Axe majeur de la traversée de Tours dans le sens nord sud, la rue Nationale, dont les voitures ont été totalement chassées, est réservée au passage du tram et à la circulation piétonne, mais aussi à celle des cyclistes et des adeptes de la trottinette. À partir du 16 novembre, ces derniers n'y seront plus les bienvenus, en tout cas aux heures d'ouverture des magasins.
L'interdiction des vélos et trottinettes dans la rue Nationale (sauf, bien sûr, si leur propriétaire met pieds à terre et pousse son engin) n'est en rien une surprise : elle va de pair avec le développement du réseau cyclable sur deux axes parallèles, la rue Marceau à l'ouest et la rue Buffon à l'est.
"Il est nécessaire de changer les règles de fonctionnement dans nos artères principales et secondaires, estime le maire de Tours, Emmanuel Denis. Il y a de plus en plus de cyclistes, mais aussi de piétons, et des piétons à la mobilité difficile, du fait du vieillissement de la population. À chacun de nos aménagements, il faut essayer aussi d'améliorer la "marchabilité" de notre ville."
"Il n'y avait jusqu'à présent quasiment pas d'alternative, la rue nationale était l'axe unique pour traverser la ville et tout le monde l'empruntait, justifie, quant à lui, Christophe Boulanger, conseiller municipal et premier vice-président du Syndicat des Mobilités de Touraine. La métropole a largement investi pour développer les axes structurants vélos et aujourd'hui l'alternative existe. Il faut donc que le piéton retrouve sa juste place et puisse cheminer en toute sérénité et en toute sécurité sur la rue Nationale."
Concrètement, la circulation des vélos et trottinettes restera possible sur la partie la plus au nord de la rue Nationale, au niveau Portes de Loire, sur l'ex-place Anatole-France. Mais pour traverser en direction du sud entre 10h et 20h (heures d'ouverture des magasins) il faudra ensuite rejoindre l'une des deux pistes cyclables situées de part et d'autre de la rue Nationale. Le passage restera toléré aux heures de fermeture des commerces ainsi que les dimanches (sauf en cas d'ouverture exceptionnelle, par exemple au mois de décembre).
Les policiers municipaux seront mobilisés pour faire appliquer cette nouvelle interdiction, mais ils se contenteront, dans un premier temps, de faire un peu de pédagogie. Après quelques semaines, les sanctions pourront tomber et tout contrevenant risquera d'écoper d'une amende de 135 € !
Nous sommes dans une volonté de rééquilibrage des espaces publics, une amélioration du cadre et de la qualité de vie, tout en faisant en sorte que la ville continue à fonctionner. Il faut redonner leur place aux piétons, aux mobilités douces et aux transports en commun. Les villes ont été aménagées au XXe siècle pour laisser une place démesurée à la voiture, aujourd'hui les habitants aspirent à retrouver l'espace public. On ne fait pas une ville pour les bagnoles, on fait une ville pour ses habitants !
Emmanuel Denis, maire de Tours
Et dans la même logique que pour la rue Nationale, la circulation des scooters et des deux-roues motorisés en général vient d'être interdite sur le Pont de Fil, la passerelle qui enjambe la Loire au niveau du château de Tours. Là aussi il a fallu résoudre un conflit entre usagers, de nombreuses plaintes de piétons étaient remontées en mairie.
"De façon un peu ambitieuse, je parlais de révolution des mobilités au début de mon mandat, reprend le maire de Tours. Mais nous y sommes : 30% de cyclistes en plus sur les trois dernières années, 10% d'usagers en plus sur les transports en commun, on bat tous les records ! Un changement d'usage très fort est en train d'avoir lieu, il doit s'accompagner d'un changement des comportements, un apprentissage de l'ensemble de ces nouveaux flux en centre-ville."
Prendre en compte le facteur humain
Le 8 octobre dernier, à Tours, un terrible accident avec un camion de livraison a coûté la vie à une cycliste, sur l'axe cyclable de la rue Marceau qui venait tout juste d'être inauguré.
"Il nous faut mieux traiter le facteur humain, le prendre davantage en compte, estime Christophe Boulanger. L'équipement est règlementaire, la signalisation est mise en place, mais ce n'est suffisant, il y a encore des accidents graves. Alors, nous devons faire de la pédagogie et encore de la pédagogie, avec la pause de panneaux et feux supplémentaires, avec aussi la présence de la police municipale. Il nous faut mieux intégrer ce facteur humain dans notre réflexion, pour que les pratiques évoluent."
Un nouvel apprentissage de la ville, une vigilance et de nouveaux réflexes à acquérir. La municipalité veut s'inspirer de l'exemple de Varsovie, "vision zéro", c'est-à-dire parvenir à ce que plus aucun accident grave ne survienne. Les rond-points à la hollandaise, qui sécurisent les traversées de piétons et de cyclistes, se multiplient à Tours. Et en début d'année prochaine sera lancée, avec toutes les parties prenantes, une concertation visant à redéfinir le "code de la rue", redéfinir les règles pour parvenir à une bonne cohabitation entre tous les usagers de l'espace public.