En prévision de la journée internationale des droits des femmes, l'association loirétaine Les Mills lance à partir du lundi 1er mars une grande campagne d'affichage artistique. L'objectif : mettre en valeur les femmes de la région et parler de la transmission entre grands-mères et petites-filles.
Dans chaque famille, des tonnes de petits secrets, astuces, recettes se communiquent de grands-mères à petites-filles depuis des générations. Cette transmission permet à chaque femme de se nourrir de connaissances, de se construire mais aussi d'appréhender une société qui reste aujourd'hui encore inégalitaire. Ce lien précieux a bien souvent été nié, délaissé, voire même oublié au fil du temps.
Et c'est justement ce qui intéresse Virginie Brancotte. "La transmission entre femmes, c'est quelque chose qui est très ancien", développe-t-elle. "Les secrets de la médecine, des plantes, de la maternité, tout ça appartient aux femmes."
Dans une démarche artistique et féministe, cette ethnologue et journaliste de profession a eu à coeur de remettre en lumière cette relation "forte et mystérieuse". Comment ? Grâce à une campagne d'affichage réalisée avec son association Les Mills, située à Pierrefitte-ès-Bois dans le Loiret.
Valoriser les femmes du territoire
En prévision de la journée internationale des droits des femmes le 8 mars prochain, Virginie Brancotte prévoit d'afficher dix portraits de grands-mères de la région sur 93 panneaux à partir du 1er mars. Ces affiches pourront être visibles dans les 20 villages de la communauté de communes du Berry Loire Puisaye jusqu'au 31 mars prochain.
C'est important qu'on puisse voir ces femmes : elles ont oeuvré toute leur vie, parfois dans l'ombre et sans aucune reconnaissance. Je voulais aussi montrer des profils plus âgés pour changer des campagnes de pub avec des jeunes femmes photoshoppées.
Tous les panneaux ont été construits de façon artisanale. Chaque portrait a été réalisé à partir de vraies photos par une dessinatrice diplômée des Beaux-Arts de Paris.
Sur les affiches, des petites phrases ont été inscrites à côté de chaque dessin :"Ma grand-mère m'a appris que des mains dures au travail peuvent être douces aux enfants", "Ma grand-mère m'a appris à mettre un balai sous la table si on est 13 à manger" ou encore "Ma grand-mère m'a appris à me battre pour ce que je pense être juste".
Ces mots sont issus des entretiens que Virginie Brancotte a mené avec des femmes de son entourage. Elle prévoit d'ailleurs de retranscrire prochainement ces interviews en intégralité dans un livre.
Une démarche féministe
Pour mettre en valeur les femmes et le lien qui les unit, l'association a choisi un nom original et résolument féministe pour sa campagne : "Sorcières et magiciennes".
La notion de "sorcière" a toujours été connotée très négativement. Or à l'époque, elle décrivait des femmes libres et fortes, qui avaient parfois choisi le célibat et qui possédaient souvent une grande connaissance de la nature. L'idée, c'est de redonner ses lettres de noblesse à ce terme. Le côté "magicienne", c'est plus pour adoucir les traits.
Depuis quelques années en effet, la réputation de la sorcière évolue notamment grâce à la littérature et au cinéma. Dans son livre Sorcières : La puissance invaincue des femmes, l'autrice féministe Mona Chollet ne décrit pas ce personnage comme un être maléfique, mais bien comme une figure indépendante aux pouvoirs multiples. Même constat pour la série Sabrina et la saga Harry Potter : Sabrina et Hermione sont présentées comme des héroïnes courageuses et oeuvrant pour le bien commun.
Pour rendre hommage à toutes ces femmes du quotidien et à leurs connaissances inestimables, Virginie Brancotte mènera une deuxième campagne au mois d'octobre 2021. Dix nouveaux portraits seront affichés dans les rues loirétaines. "On a des affiches qui parlent de la broderie, du point de croix, c'est très rigolo", sourit-elle. Soutenu par les collectivités territoriales, ce projet bi-annuel se poursuivra jusqu'en octobre 2023.