Maurice Genevoix doit entrer au Panthéon ce 11 novembre, "porte-étendard" d'une génération ravagée par la Première guerre mondiale. Mais l'homme, comme l'écrivain, reste mal connu de nos jours. Retracez sa vie grâce à notre carte interactive.
Dans la région du Val de Loire où Maurice Genevoix a passé une partie significative de sa vie, presque tout le monde a déjà lu ou entendu son nom. Mais l'écrivain, l'homme, en décalage d'un siècle avec notre présent, reste souvent un vague inconnu. Pourtant, des générations entières ont appris à lire dans une école primaire Maurice Genevoix. Ils ont peut-être étudié quelques passages de Ceux de 14 dans un collège ou un lycée nommé en hommage à l'écrivain. Puis se sont mariés dans une salle polyvalente au nom de l'auteur et, à leur tour, ont fait découvrir les lettres à leurs enfants dans une bibliothèque Maurice Genevoix.
Un inconnu au Panthéon
Son entrée au Panthéon le 11 novembre 2020, plus d'un siècle après la fin du conflit au cours duquel il a tant souffert, est une piqûre de rappel pour cette mémoire collective si fragile. A l'occasion du centenaire de l'Armistice, en 2018, le président de la République annonçait, depuis la Meuse, que la "nation combattante" entrerait au Panthéon avec Maurice Genevoix comme "porte-étendard". Une bien belle image d'Épinal, qu'une nouvelle biographie, co-écrite par Aurélie Luneau et Jacques Tassin, vient dépasser cet automne pour révéler un à la fois l'écrivain et l'être humain."C'est la guerre qui a fait de lui un écrivain" explique l'historienne. Blessé au Front en 1915, Genevoix emporte avec lui, pendant de long séjours à l'hôpital à Verdun, Dijon et Bourges, la mémoire de ses camarades disparus. "On vous a tué, et c'est le plus grand des crimes", écrit-il dans "Les Éparges", l'un des récits compilés dans Ceux de 14.
La base de cette nouvelle biographie est un véritable "trésor d'historien" constitué de photos, de dessins et de lettres auquel le petit-fils de l'écrivain, Julien Larère-Genevoix, a donné l'accès. Dans ces documents se révèle non seulement l'auteur blessé aux Éparges, mais aussi un homme soucieux de la nature et des autres. Confronté à la mort dès son plus jeune âge, après avoir été gravement malade dans son enfance et avoir vu sa mère mourir à douze ans, Genevoix trouve dans l'écriture un moyen de ramener à la vie un fragment de ce qui a été.
"On nous a abîmé nos rivières. Je crois que c’est foutu"
En racontant la Sologne sauvage ou la vie dans les petits villages du Loiret, Genevoix fait revivre celles et ceux qu'il a côtoyé en grandissant. "Sa vie est parsemée par des métiers : fils d'artisans, vignerons, bateliers", explique Aurélie Luneau. Au cours du 20e siècle, Genevoix est aussi témoin de l'industrialisation, y compris dans les campagnes, et de la disparition du mode de vie d'avant 1914. Sa passion pour la nature fait dire à Valéry Giscard d'Estaing, à l'annonce de sa mort, qu'il fut "le premier de nos écologistes".Sur le plateau de L'invité du dimanche, en 1970, Genevoix déplorait lui-même : "On nous a abîmé nos rivières. Je crois que c’est foutu. Les belles espèces indigènes qui ont fait la joie de ma jeunesse sont en voie de disparition." Fervent défenseur d'une nature déjà en sursis, il n'a de cesse de la faire revivre, elle aussi, à travers les yeux d'un braconnier dans Raboliot, mais aussi à travers les animaux eux-mêmes, comme son chat dont il raconte les périples dans Rroû ou le cerf pourchassé de la Dernière Harde. Comme le conclut Aurélie Luneau : "C'est un auteur qui a plusieurs vies, chacun y trouvera quelque chose."
Utilisez la carte interactive ci-dessous pour découvrir les différentes vies de Maurice Genevoix. Pour plus de confort, ouvrez la carte interactive en plein écran en cliquant ici. Vous pouvez passer d'une page à l'autre à l'aide des flèches et faire défiler le texte avec la barre située à droite.