Matthieu Marquaille et son conjoint ont craqué sur un hôtel particulier du XVIe siècle situé à Blois dans le Loir-et-Cher. Le couple de Parisiens s'est lancé dans une rénovation de très grande ampleur, facilitée par l'accompagnement des architectes des bâtiments de France.

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Le centre-ville de Blois regorge de maisons remontant à la fin du Moyen Âge. Un beau patrimoine que les architectes des bâtiments de France ont à cœur de préserver… Mais qu’il faut aussi rénover, notamment thermiquement. Pour les propriétaires de ces propriétés anciennes, les contraintes peuvent être nombreuses. Car tous les bâtiments datant d’avant 1945 répondent à des règles bien précises. 

"Wouah le chantier a bien avancé ! ". Après avoir poussé la lourde porte d’entrée, Adrienne Barthelemy, cheffe de l’Unité Architecte et Patrimoine du Loir-et-Cher et Architecte des bâtiments de France découvre l’avancée des travaux de l’Hôtel Savare.

Cet hôtel particulier du XVIe siècle, niché dans les ruelles de Blois, a été racheté par Matthieu Marquaille et son conjoint il y a quatre ans. Un projet colossal et des rénovations de fond en comble, mais dans le respect du bâti ancien et de son histoire.

Pour ce bâtiment situé en secteur sauvegardé, tous les travaux se font sous la vigilance des architectes des bâtiments de France. "Je vais vous montrer les enduits", commence Matthieu Marquaille, propriétaire des lieux. "Comme vous le voyez, on a piqué les murs. La difficulté dans cette maison, comme dans beaucoup de sites anciens, c’est que tout était cimenté. Le ciment empêchait la respiration naturelle du mur et provoque des dégradations, des parquets qui moisissent, etc.".

"Piquer le mur" : comprendre ici enlever la croûte de ciment au marteau-piqueur, a permis de dévoiler les matériaux naturels d'origine (chaux, sable). Une première phase des travaux validée par Adrienne Barthélémy, l’architecte des bâtiments de France qui accompagne le couple dans ce projet. " C’est parfait, on va avoir un système hydrométrique du bâtiment qui va bien fonctionner, on va avoir quelque chose de plus sain et conforme aux dispositions d’origine, avec des matériaux naturels".

Du double vitrage oui, mais avec des fenêtres en bois

Des matériaux d'origine et naturels, c'est aussi le choix qui sera fait pour les menuiseries. Car contrairement aux idées reçues, pas besoin de mettre du PVC pour être bien isolé, et ce ne serait pas autorisé dans le cadre d'une rénovation historique. Les fenêtres seront donc bien en double vitrage, mais en respectant quelques règles.

"On demande à ce que le matériau d'origine soit conservé. Le bois a de grandes performances thermiques, parce qu'il ne conduit ni le chaud ni le froid. C'est un matériau naturel biosourcé, assez peu coûteux à fabriquer et qui peut durer très longtemps. Il a donc toute sa raison d'être d'un point de vue énergétique et thermique", précise l'architecte des bâtiments de France. Mais Adrienne Barthélémy insiste : "C'est important de changer la menuiserie, mais il ne faut pas faire que ça. C'est même sans doute l'un des postes qu'il faut faire en dernier quand on regarde les déperditions énergétiques".

Bâtiments anciens riment-ils avec mauvais bilan thermique ?

En effet, la première source de déperdition énergétique vient des combles, à 30%, alors que les menuiseries ne représentent que 2% de la déperdition d'énergie d'une maison. Des combles que le propriétaire va donc isoler, par la toiture, et aménager pour pouvoir y créer des chambres d'hôtes.

Les murs seront également isolés, mais par l'intérieur pour préserver la façade. Et là aussi, une attention toute particulière est portée aux matériaux choisis. “On veut utiliser du liège sur 2 cm, un matériau naturel relativement fin pour ne pas perdre trop de place à l'intérieur. Sur d'autres pièces avec davantage de place, ou sur les façades sud, avec des plus gros risques de chaleurs, on va utiliser du biofip trio, un panneau isolant en lin, chanvre et coton recyclés qui viennent créer des couches de 10 à 15cm sur les murs”.

Ce même panneau isolant, plus naturel que la laine de verre, sera aussi utilisé pour l'isolation des combles et présente l'avantage d'être plus performant que la laine de verre pour apporter du confort en hiver, mais aussi en été, en cas de fortes chaleurs. Son prix est trois fois plus élevé que la laine de verre.

