HANDICOPS : "Il n'y a rien de mieux que l'humour pour parler de handicap", affirme Nadine Moret, comédienne

Aborder le handicap, avec des acteurs concernés par le sujet. Et en rire. C'est l'idée de la série HANDICOPS. Les comédiens de cette unité, tous professionnels et porteurs de handicap, y campent des personnages à la fois drôles et touchants. Nous les avons rencontrés.

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Le pitch d'HANDICOPS ? Aussi surprenant qu'efficace. Une brigade de police constituée exclusivement d'agents en situation de handicap est créée, dans le cadre de la loi du 11 février 2005. Ces recrues, plus ou moins expérimentées, vont devoir s'entendre et faire face à des situations inattendues.

"HANDICOPS est une fiction avec des acteurs qui ont un handicap et non une série avec des handicapés qui font les acteurs… Et ça change tout !" Alexandre Philip, l'auteur, réalisateur et acteur de ce format court, a donc fait appel à des comédiens professionnels. Leur handicap fait aussi partie de leur personnage. L'objectif est donc double : aborder le sujet avec humour.

"On peut dédramatiser le handicap, en rire, avec bienveillance", assure Nadine Moret, comédienne. Pour cette habituée des planches de théâtre, ce tournage était une première. Au sein de l'unité des HANDICOPS, elle joue la cadette Ludivine Roulier. Atteinte d'achondroplasie, elle est la rigolote de la bande, celle qui est plus attachée à trouver des jeux de mots que des indices. 

L'humour est selon moi un très bon moyen d'aborder beaucoup de choses, dont le handicap

Héloïse Gaubert, comédienne

"L'humour, c'est le vecteur le plus simple pour que les gens puissent rentrer dans une fiction", commente quant à lui Philippe Sivy. Dans HANDICOPS, il interprète le lieutenant Chapuis, un ex-flic paraplégique au caractère bien trempé. 

"Cela permet de dédramatiser et de montrer aux valides qu'être handicapé ce n'est pas négatif. Enfin, c'est négatif parce que la société n'est pas adaptée. Donc, c'est la galère, mais ce n'est pas forcément négatif en soi", affirme Héloïse Gaubert. Dans la série, elle est Leila Amann, gardienne de la paix. Son autisme la rend plus sensible aux détails et elle se révèle être une enquêtrice hors pair dans l'unité de police.

Jean-Yves Tual, lui, interprète le commissaire Jericho, un tendre colérique. Souffrant d'un handicap moteur post-opératoire, il est du même avis que ses camarades. "L'humour, c'est l'arme contre la bêtise humaine. Ce n'est pas moi qui l'ai dit mais ça se vérifie tous les jours", certifie-t-il.

Un parcours de comédien semé d'embûches

La bêtise humaine, ces comédiens semblent bien la connaître. Notamment dans le milieu professionnel. Jean-Yves Tual multiplie les anecdotes à ce sujet. Il a côtoyé de grands noms du cinéma : Catherine Frot, Gérard Jugnot, Christian Clavier, Omar Sharif, Philippe Noiret, Orlando Bloom…

Même s'il en parle avec détachement, certains d'entre eux ont eu des comportements blessants. L'ignorance assumée, les propos déplacés, mais aussi, malgré la reconnaissance de son talent par ses pairs, la difficulté à se faire un nom, dans le monde du cinéma. "Ce que je recherchais, c'était de montrer que je suis un acteur et pas qu'une personne handicapée". 

Mais pour l'acteur aux 40 ans de carrière, tout n'a pas été si simple. Jusqu'à sa participation aux Mystères de l'amour, la série dérivée d'Hélène et les garçons, dans laquelle il jouait le rôle d'Yvan, l'informateur d'Ingrid. "Ça m'a changé la vie, je suis reconnu dans la rue, maintenant. Pendant 30 ans, j'étais ignoré", souligne-t-il.

