Enseignants, auto-entrepreneurs et directeurs d’école ont reçu des courriels de propagande électorale vendredi 8 avril dans l’après-midi. Outre la méthode, c’est bien sûr la légalité de la démarche qui pose question. France 3 Centre-Val de Loire vous donne quelques clés.
Plusieurs directeurs et directrices d’école du Loir-et-Cher ont reçu un courriel issu des équipes du candidat Emmanuel Macron vendredi 8 avril dans l'après-midi. Un message de propagande électorale visant à mobiliser les fonctionnaires. "Inadmissible" pour les représentants du personnel du SNUipp-FSU41 qui ont réagit dans un communiqué.
Il est inadmissible qu'une telle chose puisse se produire, a fortiori à quelques heures du premier tour de l'élection présidentielle.
Aline Pasnonn et Virginie Grospart, représentantes du personnel du SNUipp-FSU41
Au même moment, un courriel visant les indépendants était envoyé aux artisans, commerçants, professions libérales, entrepreneurs et auto-entrepreneurs… Des mails personnalisés qui enjoignaient les destinataires à rejoindre des groupe de discussion ou à diffuser le mail de campagne. Est-ce légal ? Que dit la loi ?
Période de réserve respectée
Si la date d’envoi de ces courriels a pu faire tiquer certains, la période de réserve a été pourtant respectée. L’article L.49 du code électoral impose une période de réserve d’un jour avant la date du scrutin, soit à partir du Vendredi 8 avril minuit, pour ce premier tour, vendredi 22 avril minuit, pour le second tour. Les mails ou SMS reçu avant cette date ne sont pas considérés comme hors la loi.
Les candidats ont-ils le droit d'envoyer ces courriels ?
Ce qui interroge sur ces envois de courriels c’est surtout comment ces adresses mails ont été recueillies et utilisées ? Et là, c’est le règlement général sur la protection de données (RGDP) entrée en vigueur en mai 2018 qui s’applique. Pour les directeurs et directrices d’école aussi bien que les indépendants, la collecte des adresses mails et leur usage par l’équipe de campagne du candidat Macron est illégal, pointe du doigt l'ONG Internet Society France.
Si en dehors de l’information préalable, il n’y a pas consentement sur la finalité de l’usage de ces données, il y a illégalité.
Olivier Iteanu de l’ONG Internet Society France
Le citoyen doit être informé de l’usage de ses données et du cadre de l’usage de ses données. Sans le consentement des citoyens à utiliser leurs données pour un usage de propagande électorale, elles ne devraient pas être utilisées. Sauf que l’achat de base de données est possible et légal. C'est l’usage de cette base de donnée, en appliquant le RGPD, qui ne l’est pas forcément, car les personnes dont les données sont partagées n’ont pas consentit à l’usage qui en est fait. Un exemple, des français appartenant à la communauté juive ont été ciblés par Eric Zemmour à des fins de démarchage politique vendredi 8 avril. L’équipe du candidat d’extrême droite, affirme avoir ciblé ces électeurs par le biais d’un « data broker », un courtier en données personnelles. Une instruction de la CNIL est ouverte après avoir reçu des signalements.
Quelle est la règle dans le cadre d'une campagne électorale électronique ?
La commission nationale de l’informatique et liberté (CNIL) est précise dans le cadre de campagne électorale. Elle oblige les « (…) candidats et partis politiques (à) informer les personnes concernées au moins lors de l’envoi du premier message, si les personnes ne disposent pas déjà de ces informations. »
De plus, il faut qu’un lien de désabonnement soit lié au mail envoyé. Dans le cas contraire, il est possible d’écrire un courrier directement auprès du candidat ou du parti politique auteur du message. « Il est possible de effectuer une demande de droit, c’est-à-dire -demander comment le candidat a pu recueillir vos informations personnelles? Et dans un deuxième temps, demander l’effacement des données ,» explique Olivier Iteanu de l’ONG Internet Society France. Si le doute persiste, il est toujours possible de réaliser un signalement auprès de la CNIL, via un formulaire en ligne.