M, Izia, Benjamin Biolay, Juliette Armanet, Disiz, Bob Sinclar… l’affiche est alléchante pour la 47ème édition du 1er festival de l’année en France. Bourges reste la capitale de la chanson et des musiques actuelles et populaires depuis 1977, quand un certain Daniel Colling a lancé un nouveau concept. Mais comment est né le Printemps ?
C’est un temps que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître ! Dans les années 70, la variété était omniprésente sur les plateaux de télévision et sur les ondes de radio. "Il n’y en avait que pour Sheila, Sardou, Claude François, Dalida etc." raconte Tina Poulizac, responsable des relations publiques du Printemps de Bourges pendant plus de 25 ans.
Daniel Colling avait la trentaine, il avait monté son agence artistique et faisait tourner des artistes qui n’avaient pas le droit de cité sur les plateaux télé comme Higelin, Lavilliers, Reggiani et autres.
Tina Poulizac, ancienne responsable des relations publiques du Printemps de Bourges
C’est à partir de ce constat qu’est né dans sa tête, l’idée de monter un festival de la chanson française.
Colling se rapproche de son ami écrivain, poète et journaliste Maurice Frot. Ancien secrétaire particulier de Léo Ferré, il lui suggère d’installer son festival à Bourges, où la Maison de la Culture, dirigée par Jean-Christophe Dechico, s’était dotée d’un secteur chanson, piloté par le chanteur et comédien Alain Meilland.
Le concept est original : en cinq jours, une quarantaine d’artistes et vingt concerts sont programmés dans la Maison de la Culture et sous un chapiteau monté juste en face, sur la Place Séraucourt. Il y’a là François Béranger, Jacques Higelin, Dick Annegarn, Bernard Lavilliers, Leny Escudero ou encore Colette Magny. Le succès est sans appel pour cette première édition, en 1977, avec 13.000 billets vendus.
Quand le Printemps faillit déménager à Montpellier
Dès la deuxième édition, le festival attire toujours plus de spectateurs. Mais à Bourges, c’est un peu le "choc des cultures". Certains habitants ne voient pas d’un très bon œil l’arrivée massive de "beatniks aux cheveux longs" et dormant sous la tente ou à même le sol !
Les commerçants voisins vont jusqu’à baisser le rideau pendant le temps du festival. Mais en 1985, il manque 2 millions de francs pour boucler le budget. Seule la Ville de Bourges est partenaire au départ, puis l’Etat, grâce à Jack Lang en 1982.
"Georges Frêche, alors maire de Montpellier, apprend les difficultés du festival et appelle Daniel Colling" raconte Tina Poulizac. "Il lui dit : écoute, si tu veux, je double la mise financière et viens faire ton festival à Montpellier !"
C’est alors que le Département du Cher et la Région Centre acceptent de mettre la main au portefeuille. Le Printemps reste à Bourges, et devient en même temps la référence des nouveaux talents. Le réseau des Découvertes offrira une première scène à La Mano Negra, Zebda, Les Têtes Raides, Jeanne Cherhal ou encore Christine and the Queens.
Bourges, passage incontournable
Pour les artistes, le Printemps est un passage obligé. Il est aussi le théâtre de concerts exceptionnels comme celui de Johnny Hallyday et Eddy Mitchell en 1985, The Cure en 1987 ou encore Johnny Clegg en 1988.
Mais c’est aussi le rendez-vous des politiques. Jack Lang en 1982 sera le premier à s’y rendre, aujourd’hui aucun Ministre de la Culture ne manquerait l’événement. Même François Mitterrand y fait une visite "surprise" en 1987. "On a appris il y’a peu de temps, pourquoi il était venu !" se souvient Tina Poulizac. "En fait il était venu voir sa fille, Mazarine, qui était festivalière ! Mais évidemment, à ce moment-là, c’était un secret."
La nouvelle équipe garde le cap
En 2013, Morgane Prod et sa filiale C2G, dirigée par Gérard Pont, déjà propriétaire des Francofolies de La Rochelle, reprennent les rennes du Printemps. Avec Boris Vedel à la tête de l’équipe, le festival conserve son ADN : des artistes dans tous les styles musicaux investissent pendant 5 jours 10 salles de la cité berruyère, qui accueille 200 000 festivaliers tous les ans.