Cosmetic Valley en Centre-Val de Loire: le naturel revient au galop

Adieu la chimie de synthèse et (re)bonjour les molécules naturelles: de plus en plus de fabricants de cosmétiques privilégient les produits issus de la nature pour séduire les consommateurs.

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Il y a quelques années, le parfumeur Guerlain (dont l'usine est à Chartres) a mis au point un sérum anti-âge à partir... de miel ! Pour concevoir ce produit, la maison, propriété du groupe LVMH, participe financièrement à la protection des abeilles noires d'Ouessant, une espèce vivant presque exclusivement sur l'île bretonne.

En terme d'image pour la marque c'est fort, et cela va dans le sens de la protection de la nature,

revendique auprès de l'AFP Marc-Antoine Jamet, secrétaire général de LVMH et président de Cosmetic Valley, réfutant toute accusation de "green washing" (tentative de s'acheter une image verte).


Cosmetic Valleyun pôle de compétitivité né autour de Chartres, Tours et Orléans

Né en Centre-Val de Loire, la Cosmetic Valley est désormais national et concentre 1.500 entreprises du secteur et un dixième des produits de beauté vendus dans le monde. Selon M. Jamet, rencontré en marge du salon Cosmetic 360 à Paris, organisé par Cosmetic Valley, les cosmétiques naturels, du fait des importants besoins en matières premières, participent à « la renaissance » des parcelles de cultures. Comme celles de la rose centiflora aux environs de Grasse (Alpes-Maritimes).ImageCette appétence des consommateurs pour les produits naturels existe depuis plusieurs années mais les industriels remarquent, depuis deux ans, un engouement sans toutefois être en mesure de le quantifier. Avec la hausse des prix du pétrole et des matières synthétiques d'un côté et, de l'autre, les nouvelles technologies d'extraction qui rendent plus abordable l'utilisation de plantes ou de fruits, les cosmétiques naturels deviennent de plus en plus intéressants pour les industriels.
 

Valoriser ce qui ne l'était pas 

Néanmoins, si ces produits sont considérés comme plus sains et plus écologiques par le public, ils n'échappent pas à un large spectre de vérifications. "Avec la chimie de synthèse, le processus est plus cadré", explique à l'AFP Amandine Goubert, responsable projet et Recherche et Développement à Cosmetic Valley.

Avec les plantes, il faut vérifier qu'il n'y a pas eu de contamination" extérieure, ajoute-elle.


IDbio est un fabricant d'ingrédients botaniques. Son rôle est de fournir les grandes marques de cosmétiques en composants, que la société extrait de produits naturels. À partir d'un travail de recherche, elle identifie des ressources qui pourraient servir comme base à des crèmes ou parfums et contacte des producteurs.

"Nous nous basons sur des ressources qui ne sont pas utilisées dans l'alimentaire ou alors sur des aliments de fin de récolte", précise Alexia Forestier, responsable communication de cette biotech. Ceci afin de ne pas empiéter sur le secteur agroalimentaire.

IDbio utilise ainsi la fleur du safran du Limousin pour ses propriétés adoucissantes et antioxydantes. L'épice n'étant fabriquée qu'à partir de la partie supérieure du pistil, "tout le reste n'était pas valorisé". Le peu de produit nécessaire pour récupérer le principe actif recherché par les laboratoires fait qu'un abricot du Roussillon, par exemple, pourra suffire pour des dizaines de pots de crème de soin.
 

Revenir à la tradition 

L'intégration des producteurs locaux au processus de production est un facteur essentiel de la cosmétopée, un terme inventé en 2010 par le fondateur de la Cosmetic Valley, Jean-Luc Ansel (BIEN: Ansel), à partir du mot pharmacopée. Celui-ci fait référence aux médecines traditionnelles utilisant des plantes.Image
La cosmétopée se veut une méthode de recensement de toutes les traditions cosmétiques, souvent oubliées. M. Ansel, à travers ses voyages, a ainsi découvert que la grande majorité des femmes birmanes s'enduit le visage de tanaka, une crème fabriquée à partir d'un arbre. Ce produit, en plus de servir de protection contre le soleil, a des vertus anti-rides.

