Les ex-salariés d'Arjowiggings appellent à une mobilisation le lundi 25 mai à 14h devant la préfecture du Mans. Quelques jours avant la date limite de dépôt des projets de reprise auprès du tribunal de commerce de Nanterre. Plusieurs dizaines d'ex-salariés de l'usine vivent dans le Loir-et-Cher.
Nadia Mattia est la présidente de l'association "Action citoyenne pour l'intérêt général". Avec son collectif, elle rassemble environ 200 personnes qui se battent pour monter un projet de reprise de l'usine de Bessé-sur-Braye. " Le projet est prêt. Il s'agit de relancer le site en recyclant du papier notamment pour fabriquer des catalogues pour la Grande distribution. Le marché existe. Il nous faut 100 000 euros pour financer l'étude de faisabilité".On ne leur demande pas d'être tristes mais de faire ce qu'il faut pour que l'usine marche
150 emplois à la clé
Ce projet de reprise de l'association, prévoit d'employer 150 ex-salariés d'Arjowiggings et de produire 150 000 tonnes de papier recyclé les deux premières années." Le papier recyclé, c'est une belle idée. Quand on voit qu'en France on doit l'importer de l'étranger c'est absurde", nous confie Dany Leproust, ancien salarié d'Arjowiggings.
Il a travaillé 30 ans comme assistant conducteur sur une coucheuse. Si le projet de reprise de Nadia Mattia est accepté, il devrait faire partie de l'aventure.
" Ce serait génial. C'est très difficile pour moi d'être au chômage à 53 ans, surtout psychologiquement. En plus ici il n'y a pas de travail. "
6 mois d'attente et toujours rien de la part de la Région
Si le projet semble concret pour les ex-salariés d'Arjowiggings, il est freiné par deux problèmes : la nécessité de trouver 100 000 euros pour financer l'étude de faisabilité et le silence des élus régionaux." La région Pays-de-la-Loire a notre dossier depuis le mois de février. Et depuis il ne se passe rien. Or en plein confinement, on apprend que nous n'avons que jusqu'au 29 mai pour le présenter au tribunal de commerce. On a l'impression d'être pris au piège".
Nadia Mattia est en colère. "Quand on voit que l'Etat accorde 35 millions d'euros à la papeterie de Condat (Dordogne) qui est espagnole et que nous on ne nous répond même pas pour 100 000 euros. C'est inadmissible".
Demande de report de la date butoir à septembre
L'association demande un report de la date butoir du dépot de dossier au tribunal de commerce au mois de septembre." Ce qu'on souhaite c'est que les politiques nous disent oui ou non et qu'ils arrêtent de nous cacher des choses. Le secret des affaires, ça commence à bien faire", essaie de plaisanter, amère, la retraitée, habitante de Lavenay, un petit village près de Bessé sur-Braye.
"Si je me suis investie dans cette cause c'est parce que beaucoup d'habitants de mon village travaillaient chez Arjo. Ici la papète fait partie de notre vie à tous".
Seuls 150 ex-salariés d'Arjowiggings ont retrouvé un emploi, le plus souvent en CDD
Depuis la création du premier moulin à papier en 1824, la papeterie a employé de nombreux habitants des communes alentours. Notamment dans le Loir-et-Cher à Bonneveau, Savigny-sur-Braye, Sougé ou encore Cellé.La liquidation judiciaire a été annoncée aux salariés fin mars 2019. Si 580 personnes ont été directement licenciées, ce sont près de 1200 emplois indirects qui ont été touchés à la fois dans la Sarthe et dans le Vendômois.
Depuis l'annonce de la liquidation judiciaire, "moins de 150 ex-Arjo ont retrouvé un emploi," témoigne Nadia Mattia. "Souvent en CDD", ajoute-t-elle. "Beaucoup sont partis à Condat-sur-Vézère d'ailleurs. "
Dany Leproust confirme : " On est dans une région où il est difficile de retrouver un emploi. Avec ce projet au moins, on pourra dire qu'on aura fait tout ce qu'on pouvait pour sauver l'usine."
Et de conclure : "C'est un beau gâchis. On était spécialisé dans le papier haut de gamme et les cartes à jouer (notamment les cartes Pokemon-NDLR). Notre entreprise était rentable. C'est juste le patron qui a vidé les caisses. "