Le maire de Sainte-Geneviève-des-Bois (Loiret) a pris un arrêté municipal interdisant aux habitants de la commune de tomber malades. Un acte symbolique pour dénoncer le manque de médecin dans sa communauté de communes.
Mieux vaut ne pas attraper la grippe ou être contaminé par la gastro à Sainte-Geneviève-des-Bois. Tomber malade est en effet interdit. C’est écrit noir sur blanc, placardé sur le mur de la mairie.
L’arrêté municipal "2019-D-01 (..) portant interdiction aux Génovéfains de tomber malade" le stipule bien:
"Vu l'article L2212/1 du Code général des collectivités territoriales, relatif aux pouvoirs de police du maire.
Vu la difficulté d'obtenir un rendez-vous chez un médecin.
Considérant la pénurie de médecins.
Arrête:
Article 1: il est interdit aux Génovéfains de tomber malade.
Article 2: Ampliation du présent arrêté sera notifié à:
- Monsieur le sous-préfet
- Messieurs les sénateurs du Loiret
- Mesdames et messieurs les députés du Loiret
- ARS."
Cet acte administratif qui prête à sourire est pourtant hautement symbolique. L’idée a germé dans la tête d’André Jean, maire de la commune depuis 18 ans, après un épisode de grippe : "J’ai essayé de trouver un docteur pour me recevoir et je n’ai pas réussi. Alors j’ai fait comme tout le monde : je suis resté chez moi et j’ai pris du paracétamol." plaisante-t-il à moitié.
"Quand je me fais arrêter dans la rue par des administrés, on me demande sans arrêt : "monsieur le maire, qu’est-ce que vous faites pour ce problème de docteur ?" Et je ne sais pas quoi répondre", déplore-t-il. "Alors un matin, je suis arrivé à la mairie et j’ai dit à la secrétaire : "On va faire ça ! "
Cet arrêté municipal, bien qu’en apparence drôle, est véritablement "un coup de gueule, un cri d’alarme" adressé aux pouvoirs publics.
"L’objectif, c’est d’interpeller les parlementaires et l’Agence Régionale de Santé. Qu’on parle du problème de désertification médicale".
Selon le maire de cette commune de 1100 habitants, il y a 6 ans encore, 8 médecins exerçaient sur l’ancien Canton de Chatillon-Coligny dont fait partie Sainte-Geneviève-des-Bois. "Aujourd’hui, il n’y en a plus qu’un !" et ce dernier sera en âge de partir à la retraite d’ici un à deux ans.
Pour l’instant, André Jean n’a eu de retour ni des sénateurs, ni des députés. Pas même de la sous-préfecture dont il sait pourtant qu’elle risque de casser l’arrêté municipal.
Un médecin algérien pour pallier le manque de praticiens.
Le maire de Sainte-Geneviève-des-Bois ne se contente pas de sensibiliser au problème de désertification médicale, il tente également de trouver des solutions. Récemment, il est entré en relation avec un médecin généraliste algérien : "Il est disposé à venir exercer à Chatillon-Coligny" affirme André Jean, "mais il ne peut pas car, d’après l’ARS et le conseil de l’ordre des médecins, il faut faire un stage de 3 ans en France avant de pouvoir exercer." regrette-t-il. "L’Etat a apparemment supprimé le numérus clausus, mais il faut des années pour former un médecin, donc si on en a un, ce n’est pas avant 2030", déplore-t-il.
Si l’arrêté municipal ne provoque aucune réaction de la part des sénateurs et des députés du Loiret, André Jean ne compte pas s’arrêter là : "On fera des courriers aux parlementaires ou au Président de la République, ou autre chose … je ne sais pas. Mais ça ne peut pas durer comme ça !"
Le maire de Sainte-Geneviève-des-Bois n’est pas le premier à utiliser ce stratagème pour sensibiliser au problème de désertification médicale. En octobre 2018, le maire d’Ychoux (Landes) voyant partir ses derniers praticiens, avait également pris un arrêté d'interdiction de tomber malade.