Procès tentative de féminicide : six minutes quarante-cinq de lutte et 12 ans de réclusion criminelle

Dernier jour de procès à la cour d'Assises d'Indre-et-Loire pour Christophe Hersant. L'homme de 54 ans est condamné pour avoir tenté de tuer son ex-compagne en l'étranglant. Il est écope de 12 années de prison et 5 ans de suivi sociojudiciaire.

"J’ai failli lui enlever la vie, j’aurais pu faire de son fils un orphelin", les derniers mots de Christophe Hersant sont dirigés vers son ex-femme. Celle qui a "vu la mort", le 26 août 2021, lorsqu'il se présente sur son lieu de travail, à Joué les Tours, ceinture à la main. À 18 heures, la cour d'Assises d'Indre-et-Loire le condamne officiellement à 12 ans de réclusion criminelle, et un suivi socio-judiciaire pendant cinq ans.

Volonté de tuer reconnue

À la suite de la peine de prison, le quinquagénaire devra s'astreindre à des soins psychiatriques et aura l'interdiction d'entrer en contact avec la victime et son fils. Avant que les jurés ne se retirent pour délibérer, la défense avait fermement demandé à la cour de ne pas retenir l'intention de tuer de son client.

La décision est claire : oui, Christophe avait une volonté mortifère en se présentant sur le lieu de travail de son épouse. Il est aussi reconnu coupable de "violences volontaires sur conjoint en présence d'un mineur", pour une gifle donnée en 2019, et de "violences psychologiques sur conjoint". Le verdict, lu par la présidente de la cour n'arrache pas une larme au désormais condamné. Tourné vers les magistrats, son regard tombant reste dans le vide.

Pendant trois jours, magistrats et jurés se sont penchés sur six minutes et quarante-cinq secondes de lutte contre la mort. "Une scène silencieuse, seulement le bruit des coups, des râles, des souffrances de la victime" Pierre Gérard, procureur général vient de requérir 12 années de prison à l'encontre de Christophe Hersant, "si elle est vivante, c’est pas grâce à lui, mais grâce à elle-même". 

Un homme "à deux visages" 

L'homme de 54 ans est accusé d'avoir voulu tuer sa femme, trois mois après qu'elle a quitté le domicile conjugal. "Je vous demande de juger cet homme à deux visages" Me Gruninger. L'étrangleur, celui qui contrôle d'une part, celui qui " rentre chez lui, fait sa lessive et promène son chien avant d’être interpellé", détaille le ministère public, de l'autre. 

Le mariage blanc d'un côté de la barre, et la volonté de dominer une femme de l'Est de l'autre "sont deux caricatures" affirme l'avocat général. "Ils y ont cru à un moment". Le mariage rapide des deux époux est décrit comme la suite presque logique pour deux personnes qui ne vivent pas sur le même continent, "c'est un risque que l'on prend". 

"Viens, bats-toi, signe et persiste"

"Résiste, prouve que tu existes", les paroles de la chanson de France Galle citées d'une voix aussi douce que déterminée par Me Aude Gruninger-Gouzé, avocate de la partie civile. Six minutes et quarante-cinq secondes détaillées une nouvelle fois, en ce troisième jour d'audience. Ce 26 août 2021, "Comme un guépard sur votre proie, vous êtes entré à toute vitesse".

Après s'être assuré que son ex-compagne était seule, Christophe H. fonce sur elle, sur son lieu de travail à Joué-lès-Tours, ceinture à la main. S'ensuivent de longues minutes de lutte pour survivre d'un côté, pour tuer de l'autre, dans une salle de réunion. "Elle perd une chaussure, sa boucle d’oreille" poursuit l'avocate.

Quand il passe le câble, j’ai compris que j’allais mourir.

Victime de la tentative de féminicide

La ceinture tombe, les mains de l'agresseur prennent la suite. Puis un câble de ventilateur arraché. "Après l’avoir l’étouffée psychiquement pendant des années", ce passage à l'acte vient alors rendre concrète un contrôle permanent exercé au fil de l'union. Au cours d'une plaidoirie qui alterne entre un ton posé, et agacements, Me Aude Gruninger-Gouzé s'adresse directement à l'accusé "foutez-lui la paix !"

Vous n'êtes pas un mari, vous n'êtes qu'un contrat, vous n'êtes pas un père, vous n'êtes qu'un géniteur.

Me Aude Gruninger-Gouzé, avocate de la partie civile

Les cheveux bruns méchés de la presque quinquagénaire lui tombent sur le visage pendant que son avocate détaille les stigmates de cette fin d'été 2021. La tête baissée, elle saisit parfois un mouchoir pour sécher ses larmes.

Face à elle, son ex-mari reste la main posée devant sa bouche. Quelques tics de stress, l'homme de 54 ans se ronge les ongles, tente parfois de se redresser.

C'est parce qu'il a des testicules qu'il est le chef de famille. C'est parfaitement ancré dans la personnalité de monsieur. Si bien qu'il décrit la victime comme un homme dans un corps de femme.

Pierre Gérard, Avocat général

Le parcours chaotique de Christophe H

Une intention de donner la mort qui ne fait aucun doute pour le ministère public, que Christophe H. nie fermement. "On ne peut pas faire disparaître les faits" maintient l'avocat général "mais par une reconnaissance réelle des actes et de ce que vous avez voulu faire, vous auriez pu faire beaucoup de bien à cette femme. Cette vérité, vous la deviez également à vos proches".

Une accumulation de mensonges sur "absolument tout", y compris au sujet de ses cinq licenciements pour des vols dans des entreprises, en dix ans. Une attitude qui finit de rompre la crédibilité des déclarations du quinquagénaire. Face à l'horreur et aux six minutes quarante-cinq décrites par la victime, Christophe H. reconnaît tout au plus trente secondes d'étranglement et quelques coups.

Le droit au mensonge de l'accusé 

Caché derrière une colère, un caractère qui expliquerait la violence, Christophe H. est décrit comme incapable de résister à la frustration. 

Il a le droit de mentir sur les faits, il a le droit de ne pas avouer, de dire n'importe quoi comme il l'a fait hier. Vous vous êtes enfermé dans des mensonges inacceptables. 

Pierre Gérard, Avocat général

"Mettons la fin, vous êtes la fin. Merci de faire en sorte qu'elle puisse vivre libre" implore Aude Gruninger-Gouzé. Dans une plaidoirie d'une heure et quarante-cinq minutes, Me Cécile Bertault, des dizaines de feuilles étalées devant elle, dépeint le visage d'une victime vénale. Son client, lui, ne serait que le " pigeon" de cette affaire. Les yeux clairs de Christophe Hersant ne laissent paraitre aucune émotion au fil des paroles de son conseil. 

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