dernière plaidoirie. Et pour toucher cette humanité, il faut, pour l'avocat, déchirer la figure monstrueuse construite par "une certaine presse". "On a tellement envie de croire qu'il n'est pas comme nous", lâche Me Jakubowicz.

Vendredi soir, je voyais sur une chaîne de télévision, un bandeau s'afficher : "Nordahl Lelandais, un monstre séducteur." Non, non, non ! Ce n'est pas un monstre que vous jugez, c'est un homme. Un homme !

Me Alain Jakubowicz, avocat de Nordahl Lelandais

Et cet homme, "il est paumé, totalement paumé", poursuit l'avocat. "La vitesse, la cocaïne, la drogue, le sexe", énumère-t-il pour qualifier "cette déchirure totale". "Nous, on n'a pas voulu enjoliver Nordahl Lelandais, mais simplement que vous le voyiez tel qu'il était."

La banalité du mal

A 14 heures, c'est au tour de la défense de Nordahl Lelandais de prendre la parole. Avant Me Jakubowicz, principal conseil de l'accusé tout au long de ce procès, deux autres avocats prennent la parole. Le premier veut, derrière le "monstre" construit par les médias, montrer l'homme "banal" sur le banc des accusés.

"Personne n'a voulu y croire", constate l'avocat au sujet de la réaction des proches de Lelandais aux faits qui lui sont attribués. "Ses amis ont tous dit leur stupeur. Ça a été le leitmotiv de chacun d'entre eux. Ces témoignages sont importants, ils disent la banalité de cet homme." La "banalité" de Nordahl Lelandais reviendra à plusieurs reprise au cours de la plaidoirie, comme une manière d'équilibrer le portrait dressé jusque là. "Quand vous délibérez, je veux que vous ayez en tête les mots de ses amis", conclut l'avocat. "Accordez lui cette banalité. Ça remettra un peu de vérité dans ce dossier"

La deuxième avocate, Me Valetine Pariat, prend la suite de son confrère. Elle aussi veut nuancer le portrait de celui que l'accusation a présenté comme un "prédateur sexuel". Le sexe, explique-t-elle, a été dans le procès l'un des moteurs pour faire de Nordahl Lelandais un "monstre". Or la sexualité de l'accusé est "banale" elle aussi, et "toujours fondée sur le consentement".

C'est bien plus rassurant de se dire que la mort d'une petite fille ne peut être causée que par un monstre. Que c'est rassurant de se cacher derrière cette image. Mais lorsqu'on s'écarte de cette image de serial killer, et que l'on juge un homme, c'est plus complexe.

Me Valentine Pariat, avocate à la défense de Nordahl Lelandais

"Quand vous partirez délibérer", assène enfin l'avocate, "refusez la facilité et demandez-vous ce qui a bien pu se passer." Elle se rassied. Il reste désormais la plaidoirie de Me Jakubowicz.

Une peine de "trente années de réclusion" requise par le parquet

C'est au tour de l'avocate générale de procéder aux réquisition. Son rôle, dans le procès, est de "représenter la société" avec impartialité. Au nom de cette même impartialité, rappelle l'avocate générale, le parquet avait demandé la requalification de l'assassinat d'Arthur Noyer en meurtre. Le parquet revient alors sur les éléments encore flous du dossier : "pas de scène de crime", la longue dissimulation du corps qui empêche de connaître la cause exacte du décès et le "trou de deux heures trente" délimité par les caméras de vidéosurveillance et le bornage téléphonique. Deux heures et demie pendant lesquelles seul l'accusé, selon l'avocate générale, sait ce qu'il s'est réellement passé.

Alors que sait-on ? "On sait avec certitude qu'Arthur Noyer voulait rentrer à la caserne" de Barby, selon l'avocate générale. Il n'avait aucune raison de se rendre à Saint-Badolph, où Nordahl Lelandais affirme l'avoir emmené. On "sait" également qu'il est ivre, et donc "vulnérable", mais qu'il n'a pas l'alcool violent et qu'il n'est pas attaché à son téléphone. Il ne se serait pas battu pour le récupérer, encore moins dans son état.

Cette même nuit, Nordahl Lelandais est "à la recherche d'une rencontre" depuis au moins une heure et demie lorsqu'il rencontre Arthur Noyer, selon le parquet. "Je ne vois, pour ma part, aucune autre hypothèse. Le mobile sexuel est donc, et c'est la dernière fois que je le dirais, le seul que l'on peut retenir."

Si elle écarte la préméditation des faits, l'avocate générale veut cependant faire la démonstration de "l'intention de tuer" Arthur Noyer. "Lorsqu'il y a des coups sans vouloir donner le mort, l'auteur ne cache pas le corps", avance-t-elle, notant la "maîtrise de la situation" du maître-chien dans les minutes qui suivent le meurtre, et "l'énergie" qu'il dépense à faire disparaître le corps.

Phrase après phrase, le parquet déconstruit l'hypothèse d'un homme qui aurait tué "malgré lui". L'avocate générale revient sur la violence "extrême" d'un meurtre "à coups de poings", d'une "victime à terre qu'il s'emploie d'achever". Elle revient sur le comportement inchangé de l'accusé dans les jours qui suivent. Elle évoque, enfin, l'affaire Maëlys, pour laquelle Nordahl Lelandais devrait être jugé à la fin de l'année ou en 2022. "Un homme qui aurait tué malgré lui, aurait-il recommencer à tuer cinq mois plus tard ? Évidemment non."

Ce sont sur ces faits que vous déclarerez Nordahl Lelandais coupable d'avoir donné la mort à Arthur Noyer.

Au terme de son réquisitoire, l'avocate générale insiste une dernière fois sur l'expertise psychiatrique de Nordahl Lelandais et sur sa dangerosité "pour ses semblables". "Je considère que tous ces éléments justifient une peine de 30 années de réclusion criminelle. C'est ce que je requiers. Je vous demanderais de l'assortir d'une peine de sûreté des deux tiers", soit vingt ans. L'audience est suspendue jusqu'à 14 heures.

"Il voulait parvenir au crime parfait"

Me Bernard Boulloud, conseil juridique des parents d'Arthur Noyer, est le premier à prendre la parole. Sa plaidoirie, qui reproche toujours à Lelandais de "jouer une pièce de théâtre", campe deux personnages que la cour a appris à connaître au cours des derniers jours. L'un, Arthur Noyer, jeune caporal jovial, blagueur, "même galant", repose "dans cette magnifique ville de Bourges, surplombé par cette cathédrale". L'autre, Nordahl Lelandais "est là aujourd'hui, se présentant comme le gendre idéal devant les juges, devant la cour". D'un côté la famille "digne, sincère", de l'autre un accusé qui "ne regarde jamais dans les yeux". "Pendant sept jours il a tenté d'instiller le doute dans votre esprit", reprend l'avocat. "Et s'il y a doute, c'est qu'il y a intention de donner la mort."

Les images de la reconstitution rediffusée la veille au soir doivent être encore fraîche dans la mémoire de l'assistance. Me Boulloud revient sur les incohérences du témoignage de Nordahl Lelandais. Comme l'affirmation de l'accusé en garde à vue selon laquelle Arthur Noyer lui aurait demandé de le déposer au col de Marocaz, où sera découvert le corps. Nordahl Lelandais reviendra sur sa position, affirmant cette fois qu'Arthur voulait se rendre à Saint-Badolph, "mais c'est faux, archi-faux" insiste l'avocat. Cette nuit-là, "la personne qui est venue en aide à Arthur le soir où il se fait voler ses téléphone est claire. Cette dame dit qu'Arthur voulait bien rentrer à la caserne" à Barby, dans la direction opposée.

