A l'occasion de la journée internationale du droit des femmes, découvrez "Tchika", un magazine d'"empowerment" destiné aux petites filles. Déconstruire les stéréotypes, mettre en valeur des femmes et sensibiliser à la cause féministe, Tels sont les objectifs d'Elisabeth Roman, sa créatrice.
Il n'aura fallu qu'un petit été pour que le projet d'Elisabeth Roman mûrisse et se réalise. Cette ancienne rédactrice en chef du magazine Science et Vie Découvertes, installée à Châlette-sur-Loing près de Montargis (Loiret), s'est lancée en juin dernier dans une nouvelle aventure : Tchika. Le premier magazine féministe destiné aux 7-12 ans.
Après des années passées dans un grand nombre de médias, notamment dans la presse jeunesse, la journaliste souhaite insuffler un souffle nouveau : "Dans un premier temps, j'ai voulu réaliser un magazine scientifique consacré aux petites filles pour déconstruire l'injonction que les métiers des sciences et de la recherche étaient destinés aux garçons. Mais lorsque j'ai regardé ce qui se faisait dans la presse pour les petites filles, j'ai un peu halluciné."
Du rose, des conseils beauté, des stéréotypes véhiculés à toutes les pages... C'en est trop pour Elisabeth Roman. Son magazine, Tchika, a pour but de mettre en valeur des femmes, déconstruire les clichés installés depuis l'enfance, instruire et également de sensibiliser à la cause féministe :
Dans les manuels de CP, les femmes représentent 40 % des personnages et 70 % de ceux qui font la cuisine ou le ménage. Mais seulement 3 % de ceux qui font un métier scientifique.
Dans le premier numéro, les lecteurs et lectrices peuvent donc retrouver une interview de la footballeuse internationale Amandine Henry, une double-page pour expliquer que le rose n'est pas que pour les filles ou encore un coloriage à effectuer de Rosa Parks, figure emblématique de la lutte contre la ségrégation raciale aux États-Unis.
"Combattre l'appropriation du patriarcat"
Le projet plaît. Beaucoup. En moins d'une dizaine de jours, la campagne de financement participatif lancée sur Ulule atteint tous ses objectifs : "Le crowdfunding me permettait d'établir un rapport affectif avec les abonnés. Nous devions parvenir à 20 000 euros, nous en avons reçu trois fois plus. C'était quelque chose de formidable, tout comme le fait d'observer que des médias déjà bien établis soutenaient massivement l'idée."Les premières retombées sont positives pour Elisabeth Roman. Trois numéros du trimestriel sont déjà publiés, le quatrième est en cours. Et le courrier que reçoit Elisabeth Roman est unanime : "Je reçois des lettres d'abonnés qui se disent très satisfaits. Des petites filles m'expliquent qu'elles sont devenues féministes. Certains parents sont dithyrambiques et me remercient. Forcément, on est un peu fiers de bouger les lignes à notre échelle." Le slogan du périodique ? "Faites du bruit, les filles !"
A chaque bonne idée, ses détracteurs. Sur les réseaux sociaux - essentiellement Twitter, confie la rédactrice du magazine -, quelques critiques fusent. Il est reproché au magazine de se prétendre accessible à tous, mais d'être rédigé au féminin. Ce à quoi répond Elisabeth Roman : "Tchika reste destiné à tous les enfants, mais il s'adresse essentiellement aux petites filles. J'essaye d'expliquer que certaines choses ne doivent pas se faire 'en mixité' afin de combattre l'appropriation du patriarcat."
La petite sœur, Tchikita
Pour la journaliste, la société doit encore faire de nombreux progrès afin que la cause des femmes soit véritablement entendue. Et cela passe également dès le jeune âge : "On peut parler de féminisme et d'"empowerment" avec des enfants d'une dizaine d'années. Avec tous les outils numériques mis à leur disposition à cet âge, ils deviennent de plus en plus au fait de ce genre de choses. Il ne faut simplement pas leur parler comme un adulte le ferait avec un jeune. Il faut retrouver son âme d'enfant pour leur expliquer."Les succès récurrents de la journée internationale du droit des Femmes, qui a lieu cette année ce dimanche 8 mars, marque selon elle un tournant :
Tchika fait définitivement partie de ces initiatives qui fait avancer la cause des femmes. Vendu 10 euros en ligne, le magazine vise d'ici un an les 10 000 exemplaires. Et, la petite sœur, "Tchikita" destinée aux 4-7 ans pourrait voir le jour dès septembre prochain.Je vois désormais de plus en plus de jeunes femmes de 20 ans s'engager et faire face à des problématiques comme le harcèlement de rue ou au travail, la précarité menstruelle... C'est une très bonne chose. Mais, outre les marches organisées ce jour, plein d'initiatives ont lieu chaque année et méritent autant de lumière que cette journée.