Le recours aux soins hospitaliers est en net recul dans les territoires ruraux, en particulier dans le Centre-Val de Loire, comme dans le Cher ou l'Indre. Et pas parce qu'on "vit mieux à la campagne".
Les campagnes sont-elles une "bombe à retardement" sanitaire ? C'est en tout cas l'avis de l'Association des maires de France (AMF) et des maires ruraux (AMRF), qui ont alerté à travers deux études publiées simultanément sur l'accès au soin. Selon elles, l'inégalité d'accès à un médecin généraliste ou aux services hospitaliers s'est creusée de façon effarante ces dernières années.
11% des Français vivent dans un désert médical
Le constat est sans appel: "L'offre (de soins) est mal répartie sur le territoire et elle se rétracte inexorablement", affirme Séverine Salgado, directrice santé à la Mutualité française, qui vient de présenté son premier baromètre santé-social réalisé avec l'Association des maires de France (AMF). "La conséquence directe c'est que 11,1% des Français habitaient dans un désert médical" en 2019, année sur laquelle porte l'étude, soit 7,4 millions de Français contre 5,7 millions en 2016 (8,6%). "Il y a une accélération de la désertification médicale", constate-t-elle."Si nous ne faisons rien, la situation va se détériorer", prévient Mme Salgado, rappelant que beaucoup de généralistes se rapprochent de l'âge de la retraite.
"Or, c'est dans les départements où la densité médicale est la plus faible que les médecins sont aussi les plus âgés." De fait, selon cette étude, à l'exception de l'Indre-et-Loire, tous les départements de la région Centre-Val de Loire attestent de l'une des plus pauvres démographies médicales en France (moins de 129 médecins généralistes pour 100 000 habitants), mais aussi l'une des plus vieillissantes (entre 40 et 51% ont plus de 60 ans).
"Le bonheur n'est plus trop dans le pré !"
La seconde étude, réalisée par le géographe spécialiste de la santé Emmanuel Vigneron pour l'AMRF, est encore plus alarmiste. Selon ce dernier, les habitants des régions rurales "consomment 20% de soins hospitaliers en moins que ceux des villes". En cause, l'éloignement des soins hospitaliers. "Depuis les années 60, puis les années 80 et même la fin des années 90, on a démontré par des études le rôle de l'éloignement sur le renoncement au soin", explique le géographe. "Encore qu'autrefois, on estimait que les ruraux avaient moins recours au soin parce qu'à la campagne on vivrait mieux... c'est beaucoup moins le cas aujourd'hui : le bonheur n'est plus trop dans le pré !"Or, cette désertification médicale reste un enjeu de politique publique puisque, comme le rappelle le spécialiste, "l'égalité devant l'accès au soin c'est une obligation légale". Et cette distance toujours plus lointaine entre les ruraux et les hôpitaux pourrait également avoir des conséquences sur l'espérance de vie, parfois de façon dramatique. Un constat d'autant plus cruel que "les campagnes sont l'avenir", à l'exemple du Centre-Val de Loire, "situé aux portes de la région parisienne avec 12 millions d'habitant, une région où les gens viennent s'installer, y compris des rois de France ou d'ancien présidents de la République !"