La commission d'enquête du Sénat rend son rapport sur l'affaire Benalla : "Il faut savoir reconnaître ses fautes"

Mercredi 20 février, les sénateurs de la commission d'enquête ont rendu leurs conclusions sur l'affaire Benalla. Un document explosif qui crispe l'exécutif. 

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Mercredi 20 février, 8h. La commission des lois du Sénat, devenue commission d'enquête par la force des choses et de l'affaire Benalla, se réunit pour la dernière fois avant la présentation de son rapport

Depuis le 23 juillet, cette commission, emmenée entre autres par le sénateur du Loiret Jean-Pierre Sueur tente de répondre à une question, depuis essaimée par bien d'autres : de quels pouvoirs jouit exactement Alexandre Benalla, cet homme que l'on voit frapper des manifestants place de la Contrescarpe le 1er mai, adoubé d'un brassard police ? 

Le document est un coup dur pour l'exécutif. "Le rapport a mis en avant le fait que le comportement de Mr benalla, les protections qui lui étaient prêtées, l'autorité qui lui était prêtée, les prérogatives qui lui étaient prêtées... Tout cela à fait qu'à différents niveaux de l'appareil d'Etat, tout a dysfonctionné", en retient principalement son rapporteur, Jean-Pierre Sueur. 
 

Les dysfonctionnements de l'exécutif


Pour les sénateurs, ces manquements ont pu affecter non seulement la sécurité du chef de l'Etat, mais aussi les intérêts du pays. Ils pointent d'abord l'anormale faiblesse des sanctions prises à l'encontre du collaborateur de l'Elysée, après les violences de la contrescarpe. 
 
Plus inédit, et peut-être plus grave, Alexandre Benalla, Vincent Crase, mais aussi trois hauts responsables de l'Elysée sont fortement soupçonnés d'avoir menti à la commission d'enquête, des faits passibles de 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. Sont concernés : Alexis Kohler, secrétaire général de l'Elysée ; Patrick Strzoda, directeur de cabinet ; et le général Lionel Lavergne, chef du groupe de sécurité de la présidence. 

Ces soupçons font l'objet d'une lettre, adressée au président du Sénat, Gérard Larcher, afin qu'il saisisse la Justice. "Nous avons décidé face à ces retenus de la vérité, de demander au président du Sénat de saisir le parquet. Je ne pense pas qu'il désavoue la commission des lois, qui a décidé à l'unanimité moins 3 abstentions, de publier ce rapport", résume Jean-Pierre Sueur. 
 


13 propositions 


En plus des propositions visant une résolution de l'affaire en cours, les sénateurs ont également fait un nombre de suggestions "pour un meilleur fonctionnement, une meilleure organisation de la sécurité du chef de l'Etat."

Enjeu central, notamment : le Sénat estime que la protection de la présidence doit absolument rester réservée aux gendarmes et policiers, placés sous l'autorité du ministère de l'Intérieur. "Alexandre Benalla a participé à plusieurs groupes de travail, il semblerait - je dis bien : il semblerait - que l'objectif soit d'avoir une sécurité du président autonomisée par rapport au ministère de l'Intérieur" avance Jean-Pierre Sueur. 

Autres pistes : des conditions précises de recrutement pour les collaborateurs présidentiels, et surtout, une enquête administrative préalable. Jusqu'à présent, "a priori, il n'y avait pas d'obligation". "On se rend compte que monsieur Benalla a tout un passif derrière lui, qu'il est en lien avec minimum un oligarque russe sur des questions de marchés de sécurité privée. C'est un contact dont on peut se demander s'il est compatible avec une fonction de confiance auprès du chef de l'Etat..." justifie le sénateur du Loiret. 

Les sénateurs souhaitent également la fin des "collaborateurs officieux", qui travaillent au sein des services de l'Etat sans inscription au journal officiel. 

  

L'exécutif s'étrangle


Problème : la plupart de ces recommandations concernent le fonctionnement interne du palais de l'Elysée. Des préconisations qui, selon les membres du gouvernement et de la majorité, entrent en contradiction avec le principe de séparation des pouvoirs. 

Depuis, l'entourage du chef de l'Etat et les députés LREM se déchaînent contre le rapport. "Torpille politique fomentée par les sénateurs LR et socialistes" pour le délégué général de LREM, un "regard politique sur le fonctionnement de l'Elysée", selon le ministre en charge des relations avec le Parlement, notre ancien député Marc Fesneau. 


Et même, pour le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, un rapport rempli de "contrevérités". Face à ces attaques, les sénateurs ont réaffirme leur attachement à ce même principe de séparation des pouvoirs. 

Jean-Pierre Sueur, de son côté, appelle à la "mesure". "Il est certain que si le gouvernement et le parti LREM donnaient le sentiment de continuer à défendre monsieur Benalla, et les dysfonctionnements qui ont eu lieu, ça manquerait de toute crédibilité. Il y a un moment où il faut savoir reconnaître les fautes qui ont été commises. Ça me paraît plus sage."

Avec, tout de même, une petite pique à Benjamin Griveaux : "Monsieur Grivaux a dit qu'il y avait des contradictions nombreuses dans le rapport, et il a dit aussi qu'il ne l'avait pas lu. C'est quand même étrange..."
 
 
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