Rentrée scolaire 2024. "Un an de com', et ensuite on retire les moyens" : déjà des tensions pour trouver des professeurs remplaçants en Centre-Val de Loire

En Centre-Val de Loire, le manque d'enseignants ne représente pas un "problème structurel" selon l'académie, à part sur certaines matières spécifiques. Mais l'assèchement du vivier de remplaçants laisse présager de grandes difficultés à venir en cas d'absences de professeurs.

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Comme tous les ans, la promesse "un enseignant devant chaque élève" est revenue en fanfare, à l'orée de la rentrée scolaire 2024. Et, a priori, la situation aurait pu paraître réjouissante. "Il n'y a pas de problème structurel de manque d'enseignants" dans l'académie d'Orléans-Tours, assurait le recteur Jean-Philippe Agresti vendredi 30 septembre.

"Le travail de l'académie a mieux fonctionné cette année, c'est globalement moins grave que les années précédentes", abonde Matthias Cyprien, proviseur du lycée professionnel Jeannette-Verdier de Montargis, et référent Loiret du Syndicat des personnels de direction de l'Éducation nationale (SNPDEN).

Des postes non pourvus dans un établissement sur deux

"Moins grave", mais pas miraculeuse non plus. "Il y a moins de professeurs manquants, mais il y en a toujours", constate le syndicaliste. Dans son établissement, l'équivalent horaire de deux postes et demi est vacant. Dans le pays, il manquerait au moins un enseignant dans plus de la moitié des collèges et lycées, d'après une enquête publiée ce vendredi 6 septembre par le Snes-FSU, premier syndicat du second degré.

Et "on est inquiets qu'ils soient vacants potentiellement toute l'année". Car les professeurs titulaires sont trop peu nombreux pour remplir tous les postes, et le concours n'a, encore une fois, pas fait le plein en 2024. Si la très grande majorité des postes ont pu être pourvus, assurant une rentrée réussie aux 433 000 élèves de la région, c'est donc en piochant d'ores et déjà dans le vivier des remplaçants et des contractuels. "Le vivier est à sec", constate Matthias Cyprien.

"On voit bien que tout est tendu tendu tendu, et que dès qu'il y a une absence pas prévue, ça pose problème", souffle Martine Rico, coordinatrice régionale de la FCPE, la Fédération des conseils de parents d'élèves.

Le défi du remplacement

Plusieurs matières sont particulièrement touchées. Selon le rectorat, il existe "des tensions en remplacement" sur le français dans certaines zones très ciblées, sur l'anglais, et dans certains enseignements spécifiques en lycées professionnels.

La question de la ruralité et des emplois du temps complexifie encore les choses. "Trouver quelqu'un pour seulement trois heures par semaine dans un collège rural, c'est d'une complexité immense", assure le recteur Jean-Philippe Agresti. Il assure cependant que, sur les remplacements de plus de 15 jours, un remplaçant a pu être trouvé dans 95% des cas l'année scolaire passée en Centre-Val de Loire.

Oui mais, selon Martine Rico, il y a un hic. Ce calcul ne comptabiliserait que les arrêts qui sont, dès le départ, de 15 jours au moins, et pas les arrêts de quelques jours renouvelés pour dépasser les deux semaines. "Allez trouver un toubib qui arrête quelqu'un 15 jours du premier coup !"

De manière générale, pour Martine Rico :

Le jour de la rentrée, top départ, on peut faire la photo avec tous les profs. La question, c'est est-ce qu'on peut la refaire dans 15 jours ? Ça va se coincer dès que ça va se mettre en route.

Martine Rico, coordinatrice FCPE Centre-Val de Loire

Promesse "pas tenue, ou mal tenue"

Référent académique pour le premier degré et cosecrétaire en Eure-et-Loir de la CGT Educ’action, Thibault Lemière regrette que, pour parvenir à avoir des profs partout, "des collègues se soient retrouvés basculés sur d'autres postes au dernier moment" alors qu'ils "avaient passé l'été à préparer leurs cours pour leur classe".

Pour lui, la promesse du "un adulte devant chaque élève" n’est "pas tenue, ou mal tenue". Il évoque "des contractuels mal formés et appelés au dernier moment, ou un adulte qui peut juste gérer une classe". Il met en cause un manque d'anticipation globale de l'Éducation nationale, et "un retard à cause des législatives".

Il pose d'emblée la question des moyens mis par le ministère dans l'école, le collège et le lycée. Des moyens "pas à la hauteur des enjeux", notamment pour rendre le métier de professeur attractif. Martine Rico ajoute : "Je n'excuse pas le ministère de cette affaire. Le rectorat, lui, il fait avec les moyens qu'on lui donne."

"L'école n'est pas loin de s'écrouler"

Ces moyens, à en croire Matthias Cyprien, ils sont parfois en baisse. Notamment du côté du "pacte enseignant", qui permet aux professeurs volontaires de faire des heures supplémentaires de remplacement en échange de primes. Selon le proviseur montargois, les enveloppes budgétaires prévues auraient été "divisées par trois ou quatre" par rapport à la rentrée 2024.

On nous a annoncé ça avec tambours et trompettes et des moyens impressionnants. Dans les établissements où les équipes se sont emparé du pacte, on joue encore le jeu de la frustration. Dans ceux où ça n'a pas marché, ça donne raison aux équipes qui étaient contre. C'est une année de com', et après on retire les moyens.

Matthias Cyprien, référent SNPDEN-Unsa Loiret

Le proviseur estime même que le pacte et l'ensemble de "la com' pol' du ministère" ont eu un effet contre-productif. "Ça a braqué" des enseignants, auparavant investis, et qui disent désormais "au ministère de remplir sa mission".

FCPE, syndicats de direction et syndicats de personnels s'accordent en tout cas pour estimer que l'Éducation nationale va mal. "L'école n'est pas loin de s'écrouler", estime Martine Rico.

Et de nouveaux moyens ne devraient pas arriver tout de suite. Selon la commission des Finances de l'Assemblée nationale, le budget envisagé pour 2025 par le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal envisageait une hausse de 0,5% du budget alloué à l'Éducation nationale. Une hausse neutralisée par l'inflation, qui devrait tourner autour des 2%.

Contacté ce jeudi 5 septembre, le rectorat n'a pas encore été en mesure de donner à France 3 le nombre de demandes de remplacement non pourvues dans l'académie à ce stade.

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