Le gouvernement a finalement décidé de ne pas attribuer la subvention de 800 000 euros aux laboratoires Servier, situés à Gidy dans le Loiret. Pour Irène Frachon, pneumologue à l'origine de l'alerte sur les dangers du Médiator, il n'aurait jamais fallu en arriver là.
Marche arrière de la part du gouvernement. Dans un communiqué de presse, la ministre déléguée chargée de l'Industrie auprès du ministre de l'Economie, Agnès Pannier-Runacher annonçait ce samedi 26 mars que "compte tenu de l'émotion suscitée par cette décision (l'attribution d'une subvention de 800 000 euros aux laboratoires Servier, ndlr), le gouvernement a décidé d'annuler cette subvention qui concerne le site de Gidy, anciennement site de production du Médiator".
Pour Irène Frachon, la pneumologue brestoise à l'origine de l'alerte sur les dangers du Médiator il y a plus de dix ans : "la pression médiatique a joué. C'est dommage qu'il faille en arriver là pour avoir un minimum de respect".
Subvention aux laboratoires Servier : une décision "incompréhensible" pour une économiste de la santéhttps://t.co/Bwq1z6cc5u pic.twitter.com/89j6zS9Ffu
— franceinfo (@franceinfo) March 25, 2022
Une décision initiale prise au nom de la souveraineté sanitaire ...
Dans son édition du 23 mars, le Canard Enchaîné révélait que les laboratoires Servier, situés à Gidy (Loiret), allaient recevoir une subvention de 800 000 euros de la part de l'Etat dans le cadre du plan France Relance. Objectif : faire en sorte que la France retrouve sa souveraineté pharmaceutique et soit autosuffisante en cas de crise sanitaire.
"Je pense aussi qu'il faut fabriquer des médicaments en France, mais ça ne peut pas se faire n'importe comment. Les conditions d'attribution de cette subvention laissent très perplexe". On lit en effet dans les colonnes du Canard que certains des médicaments produits dans l'usine de Gidy sont jugés inutiles, voire dangereux par les autorités de santé.
Quand j'ai vu cette subvention, ça a été la nausée
Irène Frachon, pneumologue et lanceuse d'alerte sur les dangers du Médiator
Mais si la révélation au grand public n'a été faite dans la presse qu'en milieu de semaine, Irène Frachon dit être au courant de l'attribution de cette subvention depuis le 17 février. "Ça m'a permis d'informer le collectif de victimes du Médiator. Il faut respecter leur dignité et leur mémoire, et puis beaucoup sont encore vivantes !". Dans la foulée, l'une des membres du collectif a rédigé une lettre, "très argumentée", au ministère de l'Economie, "pour qu'ils comprennent à quel point c'est insupportable".
... un an jour pour jour après le procès du Médiator
Irène Frachon reste encore sous le choc que le gouvernement "pense que la page du Médiator a été tournée". "Les gens en meurent encore. On n'est pas prêts à passer à autre chose avant au moins une bonne dizaine d'années. Il y a un manque de discernement. Le Médiator, ce n'est pas une faute, c'est un délit". Il y a presque un an, le 29 mars 2021 , Servier était condamné à 2,7 millions d'euros d'amende pour "tromperie aggravée" et "homicides et blessures involontaires" dans le scandale sanitaire du Mediator. Condamnation dont les laboratoires ont fait appel.
Enfin, Irène Frachon confie avoir "mal au cœur pour les employés de Servier, parce qu'ils sont dévoués à une boîte qui devrait bien les traiter et ils fabriquaient sans le savoir des médicaments inutiles, voire dangereux". Contactés, les syndicats de salariés n'ont, pour l'instant, pas donné suite à nos demandes d'interview.