Alors que nous célébrons les 40 ans de la mort d’Hergé, l’exposition permanente "Tintin, les Secrets de Moulinsart", au château de Cheverny, accueille chaque année de plus en plus de visiteurs.
"Mille millions de mille sabords, on dirait mon château ! Quel bougre d'ectoplasme à roulettes de tonnerre de Brest a bien pu avoir l’idée de le recopier ?", pourrait peut-être bougonner le Capitaine Haddock s’il passait devant Cheverny…
Un château bien inspiré
L’édifice a bel et bien un air de Moulinsart, ou, plutôt, Moulinsart a un air de Cheverny. Non, les Dupondt n’ont pas avalé une potion délirante, la ressemblance saute aux yeux. Normal, puisque, durant l'entre-deux-guerres, Hergé, qui cherchait un modèle pour le futur château du capitaine, aurait découvert celui de Cheverny sur un dépliant.
Le dessinateur a alors supprimé les ailes, gardé la symétrie parfaite, rajouté une crypte et d’autres détails : Moulinsart était né. Ensuite, le père de Tintin lui a donné le nom inversé d'un village du Brabant wallon, Sart-Moulin, au sud de Bruxelles.
Selon la légende, Hergé aurait choisi Cheverny en raison de son architecture classique, dont la sobriété correspondait mieux à son célèbre trait de crayon, la "ligne claire". L’actuel maitre des lieux, Charles-Antoine Hurault de Vibraye, est fier de nous l’expliquer : "L’escalier est emblématique. La salle d’armes, c’est celle 'de marine' du capitaine Haddock. La première BD dans laquelle apparaît Moulinsart, c’est Le trésor de Rackham le Rouge."
De l'extérieur, oui, mais les intérieurs de la demeure d’Haddock figurent pour la toute première fois dans le onzième album, Le Secret de La Licorne, paru en 1942, mais on n’y voit pas encore la façade : Tintin y est prisonnier, dans les souterrains. Dans la suite de de l’aventure, il part téléphoner au capitaine, monte l’escalier d’honneur et, dans une des cases de la BD, on reconnaît très facilement la grande cheminée de Cheverny.
On ne découvre l’extérieur du bâtiment que dans l’album suivant : un château d’une grande élégance, sensé avoir appartenu à François de Hadoque, un ancêtre du capitaine, corsaire sous Louis XIV.
Au château, une exposition retrace depuis 2001 les aventures du célèbre reporter belge. Que le grand Cric me croque, où est Nestor ? Pas de majordome dans cette exposition immersive, où l’on retrouve le fameux sous-marin-requin, les vêtements du héros, et de nombreuses surprises pour le plaisir des grands et des petits.
Les plus férus de Tintin éviteront de trébucher sur la marche ébréchée, rendue célèbre grâce au pied de Bianca Castafiore, la tornade sonore ! C’est d'ailleurs dans Les bijoux de la Castafiore que l’on voit le plus de détails sur la demeure du capitaine, en particulier les intérieurs de Cheverny.
Au fil des albums, Hergé décrira six pièces du château, tandis que le laboratoire explosif du professeur Tournesol changera plusieurs fois d’endroit, pour aboutir dans le pavillon d'entrée.
Au hasard de l'exposition, les tintinophiles avertis pourront justement admirer la réplique de l’étonnant "Supercolor tryphonar", une TV couleur imaginée par cet hurluberlu de Tryphon... Chaque année, ce sont 450 000 visiteurs qui apprécient la scénographie de "Tintin, les Secrets de Moulinsart" : amis du Petit Vingtième, soyez les bienvenus à Cheversart, ou Moulverny !