Scène suivante, Arthur descend de la voiture de Nordahl Lelandais, cette même Audi A3 qui conduira les enquêteurs à le mettre en cause dans la disparition de Maëlys. Selon l'accusé, Arthur oublie son téléphone dans la voiture, et frappe Lelandais lorsque celui-ci essaie de lui rendre, le prenant pour un voleur. "Les coups de poing d'Arthur. Il n'y en a jamais eu !" clame Me Boulloud. "Ni le lendemain, ni les jours suivants, Nordahl Lelandais ne présentait les stigmates physiques d'une bagarre. Arthur Noyer n'a jamais frappé Nordahl Lelandais, jamais ! C'est lui qui a frappé Arthur pour lui donner la mort."

Enfin, au moment de se débarrasser du corps, Me Boulloud insiste sur les tentatives de Nordahl Lelandais de brouiller les pistes. "Il s'aperçoit que le téléphone d'Arthur est sur le siège", note l'avocat de la famille. "Il aurait pu le laisser dans la veste d'Arthur Noyer. Il lui avait rendu en sortant du véhicule. Non, il jette le corps, habillé du blouson. Et il jette le téléphone plusieurs kilomètres plus loin. C'est bien joué." Au moment de conclure, Me Boulloud achève le portrait de Nordahl Lelandais esquissé au début de la plaidoirie : un homme "capable de tuer et de rester sans affect", "capable de maquiller et de cacher ses proies". "C'est un menteur, un manipulateur", lâche enfin l'avocat.  "Mon rôle n'est pas d'accuser. Mais, M. Lelandais, est-ce que notre version ne se rapproche pas de la vérité ? Vous pouvez encore parler ! Mais nous savons que vous ne la direz pas." A la fin de cette plaidoirie, l'audience est suspendue.

Mardi 11 mai : une septième journée décisive

Avec cette septième journée d'audience, après l'audition de tous les témoins et des expertises, le procès de la mort d'Arthur Noyer entre dans sa phase finale et décisive. La journée a débuté par la plaidoirie des parties civiles, qui revient à Me Boulloud, l'avocat de la famille Noyer. Elle sera suivie par le réquisitoire, où le ministère public fera sa demande de sanction à l'encontre de l'accusé. Enfin, la défense aura une dernière fois l'occasion de s'exprimer lors de sa propre plaidoirie.

Le verdict pourrait être délivré dès la fin de journée.

Le résumé de cette sixième journée d'audience

Ce sixième jour d'audience était consacré aux expertises psychiatriques et psychologiques de Nordahl Lelandais. Les deux psychologues et deux psychiatres appelés à la barre ont dressé le portrait d'un homme secret, enfermé sur le plan émotionnel, et qui réserve son empathie pour ses proches.

L'avocat de Nordahl Lelandais, Me Jakubowicz, a tenté de battre en brèche les expertises, soulignant les différences entre les deux psychologues et le ton "péremptoire" du Dr Blachère. La lecture d'une cinquième expertise, celle réalisée en 2018 et dont l'avocat de la défense demande l'annulation, a également été demandée par le président de la cour. La septième journée d'audience, avec les plaidoiries et les réquisitoires, pourrait être la dernière de ce procès.

 

Nordahl Lelandais prend la parole

Les photos de la reconstitution du meurtre d'Arthur Noyer défilent, suivies d'une vidéo. Le président demande à Nordahl Lelandais s'il souhaite s'exprimer sur les rapports d'expertise et sur cette reconstitution. "Pour moi, certaines choses ne sont pas vraies comme mon manque d’empathie" affirme l'accusé. "Tous les jours, je travaille sur ce qui a été dit, avec les soignants. Je fais beaucoup de lectures sur l’enseignement du bouddhisme."

En prison, comme le précise son avocat, Nordahl Lelandais suit des cours par correspondance et prépare les épreuves du brevet des collèges. Il reçoit également les visites d'une femme plus âgées, qui lui écrit et l'aide à sortir de l'isolement. L'accusé renouvelle ses "excuses" aux parents d'Arthur Noyer. Des excuses que ces derniers, par la voix de leur avocat, reçoivent "comme une paire de gifles". L'audience est suspendue. La septième journée sera consacrée aux plaidoiries des avocats des parties civiles, au réquisitoire et à la plaidoirie de la défense. Le verdict pourrait être rendu dès le soir du 11 mai.

Un individu "dangereux" pour le dernier expert psychiatre

Vers 16 heures, c'est au tour du dernier expert, le psychiatre Patrick Blachère, de prendre la parole. Ce dernier décrit l'accusé comme "quelqu'un de normalement intelligent, qui n'est pas malade mental, du moins au moment des faits". Comme ses confrères, il balaie toute idée d'altération ou d'abolition du jugement de Nordahl Lelandais au moment du passage à l'acte. Concernant ses deux condamnations par la justice, il ne ressent "aucune culpabilité, aucun sentiment de honte", poursuit le psychiatre.

"Il présente un trouble grave de la personnalité. Sa responsabilité n'est ni altérée ni abolie même s’il a pu présenter des décompensations après coup. Sa dangerosité est importante"

Patrick Blachère, expert psychiatre

Nordahl Lelandais "n'a aucun accès au remords", poursuit l'expert. "Sa capacité d’être en empathie n’est associée qu’à sa famille, et à la peur d’être abandonné." A cause de son absence de remords, de son manque d'empathie et de son peu d'implication dans le soin, l'accusé possède d'après l'expert un profil doté d'une dangerosité importante.

De son côté, Me Jakubowicz a contesté point par point l'expertise psychiatrique, invoquant des points "subjectifs" dans les observations du psychiatre. Il demande combien de fois l'expert a rencontré l'accusé. Le docteur Blachère répond qu'il a vu Nordahl Lelandais deux fois, et qu'un diagnostic doit normalement être posé en 50 minutes. "Moi je suis lent, je l'ai vu une heure, une heure et demie", assène l'expert.

Mais l'avocat ne lâche pas le morceau : "vous êtes péremptoire, vous savez tout, vous connaissez beaucoup de grands criminels qui n'ont qu'une seule condamnation à leur casier judiciaire ?" lance Me Jakubowicz. L'avocat hausse le ton. "Vous affirmez  péremptoirement qu'il est incapable de reconnaître sa culpabilité", s'énerve-t-il. Le docteur Blachère se défend, toujours assez calme : "le terme de culpabilité c'est pas au sens judiciaire, c'est le fait de se sentir coupable." L'agacement de Me Jakubowicz est visible. "Ça me bluffe de pouvoir affirmer les choses avec une telle assurance !" Et de poursuivre, agacé : "vous dites que Nordahl Lelandais a peu d'investissement en prison, mais de quel investissement parlez-vous ? Il ne peut pas travailler, il ne peut pas suivre de formation, il est à l'isolement !"

La président de la cour annonce qu'un dernier rapport va être lu : celui du Dr Bensussan, à l'encontre duquel une procédure est en cours à la cour de cassation pour qu'il soit frappé de nullité. L'avocat de la défense reproche au psychologue son manque d'impartialité après un passage dans C dans l'air. Après une suspension d'audience, et à la demande de l'avocat de la famille d'Arthur Noyer, Me Boulloud, des images de la reconstitution du meurtre du caporal vont être à nouveau diffusées devant la cour.

L'inaccessible psyché de Nordahl Lelandais

Après une suspension en fin de matinée, l'audience reprend à 12h10 avec l'arrivée à la barre du psychiatre François Danet. Avec ses deux collègues, il a rencontré Nordahl Lelandais sur trois temporalités, et brosse rapidement et d'une voix forte le portrait psychiatrique de l'accusé. Pour le psychiatre, Nordahl Lelandais "a toujours dit qu'il accepterait de répondre" aux experts, mais ses réponses sont "très peu informatives".

