25 présidents d'universités se sont déplacés à Paris, le jeudi 21 novembre, pour alerter leur ministre sur les projections budgétaires pour 2025. Tous craignent un effet ciseau délétère entre la hausse des dépenses et la stagnation, voire le recul, des aides publiques. Deux semaines plus tard, l'inquiétude est grande pour les facultés d'Orléans et Tours.
Le jeudi 21 novembre ils ont bravé la neige et des conditions de transports très difficiles pour se rendre devant les grilles du ministère de l’Enseignement supérieur.
Une action inédite, initiée par France Universités (association des dirigeants exécutifs des universités et établissements publics d’Enseignement supérieur et de Recherche) et rassemblant un tiers des présidents des universités françaises.
Des personnalités peu habituées à descendre dans la rue pour se faire entendre, mais qui jugent la période cruciale pour l'existence de leurs établissements respectifs.
Une délégation a réussi à rencontrer le ministre de l’Enseignement supérieur Patrick Hetzel.
Le dialogue a été franc, les positions ont peu évolué et les inquiétudes sont toutes aussi sévères une semaine plus tard. Au point que les présidents d'université entament une campagne de communication vers le grand public.
Certains ont choisi la presse régionale, comme la présidente de l'Université Paul Valery de Montpellier, Anne Fraïsse.
Elle n'hésite pas à parler de catastrophe budgétaire annoncée, selon elle "les droits d'insciption vont devoir être multipliés par 10 pour compenser le désengagement de l'Etat".
Car c'est bien l'Etat qui est pointé du doigt par les présidents d'universités.
L'explication de cette fronde est donnée dans un communiqué de l'Université de Tours :
Les mesures salariales (non compensées ou seulement partiellement) ont représenté une charge supplémentaire de plus de 10 M€ depuis 2022. Le Ministre s’est engagé, devant les Présidentes et Présidents, à renoncer à prélever 1 % supplémentaire sur les budgets des établissements pour créer un fonds de solidarité.
Université de Tours
"Mais si le Gouvernement confirmait son intention d’augmenter, sans compensation, le Compte d’Affectation Spéciale pension (CAS) – destiné au recouvrement et à la gestion financière du régime des retraites de l’État –, c’est un nouveau surcoût estimé à presque 2,7 M€ qu’il prélèverait sur le budget 2025 de l’Université de Tours." Explique l'Université de Tours.
Le CAS, Compte d'Affectation Spéciale pension, est la goutte d'eau qui fait déborder le Supérieur
Il s'agit tout bonnement d'une décision unilatérale de l'Etat, contraignant les universités à abonder ce fonds pour les retraites des fonctionnaires de l'Enseignement Supérieur, mais sans en gommer l'impact par une subvention dédiée.
Le ministère demande un effort temporaire des universités, en résumé il faut aller chercher cet argent dans les "bas de laine" des établissements.
À Tours, le "bas de laine", la trésorerie, ne permet déjà plus grand-chose. L'Université affirme qu'elle ne dispose que "d'un solde disponible (libre d’emploi) de seulement 5,9 M€" et que cette situation critique l'oblige à "reporter le vote de son budget initial 2025 à janvier prochain".
À Orléans, l'autre grand campus en Centre-Val de Loire, le budget 2025 sera bien présenté au Conseil d'Administration de l'Université le 13 décembre prochain.
À l'université d'Orléans, certaines formations pourraient disparaître
Eric Blond, le président de cette université, est tout aussi agacé par le désengagement financier de l'État. "L'État prend des décisions de revalorisations salariales, de nouvelles charges en matière de retraite et nous demande de trouver l'argent pour financer tout ça, c'est incroyable, non ? En 2024 on a des dépenses de 200 millions d'euros et une subvention de l'Etat de 160 millions."
Avec ces nouvelles décisions, c'est 5,4 millions d'euros supplémentaires à trouver pour notre université. Grâce à notre plan de retour à l'équilibre (après une crise financière grave entre 2016 et 2019) on a retrouvé une bonne santé budgétaire. On devrait donc arriver à passer l'année 2025, mais on ne passera pas 2026 dans ces conditions.
Eric Blond , Président de l'Université d'Orléans
À Orléans, les gros dossiers du moment, la montée en puissance de la Faculté de Médecine et son installation sur le nouveau site d'Orléans-Madeleine, seront menés à terme.
En revanche, certaines formations pourraient disparaître si les recettes budgétaires continuent à stagner ou reculer.
À Tours, on évoque même l'arrêt de quelques cursus dès la rentrée 2025.