Quand vous avez 50 générations qui vous disent que telle plante a tel effet, il faut utiliser ce savoir pour développer une activité économique !,

assure M. Ansel, insistant sur la dimension "locale". L'objectif n'étant pas que les connaissances de ces populations se retrouvent captées par les multinationales. Pour l'instant, la cosmétopée, au sens le plus strict du terme, n'en est donc qu'à ses balbutiements.

Jean-Luc Ansel travaille à développer une filière en Polynésie française, où il a récemment publié une thèse sur le sujet. Le marché mondial de la beauté était estimé à 401.401 milliards d'euros en 2016 (source Euromonitor). Et le nombre de consommateurs de produits cosmétiques devrait augmenter de 40% pour atteindre le chiffre de 6,3 milliards d'ici 2030.

Historique de la Cosmetic Valley
  • Une histoire qui débute dans les années 70
La politique de décentralisation des années 70 incite les grands parfumeurs à quitter la région parisienne.

Ils sont alors nombreux à implanter leurs sites de production au sud de l'Ile-de-France :
- à Chartres (Eure et Loir) : Guerlain, Coty-Lancaster et Paco Rabanne s'installent en Eure-et-Loir ;
- à Orléans (Loiret) : Dior et la Rercherche LVMH (Guerlain, Givenchy, Kenzo) à Orléans,
- à Val de Rueil (Eure): Hermès et Johnson & Johnson (Roc, Neutrogena)
- à Blois (Loir et Cher) : Sisley, Procter & Gamble (Head & Shoulders, Herbal Essence) …

La présence de ces importants industriels entraîne l'installation dans la région de PME toujours plus nombreuses opérant en amont et en aval des grandes marques :
- Matières premières : huiles essentielles, matières premières aromatiques, principes actifs ...
- Emballages : injection plastique, verriers, concepteurs de PLV
- Fabricants, Conditionneurs et Formulateurs de produits cosmétiques,
- Laboratoires de contrôle,
- ...

De même, les investisseurs étrangers du secteur choisissent d'établir leurs têtes de pont en Europe au cœur de ce territoire, où l'interconnexion entre les entreprises de la Beauté et la présence de nombreux professionnels facilitent le démarrage de leurs activités :
- dans le Loiret, le japonais Shiseido s'implante,
- en Eure et Loir,  le coréen Amore Pacific et l'allemand Reckitt & Benckiser installent leurs unités de production.

 
  • 1994 : création de l'association Cosmetic Valley
Les acteurs de la filière Beauté d'Eure-et-Loir seront les premiers à s'organiser en réseau en 1994.

Ils sont une vingtaine à créer une association professionnelle dont Jean-Paul Guerlain prend la présidence.

Avec l'appui des collectivités, Conseil général et Ville de Chartres, une stratégie ambitieuse permet rapidement à la Cosmetic Valley d'acquérir une visibilité.

Labellisée « SPL » (Système Productif Localisé) dès l'année 2000 par la DATAR, la Cosmetic Valley se positionne alors parmi les pôles de compétences français les plus dynamiques.

Entre 1994 et 2000, la Cosmetic Valley aura participé à la création de 3 000 emplois en Eure-et-Loir.

 
  • 2005 : la Cosmetic Valley est labellisée "pôle de compétitivité"
Lorsque l'Etat décide d'engager une nouvelle politique économique instaurant des pôles de compétitivité, la Cosmetic Valley est tout naturellement mandatée par l'ensemble des acteurs du territoire comme porteur d'un ambitieux projet de pôle de compétitivité qui sera labellisé en juillet 2005.

L'association entreprend alors un saut quantitatif et qualitatif.

Son périmètre d'action s'élargit, passant de un à six départements présents sur trois régions :
- Centre,
- Ile-de-France,
- Haute Normandie.

Universités et organismes de formation rejoignent le pôle afin d'apporter leur expertise.
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