"Il ne dit rien" sur la maladie de son frère, atteint d'une pathologie musculaire dégénérative, "rien" de la période sports-études, "rien" de la fibromyalgie de son père. "Finalement, on est confrontés à une succession d'événements sur lesquels il n'y a pas d'affect." Il en est de même de ses relation amoureuses et de ses ruptures, au sujet desquelles les experts ont eu du mal à faire parler l'accusé de ses émotions. "Il ne décrit ni motivations sexuelles, ni motivations non sexuelles."

D'après le psychiatre, Nordahl Lelandais s'est enfermé dans son cheminement psychologique, et cela pourrait être l'une des raisons qui le poussent à dire très peu de choses sur ses motivations en ce qui concerne les faits qui lui sont reprochés. S'il s'ouvre, "il risque de s'effondrer de façon majeure", note François Danet, soulignant un risque suicidaire. Ce silence serait une "auto-protection narcissique". "C'est quelqu'un d'intelligent, mais qui n'a pas les ressources émotionnelles pour parler de ses échecs" explique l'expert. "Je vais toutes les semaines en détention, les détenus font des actes très graves : viols, meurtres, pédophilie. Mais ces détenus me parlent, ils me parlent de leur vie affective, émotionnelle. Mais chez Monsieur Lelandais, ce n'est pas le cas."

Enfin, François Danet et ses collègues psychiatres évoquent l'impression qu'aux alentours de 2016, "il y a comme un tournant du côté de la recherche de sensations fortes" avec "un accroissement selon 3 dimensions : fréquence, intensité et durée". Faute de propos sur lesquels s'appuyer, le psychiatre fait la liste des arguments en faveur de deux scénarios possibles, celui d'un acte colérique, ou d'un épisode sadique. Une troisième possibilité serait celle d'un premier événement colérique commis après un "stresseur", suivi d'un 2e événement sadique qui pourrait correspondre, quatre mois après la mort d'Arthur Noyer, à celle de la petite Maëlys en août 2017.

Avant les faits qui lui sont reprochés, Nordahl Lelandais avait fait par deux fois l'occasion de consulter un psychologue, mais il n'a pas réitéré, note François Danet. "Nous n'en serions pas là aujourd'hui" s'il avait poursuivi ce travail, pour le psychiatre.

L'avocat de Lelandais passe à l'attaque

Me Alain Jakubowicz, qui est déjà parvenu à faire annuler une première expertise psychologique de Nordahl Lelandais, tente d'appuyer sur les éventuelles incohérences entre les deux expertes appelées à la barre. "On a l'impression que vous n'êtes pas totalement en phase et que vous ne parlez pas forcément du même homme", pointe Me Jakubowicz, qui vise plus particulièrement Hélène Dubost. Cette dernière a eu 3 entretiens avec Nordahl Lelandais, contre 6 pour sa consoeur.

"On a le sentiment Madame Dubost que vous n'aimez pas Nordahl Lelandais", tance l'avocat. "On n'est pas là pour aimer ou ne pas aimer", répond l'intéressée. "On est là pour écouter un sujet et constituer la compréhension que l'on peut en avoir." La défense fait alors remarquer qu'Hélène Dubost a rencontré Nordahl Lelandais au sein d'une unité psychiatrique où il était "soumis à un traitement médical intense". La psychologue rétorque que si elle avait eu "le moindre doute" sur la capacité de l'accusé à lui répondre, elle aurait reporté le rendez-vous. "Je n'aurais pas hésité une seconde."

 

Un profil "narcissique", "dans le contrôle" et impulsif

Les deux expertes appelées à la barre, Hélène Dubost et Magali Ravit, notent un parcours affectif "difficile à retracer", et une lutte "avec des états de vulnérabilités très forts". Hélène Dubost mentionne un premier entretient avec "un homme froid, distant, dans le contrôle". Auprès de cette première experte, Nordahl Lelandais se présente comme la victime de la confrontation avec Arthur Noyer, affirmant qu'il "s'est bien défendu".

Le portrait affectif de l'accusé est celui d'un homme proche de sa mère et de ses chiens, qui sont devenus sa "bouée affective" selon Magali Ravit. Fidèle, le chien est devenu pour lui à la fois un modèle et un refuge émotionnel. Sportif, Nordahl Lelandais s'est construit une "enveloppe narcissique musculaire".

Il consomme des femmes, des hommes, des enfants, comme s'il avait besoin de ça pour se sentir vivant, éviter de s'effondrer au point de vue narcissique.

Hélène Dubost, experte psychologue

Sur le plan sexuel, Nordahl Lelandais "évoque sa curiosité pour tout ce qui est nouveau et son excitation pour la découverte" pour justifier les agressions sexuelles de deux petites cousine, pour lesquelles il est également mis en examen. L'ancien maître-chien a également consulté des sites pédopornographiques. Lors de la mort de Maëlys de Araujo, l'accusé indique avoir "vu la tête d’Arthur Noyer qui revenait dans l’air". Pour les deux expertes, Nordahl Lelandais "ne présente aucun élément clinique qui permet de dire qu’il souffre de troubles notoires".

"Il paraissait relativement sociable, connaissait beaucoup de monde", note Hélène Dubost, la première experte appelée à la barre. "En surface, on aurait pu penser qu'il était comme tout le monde." "Il consomme des femmes, des hommes, des enfants, comme s'il avait besoin de ça pour se sentir vivant, éviter de s'effondrer au point de vue narcissique."

Lundi 10 mai : une sixième journée consacrée aux expertises psychologiques et psychatriques

Le procès entre dans sa phase finale ce lundi 9 mai, largement consacré aux expertises psychologiques et psychatriques de l'accusé. L'avocat de Nordahl Lelandais, Me Alain Jakubowicz a d'ores et déjà indiqué son intention de démonter point par point les analyses réalisées sur Nordahl Lelandais. Dès la première journée du procès, la défense avait en effet demandé la nullité d'une expertise réalisée en 2018, mettant en question "l'impartialité" du Dr Paul Bensussan. La première expertise, réalisée par le Dr Bensussan et le Pr Rouillon, a donc été annulée. Deux expertes psychologue sont appelées à la barre pour tenter d'établir un profil psychologique plus fin de Nordahl Lelandais.

 

Le résumé de cette cinquième journée d'audience

L’interrogatoire de Nordahl Lelandais était au cœur de ce cinquième jour de délibération. Très attendu, il a exaspéré la famille Noyer. En effet, l’accusé a maintenu jusqu’au bout sa version des faits, autrement dit une bagarre qui aurait mal tourné. Un homicide involontaire donc et non pas un assassinat prémédité.

Même lorsque son avocat maître Jakubowicz l’a poussé dans ses retranchements, l’accusé a calmement affirmé : "Je n'ai jamais voulu tuer qui que ce soit. […] Ce que j’ai dit c’est ce qu’il s’est passé. Il n’y a rien de sexuel. Rien du tout".

 

 

 

A la suite des témoignages de deux anciens employeurs d'Arthur Noyer et de trois de ses amis, le décrivant comme gentil et blagueur, le président de la cour détaille le programme de la semaine prochaine : plaidoiries et réquisitoires le mardi, le verdict final étant attendu le lendemain, le mercredi 12 mai. L'audience est pour le moment suspendue, elle reprendra ce lundi 10 mai à 9 heures. 

Verdict attendu mercredi 12 mai  

Après avoir détaillé avec son client le déroulé heure par heure de cette nuit fatidique tout en restant sur la même position, l’avocat lui pose une ultime question : "Si cette version n’est pas la bonne c’est le moment. […] As-tu autre chose à dire ?" "Ce que j’ai dit c’est ce qu’il s’est passé. Il n’y a rien de sexuel. Rien du tout", conclut Nordahl Lelandais.

