Pendant de longues années, Guy Bourdin, ancien agriculteur-pépiniériste, a sillonné la France pour acheter des tracteurs en fin de vie, une passion. Le 16 septembre prochain, cette collection d'une vie va être mise aux enchères dans le Loir-et-Cher.
Il a livré ses plants de fraisiers dans le midi de la France pendant de longues années. Et, dans son sillon, il a commencé à collecter des tracteurs, de vieux modèles, parfois rares. Puis, il a emménagé dans le Loir-et-Cher à Couddes et il a poursuivi sa collection à nulle autre pareille.
Guy Bourdin s'en est allé en janvier 2023 à presque 91 ans. Nous l'avions rencontré avec sa femme Bernadette, l'année dernière. Une journée mémorable.
L’homme aux 300 tracteurs
Ce matin de juillet 2022, nous pénétrons dans l'immense propriété de Bernadette et Guy. Et là, on découvre un décor de cinéma. Des carcasses de voitures et de tracteurs qui finissent de rouiller. Certains aux pieds des vignes.
Un hangar de plus de 2000 m2. Le spectacle est à la hauteur ! Rangé selon les pays, on y voit des tracteurs à perte de vue. Une collection née fortuitement, au gré des rencontres et des pérégrinations.
"J’allais livrer des plants de vigne dans le midi de la France. Et je ne voulais pas revenir à vide. Il y a plus de 30 ans. Je trouvais des tracteurs au bord de la route. Dans des fermes. Dans des granges. Quand le prix me convenait, je négociais avec le propriétaire. Et puis... hop. Je l’emportais. A l’époque, ce n’était pas cher…".
Bon négociateur et rusé, il s’employait à acheter au meilleur prix dit-il.
Guy Bourdin n’a rien oublié de ses escapades. Au fil du temps, il a dû pousser les murs de son hangar pour loger à l’abri, ses tracteurs. "Oui. Ces tracteurs, ce sont mes jouets".
Malgré le poids de l’âge, 90 ans, Guy Bourdin a l’œil qui pétille. Il est intarissable sur les marques de ses tracteurs. D’un pas lent et hésitant, il se faufile au milieu de ces montres d’acier. Au hasard, il cite : "Sabatier. Güdner Tessin. Renault D22. Centaur. L’âne. Massey-Fergusson. Massey-Harris. Fordson." Comme par enchaînement malgré une mémoire d’ordinaire vacillante, le vieil homme retrouve tout son tonus et son influx nerveux.
Dans le hangar, il y a également des chenillards, des motoculteurs. Satin. Labor. Énergie. Mais également quelques camions routiers. Guy Bourdin qui a également été pendant une vingtaine d’années Maire de sa commune de 500 habitants, a un souhait.
Laisser en héritage à ses deux enfants qui ont repris la gestion de l’exploitation, sa fabuleuse collection de tracteurs. À défaut, il pourrait l’offrir au département. "Cette collection m’appartient autant qu’à lui…"
"Les tracteurs, c’est l’univers exclusif de mon époux"
Bernadette Bourdin est d’une franchise désarmante. Mariée depuis 67 ans, elle a assisté impuissante à la constitution de cette collection de tracteurs.
Il a dépensé sans compter l’argent de la famille pour s’offrir tous ses jouets. D’ailleurs, il ne laissait quasiment personne entrer dans son hangar. Il était capable d’y rester des heures et des heures pour bricoler ou réparer des moteurs. C’est son monde à lui. Et il ne fallait surtout pas le déranger…
Bernadette Bourdin
"Mon époux était abonné à de nombreuses revues agricoles. C’est ainsi qu’il arrivait à trouver chaque fois de nouveaux tracteurs. Le téléphone n’arrêtait pas de sonner. Il recevait chaque fois de nouvelles offres.. de nouvelles propositions." Alors, j’ose la question.
Cette collection est-elle pour vous un peu envahissante ?
La réponse fuse, aiguisée comme un scalpel. "C’est une collection plus qu’envahissante. Dans tous les sens de terme. Ça occupait beaucoup mon époux. Il ne vivait que pour cela. Il y avait un téléphone réservé quasiment pour ça..."
Nous comprenons à mots couverts que Bernadette Bourdin a dû faire contre mauvaise fortune, bon cœur. Il lui a fallu composer avec cette collection dévorante de son époux. Cette passion qu’il lui a fallu partager. Malgré tout.
Quant à imaginer que cette collection dont elle est malgré tout fière pourrait revenir au département... "Ça jamais. Cette collection est pour la famille. Définitivement. Je l’espère". Difficile d’être plus explicite.
Entre 500 et 600 lots vendus aux enchères
Depuis le décès de Guy au début de l'année, sa femme Bernadette a pris la décision de vendre la collection de son mari. Avec l'objectif que les bénéfices reviennent à leurs enfants.
La vente aura lieu le 16 septembre 2023 sur l'exploitation des Bourdin, située route de choussy à Couddes dans le Loir-et-Cher.