On ne cherche pas à faire pitié. L'autodérision, c'est super important

Jean-Yves Tual, comédien

Selon Nadine Moret, le constat est le même : il faut jouer des coudes pour se faire une place dans le milieu. Certains rôles restent inaccessibles, en particulier au cinéma. "C'est basé sur l'apparence. Il y a des rôles que l'on ne me donnera pas, de jeunes premiers, de belles femmes", explique-t-elle.

Théo Hellermann, lui, joue le rôle de Sharif Ilot, un négociateur porteur de trouble du spectre autistique. Pour ce comédien, les problématiques sont différentes. Son handicap est invisible, pas ou mal perçu, dans la vie de tous les jours. "Les gens ont peur de ça, ils ne comprennent pas. Il y a encore 3 ou 4 ans, je ne le disais pas. Maintenant, j'en parle parfois. Mais, en même temps, je ne veux pas que l'on me voit que comme ça", explique-t-il. 

Dissimuler son handicap pour éviter le jugement

Héloïse Gaubert, également, a parfois choisi de taire son handicap. "D'abord, parce que j'ai été diagnostiquée tardivement, et ensuite parce que j'ai eu peur d'être discriminée et stigmatisée. L'autisme est très mal connu en France. Je suis assez timide à ce sujet et je veux être vue comme une comédienne et pas comme la comédienne autiste."

L'actrice vit de ce métier depuis 3 ans. Pourtant, elle assure que devenir comédien, surtout avec un handicap, n'est pas le plus simple. "Les formations du type conservatoire sont très mal adaptées. Je n'ai jamais entendu parler d'aménagement pour les élèves handicapés", note-t-elle.

Des personnages pas si éloignés de la réalité 

Dans HANDICOPS, Théo Hellermann dispose d'atouts de taille : un sens de l'analyse aiguisé, un calme olympien, une organisation sans faille. "Mon personnage correspond à ce que je suis dans la réalité", confie le jeune acteur. Il fait en effet le parallèle entre son rôle, celui d'un intervenant extérieur, et le fait qu'il soit, dans la vie de tous les jours, plutôt solitaire.

Pour Héloïse Gaubert aussi, son rôle est assez proche de son caractère; "Le personnage de Leila est droite, franche et entière, ce que je partage avec elle. Mais je suis beaucoup plus émotive et expressive qu'elle." Jean-Yves Tual, quant à lui, a dû ruser pour s'approprier son personnage : "J'adore les rôles de composition. Mon personnage, je l'ai rendu caractériel mais sympathique". 

Je n'ai pas envie d'être catégorisé comme un comédien autiste

Théo Hellermann, alias Sharif Ilot

Pour ces cinq comédiens, HANDICOPS a toute sa place dans le paysage audiovisuel. Elle permet de véhiculer un message fort, tout en conservant un ton léger et divertissant. "Ce genre de série, qui paraît anodine, est très importante. D'autant que là, les acteurs handicapés le sont aussi dans la vraie vie", explique Jean-Yves Tual. 

Philippe Sivy, lui, a apprécié que la série ne se focalise pas sur le sujet. "Le handicap est là. Alexandre Philip en fait cas mais n'en fait pas cas. On est dans une série comme une autre, avec des situations cocasses et drôles", résume le comédien, également connu pour son rôle dans Vestiaires (France 2), aux côtés du créateur d'HANDICOPS.

Même constat pour Héloïse Gaubert : "Ça m'a plu de travailler avec d'autres comédiens handicapés, que ce soit des personnes concernées qui jouent et réalisent, c'est assez rare pour être notifié". Mieux, selon la jeune femme, le concept porté par Alexandre Philip a de quoi faire avancer le débat. "Étant lui-même handicapé, il n'avait pas de regard misérabiliste sur le handicap, ce qui est pour moi essentiel", conclut-elle. 

HANDICOPS ... une série à retrouver sur la plate-forme france.tv

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