Une fois que son avocat lui réclame une explication sur ce qu’il s’est passé, l’accusé hésite : "J'ai du mal à expliquer. Je ne sais pas ce qu'il se passe. C'est un enchaînement d'événements qui fait que je me perds tout seul." Maître Jakubowicz le reprend : "Il faut que l’on se contente de ça ?" Silence de Nordahl Lelandais.

C’est à présent à l’avocat de l’accusé de questionner son client. Il insiste sur les envies sexuelles de Nordahl Lelandais le 11 avril 2017. L’ancien maître-chien avoue avoir ce même jour sollicité deux de ses connaissances pour une rencontre d’ordre sexuel : Camille et Richard. Sans réponse. "Si tu as une pulsion ce soir-là, plutôt que de chercher une proie, tu n'as pas des solutions ?", demande maître Jakubowicz. Lelandais lui répond : "Si j'ai des solutions, bien-sûr."

Lelandais face à son avocat 

Le président de la cour fait maintenant un parallèle avec la disparition de la petite Maëlys. Quand Nordahl Lelandais explique lui avoir donné des coups sans n’avoir jamais voulu sa mort, le président lui lance : "C'est un peu la même explication qu'Arthur Noyer ?" "Oui, je n'ai jamais voulu lui donner la mort", répond l’accusé. "Est-ce que la nuit de la disparition de Maëlys vous éteignez vos téléphones", reprend le président. Dans son box, Nordahl Lelandais acquiesce. Le président rétorque : "Vous voyez une similitude du mode opératoire ?" L’accusé reste silencieux.

Un mode opératoire bien rodé ?

Quand le président demande à l'homme de 38 ans pourquoi avoir cherché un endroit si reculé pour cacher le corps sans vie d'Arthur Noyer, l'accusé répond : "Mon but c'était qu'on ne le retrouve pas. Parce que j'avais tué un homme." Le président de la cour reprend : "Vous vouliez échapper à vos responsabilités ?" "Oui Monsieur le Président", admet Nordahl Lelandais. Il explique ensuite avoir déposé le corps sur le bord de la route et que celui-ci aurait glissé tout en bas d'un ravin de cinq mètres de profondeur.

Si Nordahl Lelandais certifie avoir paniqué et avoir essayé de sauver Arthur Noyer en pratiquant un massage cardiaque, le président de la cour pointe une incohérence : "Mais monsieur Lelandais, vous avez la présence d'esprit d'éteindre vos téléphones [à 3h31 et 3h41] ? On est face à quelqu'un qui panique ?" L’accusé réplique : "A ce moment-là je ne veux pas qu'on cherche à me contacter ou à savoir où je suis. [...] Je panique, la preuve, je ne les éteins pas en même temps."

Alors que le président rappelle à l'accusé que plusieurs témoins ont assuré à la barre qu'Arthur Noyer voulait rejoindre sa caserne ce soir-là, l'ancien maître-chien, tenace, affirme de son côté que le jeune Berruyer lui avait demandé de l'emmener à Saint-Baldoph. 

Moment de panique ?

Le président de la cour poursuit : "Vous avez changé trois fois de version. Laquelle est vraie ?" "Je n'ai jamais saigné de l'arcade sourcilière, avoue Nordahl Lelandais. Comme j'avais tué un homme, j'ai voulu gonfler cette attaque envers moi. C'est compliqué Monsieur… d'expliquer… que l’on a enlevé la vie à un jeune homme", continue-t-il. 

L’homme de 38 ans admet que le soir du meurtre d’Arthur Noyer, le 11 avril 2017, il devait voir Richard pour "avoir une relation sexuelle". Quand le président l’interroge ensuite sur ses déambulations nocturnes ce soir-là autour de la boîte de nuit, Nordahl Lelandais rétorque : "J'avais l'habitude de venir sur Chambéry tous les jours... J'y connaissais beaucoup de monde, je voulais continuer ma soirée."

Trois versions différentes 

Quand vient les questions sur Arthur Noyer, l’accusé semble avoir plus de mal : "Bien sûr c'est dur de dire qu'on a enlevé la vie à un homme. L'assassinat c'est une préméditation. Je n'ai jamais voulu tuer qui que ce soit. Jamais... Jamais... Jamais..." Tout en maintenant la version d’une bagarre qui aurait mal tourné, Nordahl Lelandais dit avoir caché la mort du jeune caporal pendant des mois par manque de courage.

"Monsieur Lelandais, levez-vous !" Dès l’entame de ce cinquième jour d’audience, le président de la cour enjoint l’accusé à répondre à toutes ses questions : c’est le début de l’interrogatoire de Nordahl Lelandais. L’ancien maître-chien avoue tout d’abord qu’il a pu mentir à ses ex-compagnes, qu’il a pu être impulsif et manipulateur : "Mais Céline [une ex] a aussi été manipulatrice avec moi", se justifie-t-il.

7 mai, cinquième journée d'audience : l'interrogatoire de Nordahl Lelandais 

Le résumé de cette quatrième journée d'audience

L’ancien codétenu de Nordahl Lelandais a assuré que l’accusé lui avait avoué en prison avoir "éclaté" la tête d’Arthur Noyer avec une pierre après que celui-ci a refusé de lui faire une fellation.

Moment très fort du procès en fin de journée avec les témoignages consécutifs des parents, du frère et de la grand-mère du jeune caporal, tous très émus à la barre. "Nordahl Lelandais n’est pas un psychopathe car la maladie ça se soigne. C’est un prédateur social, a lancé le père, Didier Noyer. L’accusé a eu une envie, Arthur a été une proie."

 

Les larmes aux yeux, Quentin, le petit frère d'Arthur, s'adresse violemment à l'accusé : "Arthur c'est mon frère. On avait les liens du sang. Mais Arthur, c'était mon confident. Mon meilleur pote. [...] A cause de toi Nordahl, je récupère mes potes, mes parents, mes grands-parents à la petite cuillère, ajoute-t-il. [...] Toi t'es au chaud, t'es tranquille. Nous on a encore une vie à mener. Toi, ta vie elle est finie."

La colère du frère, Quentin Noyer    

Si elle évoque la douleur que représente le fait de ne pas voir vieillir son fils, Cécile Noyer tient à rappeler qu'il continue de vivre dans le cœur de ses proches : "Son meilleur copain a eu un petit garçon. Et son deuxième prénom c'est Arthur... et ça c'est le plus beau...", confie-t-elle avant de s'effondrer à nouveau. Son mari vient la soutenir, les grands-parents sont en pleurs, une grande partie du public également.  

Elle fixe Nordahl Lelandais droit dans les yeux : "Après avoir nié, vous admettez avoir tué Arthur mais par accident. Je pense que quand on tue par accident on a un minimum de culpabilité." Elle poursuit : "Vous avez tué Arthur, vous vous êtes débarrassé de son corps et vous avez continué à vivre comme avant. Vous lui avez volé sa vie." Cécile Noyer continue de s'adresser directement à l'accusé : "L'humanité est là à la barre depuis le début. Pas dans le box. [...] Oui vous êtes comme moi. Une personne physique. Mais c'est vide." 

La mère d’Arthur s’avance à présent. "Pendant huit mois mon téléphone ne se coupait jamais. Je dormais avec le téléphone allumé. Je disais à Arthur qu'il fallait que je dorme, qu'il fallait qu’il vienne m'aider", se souvient Cécile Noyer avant de pleurer elle aussi à la barre. Son fils Quentin vient immédiatement l’épauler.

