Les universités d'été du Parti socialiste se sont ouvertes ce vendredi 25 août à Blois, en Loir-et-Cher, dans une atmosphère optimiste, mais en l'absence des principaux opposants à la ligne d'Olivier Faure. La ligne du campus : "Retrouver le peuple", alors que les classes populaires sont de plus en plus tentées par le Rassemblement national.
"L'avenir socialiste sera populaire ou ne sera pas." C'est par cette phrase que le député Philippe Brun a résumé l'objectif des universités d'été du Parti socialiste, ce vendredi 25 août : retrouver les classes populaires, et les ramener dans le giron de la rose.
Le campus du PS s'est ouvert dans l'après-midi, dans la Halle aux grains de Blois. Après une hégémonie de La Rochelle, la capitale du Loir-et-Cher semble bien être devenue le point de rassemblement officiel des socialistes, accueillant l'évènement pour la quatrième fois.
Qui est "in", qui est "out"
Un campus cuvée 2023 en plein contexte de luttes internes. L'alliance de la gauche aux législatives sous la bannière de La France insoumise a profondément divisé le PS, et le parti s'en remet à peine, s'il s'en remet tout court. Bernard Cazeneuve, qui a quitté le parti, n'est évidemment pas venu. François Hollande, vif critique de l'alliance avec le mouvement de Jean-Luc Mélenchon, ne s'est présenté à Blois que jeudi, lors du séminaire réservé aux élus socialistes.
Olivier Faure, lui, était bien là. Conforté de justesse au dernier congrès en tant que premier secrétaire du parti, il est l'artisan de l'accord à gauche, côté socialiste. Son adversaire lors de sa réélection, le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol, n'est pas là. Il "n'a pas pu venir pour raisons familiales", explique à l'auditoire le maire de Blois, Marc Gricourt. Recevant une salve de "Oooooooh" sarcastiques de la part du public. Ambiance. Carole Delga et Anne Hidalgo, premières opposantes au premier secrétaire, ne sont pas là non plus.
"Nous n'avons plus les moyens de diriger le débat à gauche"
Au micro, la volonté d'avancer prime. Les divisions ne sont pas évoquées, du moins pas dès l'ouverture du campus. L'idée ici, est de savoir à nouveau comment "unir les classes populaires, face à une droite et une extrême droite qui cherchent à les mettre en concurrence", lance Sara Kerrich-Bernard, élue au conseil régional des Hauts-de-France. Le tout pour accomplir l'impossible : "Rendre la parole socialiste audible. Que la gauche puisse incarner une alternative crédible, espère Marc Gricourt. Et je crains que nous n'en soyons encore un peu loin."
Au milieu de tout cet optimisme, il semble vouloir jeter un pavé dans la mare, en portant un regard pragmatique sur la situation du parti. "Nous n'avons plus les moyens de diriger le débat à gauche, mais assurons-nous d'en garder la tenue." La députée insoumise Raquel Garrido, présente au premier rang, applaudit mollement cette fin de phrase, qu'elle sait viser son parti. Même si le maire de Blois revendique son soutien plein et entier à l'accord de la Nupes.
À la recherche de l'électorat perdu
Alors, le PS, mort et enterré ? "On peut redevenir la principale force à gauche demain", confie Marc Gricourt à France 3, alors qu'il s'exfiltrait du campus pour aller célébrer un mariage. Comment faire, alors ? "Il faut retrouver un langage simple avec les Français, leur parler de justice sociale, de justice fiscale, d'enjeu environnemental", explique-t-il, finalement plus en phase avec la ligne du campus qu'il n'avait pu y paraître.
Objectif, donc, pour le PS : retrouver son électorat - qui a boudé les candidatures de Benoît Hamon en 2017 et d'Anne Hidalgo en 2022 - au sein des classes populaires. Celles qui "ne sont parties nulle part, et alimentent l'abstention". Et celles qui "se sont tournées vers l'extrême droite, qui peut leur sembler avoir un discours social attractif mais est dangereuse au pouvoir", ajoute le maire de Blois. Parler à ceux qui ont été "déçus par la mandature de François Hollande" et par ses "renoncements face aux problématiques de nos concitoyens", assène Marc Gricourt. Malgré "des avancées".
Car le quinquennat Hollande reste une source de division au sein du PS. Le renier, ne serait-ce que partiellement, ou le revendiquer ? Bernard Cazeneuve, lui, le revendique. Il "porte un message qui, aujourd’hui, est attendu par celles et ceux qui ont composé l'électorat majoritaire" du PS, comme l'explique François Bonneau, président socialiste du conseil régional du Centre-Val de Loire, joint par téléphone.
La gauche est un long fleuve tranquille
Lui-même n'a pas pu venir en ouverture du campus, mais était présent ces derniers jours pour le séminaire des élus. Il espère "pouvoir assister au discours d'Olivier Faure samedi", malgré ses désaccords avec sa stratégie et son allégeance à Jean-Luc Mélenchon. Comme Marc Gricourt, il partage le sentiment que "la gauche a un long chemin à parcourir pour être perçue comme portant un projet répondant aux questions du quotidien de nos concitoyens". Il cite "les questions de santé, de sécurité, du vieillissement, la crise environnementale".
Revendiquant sa casquette d'élu de terrain, au contact des "problématiques du quotidien", il estime que la gauche et le PS "font trop d'idéologie, de grandes représentations du monde", et "manquent de clarté". Notamment sur "les valeurs républicaines, comme la laïcité, qui est fondamentale", estime-t-il.
Alors, pour les élections européennes, alors que LFI fustige le refus de ses camarades de la Nupes de faire liste commune, François Bonneau assume : "Ce serait très intéressant de faire une liste unique, mais dans la clarté. Et ça ne peut pas être dans la ligne de La France insoumise." Il évoque notamment la nécessité d'"affirmer la nécessité de l'Europe".
Là-dessus, Marc Gricourt abonde. "Les écologistes et les communistes ont refusé, il est difficilement envisageable de faire une liste PS-LFI, il y a trop de divergences sur l'Europe". Et là est bien tout ce qui crée le malaise au parti socialiste. La Nupes tient sur l'alliance de la gauche, sur les aspérités existantes chez chaque parti et qui, au total, font sortir une moyenne composite. Sauf que la position hégémonique de La France insoumise au sein de l'alliance met à mal le PS, parti le moins à gauche de la Nupes.
"Nous partageons un diagnostic de la société, et la majorité des objectifs", soutient Marc Gricourt. Mais pas forcément les solutions, ni la forme pour les mettre en avant. Ce campus a donc, officiellement, pour but de faire de la gauche la première alternative à Macron et empêcher la montée inexorable de l'extrême droite. Officieusement, les socialistes ont trois jours pour remonter eux-mêmes au sein de la gauche, et reprendre quelques voies à Jean-Luc Mélenchon.