Le groupe pharmaceutique Novo Nordisk dont l’usine est basée à Chartres (Eure-et-Loir) va dans un premier temps aider les banques alimentaires à acheter gel, masques et denrées. Après le confinement, ce mécénat servira à lancer des actions contre le diabète à destination des plus précaires.
En Eure-et-Loir, la banque alimentaire a limité ses jours de distribution et fonctionne de manière dégradée pendant cette période de confinement.
Dans le Cher, c’est le conseil départemental qui permet le maintien des livraisons.En Touraine, la banque alimentaire dispose de stocks satisfaisants, mais jusqu’à quand ? Elle a d’ailleurs relayé un appel aux dons de la fédération française des banques alimentaires sur Facebook.Jacques Bailet, le président du réseau national, constate de façon générale une baisse des stocks. "On va être confronté à une demande plus forte de denrées, et à moins de ressources."
En cette période de confinement, les dons sont moins nombreux, et les antennes qui organisent des collectes de printemps en avril ne pourront pas forcément les mettre en place.
Grave problème de protection des bénévoles
Face à cette situation, l’entreprise pharmaceutique Novo Nordisk dont le site de production est basé à Chartres (Eure-et-Loir) a décidé dans un premier temps de soutenir financièrement le réseau d’aide alimentaire pour que celui-ci puisse acheter du matériel destiné à éviter la propagation du coronavirus."Quand on a commencé à en discuter avec les banques alimentaires, elles nous ont fait part d’un grave problème de protection des bénévoles pour livrer les repas, du fait du manque de gel, de masques, de moyens", se souvient Étienne Tichit, directeur général de Novo Nordisk France.
L'industriel s'est aussi occupé d'acheter et distribuer ce matériel aux bénévoles de la fédération française des diabétiques. "Cela nous permet de continuer nos actions, sinon on était obligé de les interrompre", ajoute Jean-François Thébaut, vice-président de la fédération française des diabétiques.On a voulu subvenir à leurs besoins de protection dans un premier temps pour qu’il y ait une continuité d’approvisionnement de ces repas. Étienne Tichit
Une partie de l’argent va également servir à "acheter des produits pour remonter les stocks là où c’est nécessaire", précise Jacques Bailet. Une procédure tout à fait inhabituelle pour cette structure qui fonctionne d’habitude exclusivement sur les dons.
500.000 € sur 3 ans
Mais cette gestion de la crise aiguë n’est que le point de départ d’un mécénat plus général. Novo Nordisk va en effet débloquer une enveloppe globale de 500.000 € étalés sur trois ans pour lutter contre le diabète parmi les populations les précaires.L’entreprise pharmaceutique danoise est en effet spécialisée dans les traitements contre cette maladie chronique et à ce titre, est en contact avec des structures comme la fédération française des diabétiques et la société francophone du diabète (SFD).
Tous se sont aperçus de la vulnérabilité de ces personnes face au coronavirus d’une part. "Un décès sur trois est une personne diabétique, donc c’est vraiment terrible", souffle Etienne Tichit."Le risque de forme grave [de Covid-19 ndlr] est augmenté par la présence d’un diabète déséquilibré ou compliqué", rappelle le Professeur Charles Thivolet, président de la SFD.
3 à 4 fois plus fréquente chez les plus précaires
Plusieurs organisations appellent d’ailleurs les personnes souffrant de cette maladie chronique à bien continuer leur suivi pendant le confinement.A lire avec attention pour toutes les personnes atteintes par une maladie chronique ! @HAS_sante @FederationAFD @Fr_Assos_Sante
— ONG Santé Diabète (@ONGSantDiabte) April 17, 2020
"Faire face à une maladie chronique pendant le confinement" pic.twitter.com/nFrm9B3f6Z
L’autre constat est que "cette maladie est 3 à 4 fois plus fréquente chez les populations en situation de précarité", explique Jean-François Thébaut."Parmi ceux qui prennent des repas aux banques alimentaires, il y a 13% de diabétiques", ajoute Étienne Tichit.
"Le diabète vient d'abord de l'obésité, du manque d'exercice et des facteurs de risque comme la consommation d'alcool, détaille Jean-François Thébaut. Les populations qui ont des très bas revenus comptent deux fois plus d'obèses, selon l'enquête ObEpi de 2012."
Donc "l’alimentation joue un rôle primordial dans la lutte contre le diabète" et "dans le contexte de pandémie et de confinement, ces personnes ont plus que jamais besoin de pouvoir prendre des repas réguliers et équilibrés", insiste-t-il.
Ateliers cuisine et session dépistage
Dans ce contexte de crise sanitaire, ces constats et les discussions entre Novo Nordisk, les banques alimentaires, la fédération française des diabétiques et la SFD ont donc conduit à un partenariat pour qu’une fois passé le confinement, des opérations communes soient engagées à destination des populations les plus précaires.Ces actions "s'intègrent dans un cadre général de prévention mise en place" par la fédération française des diabétiques depuis 2018, contextualise Jean-François Thébaut. "Notre cheval de bataille, c'est l'éducation à la santé pour apprendre aux gens à mieux manger et à faire de l'activité physique."
"On va mener des opérations pour expliquer aux gens comment bâtir des repas équilibrés, mettre en place - à titre expérimental d’abord - un atelier cuisine itinérant avec des sessions de dépistage et de communication conjointes sur diabète, précarité et prévention", détaille Jacques Bailet.
"L’idée c’est qu’on travaille de façon centrale sur un certain nombre d’outils clés, comme des fiches nutritionnelles, des ateliers cuisine", ajoute pour sa part le directeur général de Novo Nordisk France.
Journées bénévolat pour les salariés
"Mais on veut vraiment une réponse locale, mise en place et en phase avec la réalité du terrain et qu’elle perdure. D’où l’idée de ce partenariat sur trois années", insiste-t-il.Novo Nordisk promet d’ailleurs de donner des journées de bénévolat à ses salariés volontaires pour "accompagner cet effort" et prendre part aux opérations avec les associations locales de patients diabétiques et les antennes départementales de la banque alimentaire.
Le site de production de Chartres qui compte 1.200 salariés pourrait donc participer localement au déploiement de cette initiative en Eure-et-Loir.