Vous avez tué Arthur, vous vous êtes débarrassé de son corps et vous avez continué à vivre comme avant. Vous lui avez volé sa vie

Cécile Noyer, mère d'Arthur

Pour Didier Noyer, il ne fait aucun doute que Nordahl Lelandais n’est pas un psychopathe car selon lui, "la maladie ça se soigne. C’est un prédateur social, lance-t-il. L’accusé a eu une envie, Arthur a été une proie", conclut-il. 

A la barre, le père raconte la relation qu’il avait avec son fils : complice, ouverte d’esprit, pleine de tendresse et de partage : "Ça a toujours été le pari de la famille. Considérer qu'il y a plus de gens intelligents que de bandits. Et c'est vrai, déclare-t-il. Et parfois on rencontre des méchants..." Il poursuit : "Depuis que t'es parti je ne danse plus de Rock and Roll avec ta mère. Et ça, ça m'embête un peu", témoigne-t-il avant de s’effondrer, en larmes.

Didier Noyer, le père d’Arthur se tient à présent debout devant la cour. C’est à lui de témoigner : "Jusqu'en 1990 j'étais seul. Cette année-là, je suis devenu deux, j'ai rencontré Cécile [Noyer]. En 1993, ma mesure était de trois, Arthur est arrivé. En 1995, j'étais quatre avec l'arrivée de Quentin. En 2017, elle est retombée à trois."

Témoignage des parents d'Arthur Noyer

Suite des images des caméras de surveillance extérieures. Dès 1h40, on distingue Nordahl Lelandais roder aux abords de la boîte de nuit, à pied puis en voiture. On le voit continuer à tourner ainsi en rond à 2h57. Son Audi A3 grise est finalement détectée quelques minutes plus tard à Saint-Baldoph, à 3h08.

Sur les images le Berruyer de 23 ans a du mal à tenir debout à cause de l’alcool. Le président de la cour prend la parole : "Est-il en état de faire face à un adversaire avec lequel il doit se battre ?" La réponse du médecin légiste est claire : "Dans cet état, le cervelet est atteint, la coordination des mouvements est moins bonne. Ça me paraît donc peu compatible de donner des coups et d'en recevoir en restant stable."

Alors que Nordahl Lelandais continue de parler d’une bagarre qui aurait mal tourné, le légiste indique qu’il est peu probable qu’Arthur Noyer ait pu rester debout lors des échanges de coups : "Sa stabilité aurait dû être altérée par l'alcool." S’ensuit le visionnage des caméras dans et en dehors de la boîte de nuit dans laquelle le jeune caporal a passé sa dernière soirée. La famille Noyer y fait face, soudée, solide.

Arthur Noyer aurait été dans l'incapacité de se battre 

"Les liaisons osseuses constatées sont compatibles avec les faits rapportés par monsieur Lelandais, ajoute l’autre. Ce sont vraiment le nez et le maxillaire gauche qui sont liés à des actions contondantes : des coups, un choc avec une surface dure... On ne peut pas orienter vers une action précise." Le président rétorque alors : "On ne peut pas déterminer les causes exactes de la mort ?" "On est très limité. On ne peut ni faire d'autopsie, ni prélèvements biologiques, ni prélèvement de tissus", conclut le médecin légiste. 

Deux autres experts légistes sont appelés à la barre, l’un physiquement, l’autre en visio-conférence. Le président de la cour les interroge sur l’emplacement des ossements qui se situaient à 300 mètres du crâne. "Les os se séparent naturellement. En pente, ils peuvent se déplacer. Les animaux peuvent aussi en être à l'origine", renseigne l’un des deux spécialistes.

Les causes exactes de la mort difficiles à déterminer 

L’avocat de la famille Noyer questionne l’experte : "Vous avez relevé un fracas au niveau maxillaire gauche. Ça peut donc correspondre à un coup ?" La légiste acquiesce tout en précisant qu’un coup ou un fracas au sol pourrait être à l’origine de la fracture au nez. Maître Boulloud poursuit : "Lorsque celui qui donne les coups va s'abîmer les mains. Quelles parties vont être abîmées ?" "Les articulations à la base de la phalange", certifie la médecin légiste.

Reprise de l’audience en ce début d'après midi avec la médecin légiste en visio-conférence. C’est elle qui a examiné le crâne d’Arthur Noyer. Elle expose son analyse : "Il y avait des fractures au nez et au maxillaire gauche. Les fractures sont survenues sur un os frais très proche du décès. Avant ou après." Seuls les parents et le frère d’Arthur font face aux photos dudit crâne, les grands-parents ont eux décidé de quitter la salle pendant la projection.

Le crâne d'Arthur Noyer présentait de multiples fractures 

Le témoin poursuit : "Il se vantait de ce qu'il avait fait au commandant Arthur et que la liste était longue". "Votre témoignage n'est pas un témoignage sur lequel l'accusation se fondera", lui rétorque finalement l'avocate générale. "Monsieur, vous vous trouvez au milieu de quelque chose qui vous dépasse", lance maître Jakubowicz, avocat de Nordahl Lelandais, à l'ancien codétenu. 

"Un jour on est sortis en promenade ensemble. Je lui ai demandé ce qu’il s'était réellement passé. Il m'a dit qu'il avait pris Arthur Noyer en stop et qu’il lui avait demandé une fellation. Arthur a refusé et est sorti pisser, Nordahl Lelandais l'a suivi et lui a mis un coup de pierre par derrière", révèle le témoin. Dans le box, l’accusé fait à plusieurs reprises signe qu’il n’est pas d’accord avec cette déclaration. L’ancien codétenu précise par ailleurs qu’il avait donné de la cocaïne à Nordahl Lelandais le jour où il lui avait fait cet aveu.   

C’est cette fois au tour de l’ancien codétenu de l’accusé de s’avancer vers les jurés. Le témoin est actuellement sous le coup d’un mandat d’amener pour ne pas avoir répondu aux sollicitations du parquet. Il a été cherché de force à son domicile.

"Lelandais a mis un coup de pierre à Arthur Noyer

Elle se souvient d’un homme secret, qui aimait se mettre en avant et qui mentait beaucoup : "Il y avait deux Nordahl. Le super mec, le super pote. Le côté ange. Et le côté démon, les mauvaises fréquentations." La témoin raconte ensuite qu’elle avait vu l’accusé le 9 avril en pleine forme, puis le 13 avril, "très renfermé". Elle confirme à la cour n’avoir vu aucune blessure, ni sur son visage, ni sur ses mains. Les photos postées par Christelle le 13 avril sur Instagram prouvent le contraire : un zoom sur l’image démontre la présence d’égratignures sur le poignet de Nordahl Lelandais. La femme assure en revanche l’avoir vu utiliser son Audi A3 grise ce jour-là.

Premier témoin du jour, Christelle, 43 ans, ancienne copine de Nordahl Lelandais. Dérangée par la présence des journalistes, elle a d’abord du mal à s’exprimer sur leur relation. Le président de la cour la relance : "Est ce que des vidéos ont été faites ? Étiez-vous consentante ?" "Il le sait, là-dessus je ne lui pardonnerai jamais, répond Christelle. Il n'y en a eu qu'une. Ça a été très compliqué. J'ai été harcelée et menacée de mort pour ça. Des gens m'ont retrouvée sur Facebook."

6 mai, quatrième journée d'audience : témoignages de la famille Noyer 

Le résumé de cette troisième journée d'audience

Ce sont d’abord les amis militaires d’Arthur Noyer qui ont pris la parole. Unanimes, ils ont parlé de lui comme un homme gentil, avenant et très bien élevé, toujours prêt à faire la fête mais sans n’avoir jamais eu "l’alcool violent".

Alors que Nordahl Lelandais a avoué à la cour avoir inventé une blessure pour rendre sa bagarre avec Arthur Noyer crédible, ses anciens amis se sont succédé à la barre : "Ce que tu as raconté c’est ta vérité… ce n’est pas LA vérité", a adressé l’un d’eux à l’accusé.

