Centre régional de pharmacovigilance de Tours : afflux de signalements sur les effets secondaires des vaccins anti-Covid

Le Centre régional de pharmacovigilance fait face à un déferlement de signalements concernant les effets indésirables des vaccins anti-Covid 19, particulièrement l’AstraZeneca.

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En Pharmacovigilance notre objectif est de suivre les médicaments y compris  les vaccins quand ils sont mis sur le marché pour mettre en évidence les nouveaux effets : soit des effets particulièrement graves, soit des effets non encore connus, qui n’ont pas été découverts pendant les essais cliniques.

Le CRPV, Centre Régional de Pharmacovigilance a ouvert à Tours en 1986, il en existe 31 en France, 1 à 3 par région. Celui de Tours est seul pour couvrir les 6 départements de la région Centre-Val de Loire. Cette structure, à vocation régionale, implantée sur le site du CHRU Bretonneau compte 2 médecins, 3 pharmaciens, 2 secrétaires et 2 assistants de recherche clinique. En temps normal pour surveiller les médicaments, cette petite équipe suffit, mais avec les vaccins c’est compliqué, ils font face a une volumétrie tout à fait inhabituelle.

Annie-Pierre Jonville-Baré, responsable du Centre Régional de Pharmacovigilance de Tours et présidente du réseau national des CRPV nous explique cette flambée de l’activité :

"Fin mars, en 3 mois on a fait l’activité de toute l’année 2020 en volumétrie, à peu près 1400 signalements dont une grosse proportion de vaccins, jusqu’à 200 par semaine et un pic du 15 au 21 mars avec plus de 200. 

Ce n’était pas du tout comme ça début janvier puisque les vaccinations ont commencé très progressivement. C’est aussi vrai que l'on n’a pas eu la même proportion avec les 2 premiers vaccins.

Il y a eu très peu de Moderna dans la région et avec Pfizer pas beaucoup d’alertes puisque, plus les gens sont jeunes plus ils font des effets réactogènes - c’est-à-dire la fièvre, des douleurs musculaires qui durent 24 ou 48 heures - comme au début on a vacciné les personnes âgées dans les maisons de retraite ces effets, pas graves et très transitoires, on ne les a quasiment pas vus."

On s’attendait à cette augmentation de signalements avec le vaccin AstraZeneca mais pas à ce point 

"On ne pensait pas que tout le monde déclarerait les effets, à priori les médecins n’ont pas à signaler les effets déjà connus, il n’y a pas d’intérêt. Mais là, avec AstraZeneca, patients et médecins ont tout déclaré : ce qui nous a beaucoup embolisé.

On fait ça pour tous les médicaments mais là pour les vaccins la volumétrie est énorme, c’est pour ça qu’on dit aux gens :

Si vous avez une rougeur autour du point d’injection, ne la signalez pas. Derrière c’est au moins une heure de travail pour la saisie.

Là on a en souffrance des centaines de dossiers, ce sont les effets non graves, connus et résolus des vaccins mais qui attendent des jours meilleurs pour être saisis. In fine ça ne sert à rien car ces données (comme la fièvre) ont déjà été saisies dans les essais cliniques, on sait que 30% des moins de 30 ans font de la fièvre.

On communique beaucoup pour demander aux patients de ne pas tout déclarer et l’ARS fait la même chose au niveau des médecins, la volumétrie a baissé mais la situation reste tendue."

"En revanche, les signalements de thromboses nous ont surpris. Dans les essais cliniques il n’y en avait pas.

Quand l’Europe a lancé l’alerte, il n’y avait qu’un cas en France, on n’en avait pas du tout en région. C’est normal, c’est la rareté qui fait ça, comme ce sont des effets très rares, il faut qu’il y ait beaucoup de patients vaccinés. En France on n’avait pas la volumétrie de patients vaccinés. Ce sont des cas compliqués, ce n’est pas facile de faire le lien avec le vaccin. Quand l’Europe a analysé les cas européens, certains pays ont décidé de suspendre la vaccination et c’est la haute."

Recenser et enquêter, c’est le rôle du centre régional de Pharmacovigilance

"On va d’abord prioriser les signalements faits par les patients et les médecins. Pour toute déclaration, on ne peut pas tout gérer donc on priorise tout ce qui est grave, tout ce qui est nouveau et on va s’attacher à faire un dossier le plus complet possible."