Passionnés de restauration, Matthieu et son conjoint avaient déjà rénové une maison du XIXe siècle en Ile-de-France. C'est en 2020 qu'ils font l'acquisition de cette maison qui n'avait pas été habitée depuis 25 ans. "Il y a 550m² habitable plus des dépendances, des caves, etc.”. Mais pour cet hôtel particulier de Blois, les travaux sont d'une tout autre envergure.

Rénover l'ensemble de la propriété nécessitera dix ans de travaux.

Matthieu Marquaille, propriétaire des lieux

Pas de quoi faire peur au couple d'acquéreurs qui veulent habiter une partie de l'hôtel particulier d'ici un an, mais aussi y développer un projet touristique avec l'ouverture de deux chambres d'hôtes d'ici l'été 2025 ou encore accueillir des projets culturels dans la cour. "On a toujours eu la volonté d'acquérir un bien d'exception et de s'investir dans le patrimoine".

Pour réaliser ce projet l'accompagnement des architectes des bâtiments de France a été un réel atout. "On a eu des échanges réguliers, les collaborateurs et collaboratrices de l'architecte des bâtiments de France sont venus sur place plusieurs fois et on a pu discuter plusieurs fois des différents travaux qu'on voulait mener, des possibilités, de ce qui nous était autorisé de faire, ou pas. C'est un dialogue pour essayer de retrouver l'essence même de ce bâtiment qui a été beaucoup modifié dans le temps” souligne Matthieu Marquaille.

Un accompagnement indispensable, mais pas toujours simple à mettre en œuvre pour l'unité départementale Patrimoine et Architecture du Loir-et-Cher. “C'est une expertise qui n'est pas si répandue que ça malheureusement. On a un peu tendance aujourd'hui à plaquer les méthodes du bâti neuf sur le bâti ancien. Les architectes des bâtiments de France sont là pour accompagner au plus près les particuliers, mais malheureusement nos moyens humains ne permettent pas toujours qu'on puisse se déplacer sur les chantiers de rénovations patrimoniales de particuliers”, regrette l'architecte des bâtiments de France. 

DPE, Ma Prime Rénov'... efficaces pour les bâtiments anciens ?

Pour ce bijou patrimonial, impossible de procéder à un DPE, diagnostic de performance énergétique, mal adapté aux maisons en pierre et maisons anciennes. Et pour ce chantier d'exception à plus d’un million d’euros, les propriétaires n'ont pas fait appel non plus au dispositif Ma Prime Rénov’, qui répond mal aux besoins de rénovations énergétiques des bâtiments anciens.

Nous nous sommes rendus compte que les aides à la rénovation énergétique ne sont souvent pas compatibles aux aides pour la restauration du patrimoine.

Matthieu Marquaille

Les structures anciennes ne peuvent par exemple pas supporter les épaisseurs d'isolants qui sont demandés. Les matériaux qui doivent impérativement être utilisés pour toucher l'aide étaient plutôt des matériaux issus de la pétrochimie… On n'était pas très emballé par ce que le dispositif Ma Prime Rénov' nous proposait. Ça ne correspondait pas à notre vision de la restauration patrimoniale".

Le dispositif gagnerait pourtant à inclure l’ancien, car sa rénovation est plus écologique que la construction neuve. Un bâtiment neuf nécessite 70 fois plus de matériaux et émet 5 fois plus de gaz à effet de serre, mais génère aussi plus de déchets. “Le bâti ancien est perçu comme étant le lieu de beaucoup de déperdition énergétique, comme consommateur, alors que tous les matériaux ici ont déjà été largement rentabilisés d'un point de vue du bilan carbone. 

Un bâtiment neuf n'est pas pensé pour durer alors qu'une bâtisse ancienne peut être rénovée indéfiniment du moment qu'elle n'est pas maltraitée.

Adrienne Barthélémy, cheffe de l’Unité Architecte et Patrimoine du Loir-et-Cher et architecte des bâtiments de France

Il y a un vrai décalage entre la réalité et la perception du bâti ancien et donc il y a tout un travail de pédagogie qui est nécessaire pour montrer toutes ses vertus”. Et à Adrienne Barthélémy de conclure avec enthousiasme : “Avec ce chantier, je pense qu'on est au moins reparti pour 200 ans !    

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