 

Alors quand Nordahl Lelandais avoue, Nazim appelle la mère de l’accusé : "Je lui ai dit que je ne pouvais plus être son ami. Qu'elle n'avait pas le choix d'être sa mère, mais que moi j'avais le choix de ne plus être son ami. Je l'ai fait", déclare-t-il. Bouleversé par ce témoignage, l’avocat de l’accusé maître Jakubowicz essuie ses larmes. Nordahl Lelandais s'effondre.

C’est dorénavant à Nazim de s’avancer. Il se présente comme un ancien ami très proche de l’accusé : "Il connaissait ma mère... ma sœur... ma femme... ma fille... Vous ne faites pas rentrer quelqu'un en qui vous n'avez pas confiance dans ce cercle", s’émeut-il. Selon le témoin, il lui était impossible d’imaginer son ami agir ainsi.

"Je ne pouvais plus être l'ami de Nordahl Lelandais"

S’ensuit une discussion directe entre les deux hommes : "Ce que tu as raconté c’est ta vérité… ce n’est pas LA vérité", lance le témoin. "De quelle vérité tu parles, celle de BFM-TV ?", rétorque Nordahl Lelandais. "Non pas du tout, celle des faits. Pourquoi tu as pris cette personne en stop ? Je sais que tu ne fais pas les choses innocemment", conclut Julien.  

A la barre à présent, Julien, l’ancien meilleur ami de Nordahl Lelandais. Le témoin admet avoir du mal à reconnaître l’homme qu’il a autrefois côtoyé. "Vous êtes déçu ?", lui demande le président. "Extrêmement, je n’ai pas les mots, indique-t-il. J’ai vraiment une colère qui ne disparaîtra jamais", ajoute Julien.

"Ce que tu as raconté c’est ta vérité… ce n’est pas LA vérité"

Le président de la cour prend la parole : "Cet événement vous a nécessairement perturbé ? Puisque vous disiez être paniqué le soir des faits. Et 36 heures après vous arrivez à cette soirée comme si de rien n'était." Aucune réponse de l’accusé. Le président reprend : "Vous avez inventé une blessure à l'arcade sourcilière pour rendre cette bagarre avec Arthur Noyer, crédible ?" "Oui", avoue Nordahl Lelandais.

Nouveau témoignage, celui d’Alexandra. Elle était en soirée avec Nordahl Lelandais le lendemain de la disparition d’Arthur Noyer. Selon elle, l’accusé ne présentait aucun signe laissant présager ce qu’il s’était passé quelques heures auparavant. "Je me mets une très grosse carapace", lui rétorque directement Nordahl Lelandais. "Je t'ai vu quelques heures après, Nordahl. Tu étais normal. Ce n'est plus une carapace là, tu le sais, lui répond Alexandra. Tu ne peux pas dire que c’était un accident ce n’est pas possible", poursuit-elle.

Nordahl Lelandais : "Je me mets une très grosse carapace"

Elle se souvient qu’Arthur était "très alcoolisé" mais "lucide" : "On a rigolé tous les deux, il a tourné la situation à la dérision." Bien décidé à rentrer à pied, le caporal lui aurait baisé la main pour lui dire au revoir : "J’ai trouvé ça adorable, commente Véronique. Ça se voyait qu’il était gentil. Il m’a remercié un nombre de fois incalculable", poursuit-elle. Maître Boulloud lui demande si Arthur avait prévu de rentrer au 13e régiment cette nuit-là : "Oui il me l’a dit", affirme la témoin.

Après le témoignage confus rendu "nul" d’un barman de la discothèque chambérienne le ‘RDC’, c’est au tour de Véronique, 29 ans, de s’exprimer devant la cour. Elle est l’une des dernières personnes à avoir longuement discuté avec Arthur Noyer le soir de son meurtre, "une trentaine de minutes" selon elle. Véronique explique qu’elle sortait de son travail – dans un bar à l’époque – quand elle a croisé le jeune homme. Il venait de se faire voler son portable dans la rue par deux individus qui le lui ont rendu avant que la police n’arrive.

Arthur avait bien prévu de rentrer au 13e régiment cette nuit-là 

Le président de la cour l’interroge ensuite sur l’orientation sexuelle de son ami : "Je n’ai jamais ressenti d’attirance de sa part pour un homme", assure Alexis. Autre ami proche et camarade de chambre d’Arthur à l’armée, Théo confirme : "Il m’a parlé de quelques filles. […] Je n’ai aucun doute sur son orientation sexuelle. Il était hétérosexuel.

Présent dans la salle d’audience, un autre ami d’Arthur, également camarade à l’armée, s’avance à la barre. Tout comme Vincent, Alexis parle du chasseur alpin comme quelqu’un de gentil avec tout le monde, toujours prêt à rencontrer de nouvelles personnes. Il confirme qu’ils rentraient souvent soûls, mais toujours "conscients" de leur état : "On pouvait rentrer tout seul. On était joyeux." Selon lui, Arthur n’était pas un bagarreur dans l’âme.

Vincent affirme à la cour qu’Arthur n’avait jamais montré de signe d’énervement, même en soirée : "Il était toujours jovial, ça a toujours été comme ça. […] Il n’avait pas l’alcool violent ou agressif. […] C’était quelqu’un d’entier qui aimait rire et profiter de chaque instant."

"Arthur n'avait pas l'alcool violent"

Premier témoin de ce troisième jour d’audience en visio-conférence : Vincent, 27 ans, ami et ancien collègue militaire d’Arthur Noyer. C’est avec lui que le jeune caporal berruyer a passé sa dernière soirée en boîte de nuit le 11 avril 2017. Le témoin se souvient d’une nuit alcoolisée, à base de bières et de vodka. Il avoue avoir pris de la cocaïne, pas Arthur. Il assure cependant à l’avocate générale qu’ils n’étaient pas ivres et que son ami était lucide : "Il tenait debout, il était un peu éméché mais pas au point de tomber." Observation que confirmera un peu plus tard dans le procès Alain, propriétaire du bar dans lequel Arthur s'est rendu ce soir-là : "Il parlait très clairement, il n'était pas ivre mort. Il marchait droit.

5 mai, troisième journée d'audience : les amis d'Arthur Noyer et de Nordahl Lelandais à la barre

Le résumé de cette deuxième journée d'audience

On a vu défiler à la barre les ex-compagnes et compagnons de Nordahl Lelandais. Tous dépeignent le portrait quasi unanime d’un homme à la double personnalité, tantôt doux et attentionné, tantôt violent et susceptible, avec un penchant sexuel très prononcé.

Le moment fort de ce deuxième jour a été le témoignage de l’accusé qui a donné sa version des faits sur la nuit du 11 au 12 avril 2017. Emu aux larmes, Nordahl Lelandais s'est directement adressé à Arthur Noyer : "Désolé Arthur. Désolé pour ta famille. Mais je dis la vérité." Loin de convaincre l'avocat de la famille : "C'est du cinéma", s'est insurgé maître Boulloud.

 

Les enquêteurs découvrent que le 25 avril, soit 13 jours après la disparition d'Arthur Noyer, l'ancien maître-chien a cherché sur Internet 'décomposition d'un corps humain'. Le 18 décembre, les résultats des tests ADN du crâne révèlent qu’il s’agit bien du corps du jeune Berruyer. Commence alors le premier jour de garde à vue de Nordahl Lelandais. Ce n'est qu'en janvier 2018 que sont retrouvés le reste des ossements du caporal, à 300 mètres de là où se situait son crâne.