Si c’est un médecin qui nous a envoyé un mail on va le rappeler, essayer d’obtenir des informations complémentaires. Si le patient a été hospitalisé, ses examens, le diagnostic, son traitement...

L’idée c’est de construire une observation clinique précise sur le suivi du patient et si on pense que c’est un effet possiblement relié au vaccin on le remonte en urgence à l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et aux centres rapporteurs. Pour chaque vaccin, Pfizer, Moderna et AstraZeneca il y a 2 centres rapporteurs (au total six centres régionaux de Pharmacovigilance rapporteurs) et deux CRPV coordonnateurs : Tours et Dijon, pour l’ensemble des vaccins.

Si le problème est particulièrement grave, il est remonté en urgence sinon on documente quand même le cas et on le saisit dans la base de pharmacovigilance nationale.

On ne saisit pas un effet mais une observation clinique avec à la fin une note qui évalue le lien entre le vaccin et l’effet. Si on nous déclare un patient qui fait un infarctus la semaine qui suit  le vaccin mais qu’il en a déjà fait deux avant, ou qu’il fume, on va mettre une note basse en disant qu’on n’élimine pas le rôle du vaccin mais la probabilité est très faible alors que si c’est un patient jeune qui n’a pas de facteur de risque, là on va dire c’est possiblement le vaccin.

On n’est pas qu’un système d’enregistrement, on a une permanence téléphonique et certains médecins nous appellent. On peut les aider à faire le diagnostic après une vaccination. Comme on voit passer tout ce qui passe au niveau national, on peut lui dire que ce n’est pas dans la notice du vaccin mais qu’il y a eu 100 cas en France, que ce n’est pas grave, que ce sera mis sur la notice ensuite."

Des vaccins avec une Autorisation de Mise sur le Marché conditionnelle

Contrairement aux médicaments qui sont mis sur le marché et qu’on surveille ensuite normalement, ces vaccins ont une AMM conditionnelle."On les met sur le marché mais à la condition d’une surveillance rapprochée et à la condition de pouvoir le suspendre et le remettre", comme ça s’est passé pour AstraZeneca.

On estime qu’il n’y a pas eu assez de gens. Ce sont des techniques nouvelles, on n’a pas assez de recul en terme de durée puisque plus un effet est rare plus il faut avoir eu beaucoup de patients avant l’AMM, pour le mettre en évidence dans les essais cliniques. Les thromboses, ce serait 1 pour 100 000, comme il n’y a pas eu 100 000 patients dans les essais cliniques on a pu ne pas en avoir vu un.

Il faut rassurer plutôt qu’inquiéter

En tant que présidente du réseau des Centres Régionaux de Pharmacovigilance, Annie-Pierre Jonville-Baré insiste aussi sur le fait de dissiper les inquiétudes des personnes face aux vaccins.

"Il faut rassurer les gens, les vaccins sont surveillés de très, très près. Il faut plutôt qu’ils voient ça comme un message rassurant plutôt qu’angoissant."

Cela fait peur que l'on suspende et que l'on remette un vaccin mais en fait c’est un bon signe, ça veut dire que l'on est au plus près de ce qui peut se passer et que l’objectif est de vacciner le plus possible tout en surveillant le mieux possible aussi.

La nouveauté, concernant  les vaccins, c’est un rapport hebdomadaire. Chaque jeudi les Centres Régionaux coordinateurs et rapporteurs se réunissent avec l’Agence du médicament et on travaille sur le bilan de la semaine précédente. Les informations sont ensuite mises en ligne par l’Agence Nationale de sécurité du Médicament. Environ 13 000 effets sont recensés pour l’instant dont 80% non graves.

Tous ces cas sont saisis dans la base nationale, puis européenne pour être mis en commun dans une base mondiale.

Suite aux signalements des cas de thromboses en Europe, l’Agence européenne des médicaments (EMA) estime que les thromboses doivent être ajoutées la liste des effets secondaires très rares du vaccin AstraZeneca  mais estime que la balance bénéfices-risques reste "positive" et ne fait pas de nouvelles recommandations sur les publics à vacciner avec l’AstraZeneca.

 

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