Samchaka, coach e-sport : "Gagner, c'est cool, mais c'est pas ça qui me fait vibrer"

Romain Melaye, 39 ans, est le coach de l'équipe Solary, partie aujourd'hui sur les routes de France pour rencontrer les fans. Un métier particulier, et même encore rare.

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Quand on s'entraîne chez Solary, deux yeux et une barbe vous contemplent. Ils appartiennent tous à la même personne : Romain Melaye, alias Samchaka, 39 ans, coach en chef.

"Je coache depuis 24 ans, dans plusieurs domaines : le sport, les échecs, le poker... J'ai fait de l'encadrement éducatif, aussi. Je suis arrivé assez tard dans le jeu vidéo pur. Ça doit faire 2 ans et demi."

En à peine un an, il est passé par les sélections espagnoles, turques et françaises, parfois en même temps. Et nous voici, 3 décembre 2018, "Sam" est l'entraîneur en chef de l'équipe Solary, en CDI depuis peu. "C'est un OVNI, ce qui se passe ici. Je suis chanceux, c'est incroyable. Sur la scène League of Legends, je ne sais pas si on est 5 coach vraiment payés. A part dans la sphère au-dessus..."
 


Humainement


S'il touche aujourd'hui 1800 euros net, chaque mois, il a commencé à 200, et ne conseille à personne de se lancer avec l'idée d'en vivre. Lui y est arrivé "par passion", à une période propice de sa vie.

"Ce que je préfère dans mon métier, c'est le côté éducation. J'adore l'éducation. Gagner, c'est cool, mais c'est pas ça qui me fait vibrer. Moi, je suis hyper bien ici. J'ai des propositions ailleurs, financièrement débiles, même des opportunités de monter vers du plus haut niveau. Et ça ne m'intéresse pas du tout. Humainement ce sont des usines à gaz."

A presque 40 ans, il n'est plus celui à qui on en fait baver. La preuve par l'anecdote : "En général, les coach ont 25 ans. Il y a une équipe, dont je tairais le nom, qui sont venus me chercher à la mi-saison cette année parce que les joueurs faisaient pleurer le coach. On en est à ce stade encore dans de grosses écuries, même si ça s'améliore."
 

Samchaka sensei


La méthode Samchaka, c'est d'abord beaucoup d'observation, beaucoup d'analyse, et une connaissance fine des problématiques humaines de cette profession de joueur, encore à ses débuts.

"On se retrouve avec des jeunes qui ont l'habitude d'une pratique compétitive, mais de chez eux, seuls. Il y a, du coup, un rapport à l'égo qui est complètement différent : ils ont du mal à s'imaginer qu'il puisse y avoir des remplaçants, comme dans une équipe classique. Eux ils sont là, "c'est ma place, terminé" ! Ils ont un rapport à l'équipier différent aussi, ils ont beaucoup de mal à faire confiance naturellement."

Se laisser de la place, se respecter, il leur a appris en même temps que le jeu : 5heures par jour, six jours par semaine. Stratégies de l'adversaire, méthodes coréennes, débriefs personnalisés... Romain Melaye est partout, du moment que ça concerne le jeu. Pour le reste (alimentation, entraînement sportif), ce n'est pas de son ressort.

"J'ai pas envie de faire l'apprenti sorcier. Même si je les vois manger de la merde et s'étonner qu'ils sont fatigués en compétition (sourire). Et puis, ils ont leur chez eux, ils viennent au boulot à des horaires particuliers. Dans les autres équipes professionnelles, on est à 98% dans des Gaming House. Si on le veut, on a le contrôle de ce qu'ils mangent, à quelle heure ils dorment, de tout. Mais je ne trouve pas forcément ça sain..."
  

Les affres des étoiles


Alors que le jeu vidéo pèse 4.3 milliards d'euros simplement sur le marché français, et que 91% des 18-24 y jouent , le coach Sam doit aussi gérer la starification de ses joueurs. Surtout depuis la création de l'équipe Fortnite, jeu ultrapopulaire du moment, en février.

"Mine de rien, on découvre ce que c'est que d'aller dans un événement avec des joueurs qui rameutent les gens. Mais quand je dis rameuter, c'est complètement incroyable. Les trois derniers événements avec Kinstaar, je me suis à gérer un groupe de 200 personnes ; je n'avais jamais eu de portable, j'ai fait des photos avec tous les portables du monde !"
 
Pour lui, le monde du jeu vidéo pêche par l'absence de structures éducatives, dans un milieu qui fait la part belle au "mode solo". Difficile constat, pour l'entraîneur à taille humaine qui semble compatir comme d'autres respirent.

"Certains gamins ne se construisent pas correctement autour de la compétition. J'ai ramassé des anciennes stars à la cuillère, qui ont été complètement détruits : par le système des réseaux sociaux, mais aussi parce qu'ils sont arrivés abîmés, à se confronter à leurs frustrations sans jamais être encadrés."

Mais aujourd'hui, la journée est belle. Le Tour Bus deux étages roule vers Bordeaux, les fans et les joueurs sont ravis. Alors on lui a demandé de nous parler d'un beau souvenir.

"Il y a eu la Lyon Esport, qui a été un drame pour nous. Ça s'est pas bien passé du tout pour l'équipe League Of Legends, et ça a provoqué quelque chose chez Solary. Narkuss allait relever les gamins en pleurs, Jbzz pareil. Il s'est passé un truc, il y a eu une flamme, c'était fort humainement, quoi." Humainement, on a dit.

 
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