Le 7 septembre 2017, un promeneur découvre un crâne humain à quelques kilomètres, à Montmélian précisément, quelques semaines après le meurtre en août de la petite Maëlys. Une disparition qui aurait mis les enquêteurs sur la piste Lelandais à cause notamment de sa voiture, une Audi A3 grise, dans laquelle il aurait enlevé la petite fille. La même que celle repérée sur les caméras de surveillance de la police pendant l’observation du trajet d’Arthur Noyer le 11 avril.

Après une suspension de quelques minutes, le procès reprend. Le directeur d’enquête à la section de recherche de la gendarmerie de Chambéry retrace la dernière soirée d’Arthur Noyer. Une soirée tardive et "alcoolisée", durant laquelle l'homme de 23 ans s’est fait voler son portable en pleine rue par deux individus qui le lui ont finalement rendu. Aperçu seul dans le centre-ville de Chambéry, le caporal a ensuite disparu des caméras de surveillance.

Découverte du crâne d'Arthur Noyer le 7 septembre 

L’accusé révèle avoir ensuite décidé de dissimuler le corps non loin de chez Chloé, une de ses ex-compagnes. Un endroit "discret", idéal pour dissimuler le corps. Il se dit incapable de savoir où il est allé ensuite. En pleurs, Nordahl Lelandais s'adresse directement à Arthur Noyer : "Désolé Arthur. Désolé pour ta famille. Mais je dis la vérité." Une déclaration qui n'a pas convaincu l'avocat de la famille : "C'est du cinéma", s'est insurgé maître Boulloud.

Moment très attendu par les proches d’Arthur Noyer, Nordahl Lelandais livre à présent sa version des faits sur la nuit du 11 au 12 avril 2017. L’accusé assure que c’est le jeune caporal qui ce soir-là, lui a fait signe de s’arrêter. Qu’une fois déposé devant une salle des fêtes, le Berruyer de 23 ans lui aurait mis un coup de poing, pensant qu’il lui avait volé son téléphone. Une bagarre entre les deux hommes aurait ensuite éclaté jusqu’à ce qu’Arthur Noyer tombe en arrière, ne donnant plus aucun signe de vie. "Sur le moment je ne comprends pas ce qu’il se passe, assure Nordahl Lelandais. Je décide de faire un massage cardiaque. Il n’y a toujours aucune réaction", poursuit-il confus.

"Désolé Arthur"

Autre témoin à la barre, David, ami de longue date de Nordahl Lelandais avec qui les liens se sont peu à peu défaits. Il le décrit comme instable, incapable de garder un travail ou une petite amie : "On l’appelait ‘Belle-vie’ car c’était quelqu’un qui ne bossait pas souvent", témoigne-t-il. Tout comme les ex compagnes de l’accusé entendues aujourd’hui, David évoque un homme caractériel et impulsif à qui il n’aurait jamais confié ses enfants : "Il n’était pas assez mature pour s’en occuper", conclut-il.

Quelques minutes plus tard, quand l’avocat de l’accusé le remercie pour son témoignage, Richard rétorque : "Je pense à la famille. J’aurais très bien pu finir comme le caporal Noyer."

C’est cette fois Richard, avec qui Nordahl Lelandais a eu une aventure sexuelle jusqu’en mars 2017, qui s’avance devant les jurés. Le jeune homme affirme n’avoir jamais ressenti de danger : "En dehors du fait qu’il se droguait à chaque fois, oui il avait l’air lucide", indique-t-il. A la demande de Cécile et Didier Noyer, maître Boulloud s’adresse directement à Richard : "Vous n’avez rien à voir avec la mort d’Arthur". Sanglotant, il répond : "Je suis désolé pour vous".

"J'aurais pu finir comme le caporal Noyer"

Présente "pour Arthur", Céline, troisième ex-compagne de Nordahl Lelandais, décrit l’accusé comme son "harceleur". En pleurs à la barre, elle parle d’un homme à la double personnalité, tantôt calme, tantôt extrêmement colérique : "J’ai cru que j’allais mourir", lâche-t-elle, persuadée que l'accusé a tenté de la tuer. L'avocate générale l'interroge alors sur la consommation de cocaïne de Nordahl Lelandais : "Il avait toujours le nez qui coulait. Il avait une boîte avec une paille et de la cocaïne à côté", assure Céline.

Quand maître Boulloud, avocat de la famille Noyer, la questionne sur leurs rapports sexuels, la témoin répond : "Ils étaient intenses, il y en avait beaucoup. S’il voulait faire l'amour, on le faisait. […] J’ai découvert avec lui la relation du dominé et du soumis. J’étais la soumise", précise-t-elle.

Après Chloé, c’est au tour de Vanessa, autre ex-compagne de l’accusé, de s’adresser à la cour. Elle raconte que leur relation a commencé à se dégrader après leur installation ensemble en 2013 : "On avait des grosses disputes qui ont marqué mon fils. Il se cachait sous la table." Elle poursuit : "Une fois il m’a serrée tellement fort le bras que j’ai dû aller chez le médecin, relate-t-elle. Je n’ai pas porté plainte, j’avais peur, il menaçait mes proches." Une violence qui s’est poursuivi avec leur rupture, "virulente" selon Vanessa, ponctuée de menaces physiques et verbales.

Un homme aux deux visages

Alors qu’elle n’avait que 17 ans, elle se rend compte que Nordahl Lelandais, âgé à l’époque de 29 ans, est en couple. "Il s'est assez vite emporté, me disant qu'il faisait ce qu'il souhaitait. La conversation a pris fin, il a raccroché, et je n'ai plus eu de nouvelles pendant plusieurs mois", témoigne-t-elle. Elle décrit l’accusé comme un homme nerveux mais jamais violent avec elle. "Je n'aurais jamais pensé qu'il puisse faire ceci", déclare Chloé. Utilisée comme alibi par Nordahl Lelandais le soir du meurtre d’Arthur Noyer, elle assure n’avoir rien vu, rien entendu : "Je dormais", dit-elle. 

Début de cette deuxième journée du procès dès 9 heures ce mardi 4 mai. Le parcours de vie de Nordahl Lelandais est encore au coeur des débats. Chloé, ex-compagne de l'accusé, est le premier témoin du jour à s'avancer à la barre. Une relation qui a duré un an, en 2012 : "Ce n'était pas une relation amoureuse mais on se voyait, se souvient Chloé d'une voix hésitante. C’est resté une relation d’ordre sexuel, dans son véhicule. Souvent en soirée dans des coins un peu isolés", précise la jeune femme.

4 mai, deuxième journée d'audience : la version de Nordahl Lelandais

Le résumé de cette première journée d'audience

Après avoir sommé les jurés de faire abstraction de la médiatisation de l’affaire, l’avocat de la défense maître Alain Jakubowicz a voulu frapper fort dès le début du procès en demandant la nullité d’une expertise psychiatrique datant de 2018. Demande que la cour a finalement accepté.

On retiendra également que Nordahl Lelandais a reconnu "avoir tué Arthur Noyer sans le vouloir". Il aurait confié à un voisin de cellule en prison que la mort violente du jeune caporal était la conséquence de proposition à caractère sexuel. A la fin de la journée, sa mère lui a demandé de dire toute la vérité. "Bien sûr que je vais le faire maman", lui a répondu son fils, tout en s'accrochant à sa version d'un accident.   

 

Christiane Lelandais s'adresse ensuite à son fils en le suppliant de dire la vérité. Ebranlé par le portrait géant d'Arthur, porté à bout de bras par la famille Noyer depuis le début du procès, l'accusé se dit prêt à "tout dire". 

Aux questions du président de la cour sur l'impulsivité de Nordahl Lelandais, sa mère répond : "Nordahl caractériel ? Non. Difficile ? Si quelque chose n'allait pas il mettait un coup de poing dans un mur. Mais c'était pas souvent. Coléreux ? Non, c'est tout...", explique-t-elle.

