Comme de nombreuses autres communes polonaises, Tuchów a adopté récemment une législation ouvertement homophobe.
"Même si nous savions que le parti au gouvernement relayait cette homophobie, nous avons été atterrés de découvrir que la ville de Tuchów avait voté la résolution, comme un grand nombre de communes du Sud-Est de la Pologne" regrette Colette Martin-Chabbert, en charge des relations internationales.C'est un divorce, qu'a décidé d'entamer Saint-Jean-de-Braye (Loiret), le 14 février. Lors du dernier conseil municipal, l'assemblée a voté à l'unanimité pour suspendre les relations officielles avec sa ville jumelle polonaise de Tuchów. Car la commune fait désormais partie des villes qui ont adopté des "zones sans LGBT", encouragée par le gouvernement d'extrême-droite du parti Loi et Justice.
"L'Histoire, hélas, se répète"
88 communes ont adopté ces textes, contraires aux traités européens, qui encouragent à ne pas financer d'association oeuvrant pour les droits des LGBT, suggèrent aux entreprises de refuser les candidats LGBT ou aux professeurs de veiller dans les écoles à ce que les enfants ne s'intéressent pas à ce qui est présenté comme une idéologie menaçant les valeurs traditionnelles polonaises.
"On a tout de suite réalisé la gravité de cette prise de position, en se disant que l’histoire, hélas, se répétait. On est bien placés pour le savoir, dans le Loiret, avec le souvenir de trois camps d’internement. A Jargeau, il y avait des tziganes et des homosexuels. On ne peut pas accepter que des décisions comme celles-ci soient prises, au mépris des droits de l’homme" rappelle gravement Colette Martin-Chabbert. On estime qu'entre 5 000 et 15 000 homosexuels ont été envoyés dans les camps de concentration par les autorités nazies, lors de la Seconde Guerre Mondiale.
La motion adoptée par Saint-Jean-de-Braye vise uniquement à suspendre les relations officielles entre les deux communes et ne concernera pas les actions "telles que les échanges ou les stages."OBLIGÉS DE SE CACHER ? - Pour ces deux hommes interviewés respectivement en 1973 et 1982, l'orientation sexuelle pose problème dans leur métier. En 2020, 25 % des personnes LGBT+ disent avoir subi au moins une agression physique ou verbale au travail. pic.twitter.com/SKTVjupsCk
— Ina.fr (@Inafr_officiel) February 16, 2020
"La question des droits humains est indispensable"
"Je crois que c’est la première fois dans le Loiret qu’une commune prend une telle mesure. Dire : on n’accepte pas l’homophobie chez nous, on ne l’accepte pas quand elle est institutionnalisée dans une ville jumelle" s'est réjoui de son côté Christophe Desportes-Guilloux, secrétaire du Groupe Action Gay et Lesbien du Loiret (GAGL45).
Le responsable associatif s'est dit "très heureux" de ce vote unanime du conseil municipal. "Exclure toute une population d’un territoire, ça ne s’est pas vu depuis des décennies. Le jumelage doit aussi être porteur de valeurs, qui ne peuvent pas être seulement économiques ou culturelles. La question des droits humains nous semble absolument indispensable" assène-t-il.
La mesure fait partie des idées portées par le GAGL45, qui a confié aux candidats aux municipales des "Propositions pour une commune inclusive". Candidate à sa propre réélection, la maire Vanessa Slimani a donc décidé d'appliquer cette résolution.SOS homophobie publie chaque année un Rapport annuel basé sur les témoignages reçus sur la ligne d'écoute. Ses rédacteur·rice·s proposent un quiz pour vous plonger dans l'histoire de ce document.https://t.co/vabmjdIOkq#ToujoursPrésent #25ansSOShomophobie pic.twitter.com/wejM1pacXV
— SOS homophobie (@SOShomophobie) April 15, 2019
Elle se maintiendra jusqu'à nouvel ordre. Les officiels de Tuchów "n'ont pas très bien réagi" selon Colette Martin-Chabbert. "Ils étaient surpris, offusqués, de notre prise de position, car on ne les a pas concertés. Quelle concertation fallait-il avoir ? Ils ont voté ce texte. Je pense qu’ils ne comprennent pas pourquoi cela nous choque..."