En cette fin d'après-midi la mère de l'accusé s'avance à la barre, reprenant les mêmes mots que l'enquêtrice de personnalité : "C'était un enfant désiré, doux, normal. L'adolescence n'a pas posé plus de problème que cela. En tant qu'adulte il a vécu sa vie. Je ne l'ai pas vu venir", déclare Christiane Lelandais, avant d'assurer avoir retrouvé son fils d'avant l'incarcération. Ce à quoi réagit maître Bernard Boulloud, avocat de la famille Noyer : "Ici il y a Cécile et Didier... et eux ils ne retrouveront jamais leur fils. C'est le vôtre qui l'a tué. Vous n'y êtes pour rien madame."

Dire toute la vérité

Le président de la cour questionne ensuite l'enquêtrice à propos de la relation entre Nordahl Lelandais et ses parents. "Normale" et "plutôt proche", notamment avec sa mère, répond l'interrogée. "Tout est correct", confirme calmement l'accusé, avant d'ajouter quant à ses relations sentimentales et sexuelles : "Tout s'est toujours passé dans le respect."

Côté vie sentimentale, Nordahl Lelandais a entretenu plusieurs relations à partir de ses 17 ans, lesquelles se sont plutôt terminées en bons termes jusqu'à une "grosse déception" pour l'homme, avec l'avortement de sa troisième compagne : "Il croyait à toutes ces relations, il voulait être père", informe l'enquêtrice de personnalité. Sa dernière conjointe l'a décrit comme "très changeant" mais a précisé auprès de l'enquêtrice que l'accusé n'a jamais été violent avec elle. Quant à son orientation sexuelle, l'investigatrice explique : "Lorsque je l'interroge sur sa bisexualité, Lelandais n'a pas parlé d'une attirance pour les hommes mais d'une simple curiosité."

Mandatée pour étudier le comportement de l'ancien maître-chien, le témoignage à la barre d'une enquêtrice de personnalité tranche avec celui du président de la cour. Elle évoque une enfance "dénuée de toute difficulté" ou de toute "violence". "Sa mère parle d'un enfant calme, débrouillard et obéissant. Tout ce qu'il touchait, il le réussissait", raconte-t-elle.

Une enfance sans difficulté

Le Berruyer est mort d’une fracture du rachis cervical et d’une atteinte aux voies respiratoires, possiblement dues à l’utilisation d’une pierre par Nordahl Lelandais. Pour sa première prise de parole aujourd'hui, l'accusé déclare : "J'ai donné la mort à Arthur Noyer mais sans vouloir lui donner. J'ai jamais voulu lui donner la mort".

En ce début d'après-midi, le président de la cour décrit Nordahl Lelandais comme un homme "impulsif" ayant "une activité sexuelle importante, autant avec des êtres féminins que masculins". Il rappele par la suite que l'envie d’avoir une relation sexuelle avec Arthur Noyer pourrait expliquer le fait de l’avoir emmené à Saint-Baldoph (Savoie) le 11 avril 2017. Fortement alcoolisé cette nuit-là, le jeune caporal aurait alors été incapable de se défendre.

Un homme impulsif, très actif sexuellement

Après avoir suspendu l'audience le temps de délibérer, la cour accepte finalement la demande de nullité de la défense. L’expertise psychiatrique de 2018 ne sera donc pas prise en compte pour ce procès.

Au tour ensuite de l'avocat de la famille Noyer de s'avancer vers les jurés : "Arthur, ce qu'il reste au fond de ta tombe doit se retourner avec ce que tu viens d'entendre. [...] Il avait le droit de vivre, monsieur Lelandais, et vous l'avez tué", s'indigne maître Bernard Boulloud. Une déclaration qui pousse Nordahl Lelandais à baisser la tête pour la première fois depuis le début du procès.

Toujours à la barre, maître Jakubowicz demande l'annulation d'un rapport d'expertise psychiatrique de Nordahl Lelandais datant de 2018 : "Ce n'est plus le même homme", déclare-t-il. L'avocat reproche également à l'un des experts présent aujourd'hui au procès de s'être exprimé sur l'affaire dans l'émission C dans l'air sur France 5, sans en informer la cour : "Un expert ne peux pas être un expert a la télévision et devant la cour, dénonce-t-il. Monsieur le Président, je ne doute pas que si vous aviez su que cet expert était intervenu dans cette émission, vous ne l'auriez pas désigné." A la suite de quoi maître Jakubowicz demande officiellement un pourvoi en cassation.

Demande de pourvoi en cassation 

Avocat de l'accusé, maître Alain Jakubowicz s'avance à la barre en ôtant son masque : "Les journalistes ont surabondamment traité cette affaire, on va vous demander de faire abstraction de tout ça. Il ne faut tenir compte que de ce que vous entendez dans ces débats", adresse-t-il aux jurés, précisant par ailleurs que lui et son client ne porteront pas de masque au moment de prendre la parole. "C'est ce qu'il doit à la famille et à l'opinion publique. Apparaître sans filtre", ajoute-t-il. 

Dès l'entame de la séance, le président de la cour rappelle aux parties civiles et au public que les Assises peuvent être un "lieu violent" et leur demande donc d’avoir un "comportement digne". Il s'adresse ensuite à Nordahl Lelandais, relativement détendu au moment de décliner son identité : "Vous allez être jugé comme n’importe quel autre accusé, les jurés et magistrats sauront faire abstraction de la médiatisation". A noter que six jurés ont été tirés au sort et que l'avocate générale a demandé quatre jurés supplémentaires.

Début de l'audience 

Par ailleurs poursuivi pour avoir tué la petite Maëlys de Araujo en août 2017 et pour avoir agressé sexuellement trois de ses petites-cousines la même année, Nordahl Lelandais risque pour son premier procès 30 ans de réclusion criminelle. Le verdict est attendu autour du 12 mai 2021.

C'est donc pour identifier ce qu'il s'est réellement passé ce soir du 11 avril 2017 qu'une cinquantaine de témoins et d'experts ont été convoqués par la cour d'assises de la Savoie pour un procès d'une dizaine de jours. Un procès obligé de s'adapter aux contraintes sanitaires, avec une capacité d'accueil réduite de moitié et l'ouverture pour la quarantaine de médias accrédités d'une deuxième salle avec écran pour retransmettre en direct l'audience.  

Un premier procès déterminant

A partir de 10 heures ce matin, la cour d'assises de la Savoie (Chambéry) examine les circonstances du meurtre du jeune Berruyer Arthur Noyer. Sur le banc des accusés : Nordahl Lelandais. Cet ancien maître-chien de 38 ans est accusé d'avoir tué le caporal, âgé de 23 ans à l'époque, après que ce dernier a refusé ses avances. Si Nordahl Lelandais a avoué en mars 2018 être à l'origine du décès du jeune militaire du 13e bataillon de Chasseurs alpins, il a toujours parlé d'un décès accidentel, d'une "bagarre qui a mal tourné". 

"Ils ont une appréhension mais ils sont déterminés. Ils sont là avec beaucoup de force mentale pour affronter Nordahl Lelandais". Voici les premiers mots de maître Bernard Boulloud pour décrire l'état d'esprit qu'ont Cécile et Didier Noyer ce lundi 3 mai. Pour l'avocat de la famille, ils sont prêts à porter le souvenir de leur fils Arthur, tué un soir d'avril 2017. "Nous allons pouvoir entrer dans une phase active de deuil", confiait le père à France 3 Centre-Val de Loire le 27 avril dernier.

3 mai, première journée d'audience : la personnalité de Nordahl Lelandais

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