Que pensent du réchauffement climatique les générations qui devront le vivre, y survivre, et élever leurs propres enfants ? Des lycéens d'Orléans nous confie leur "éco-anxiété".
Nous avons réchauffé la Terre, ils devront l'habiter. Devant ce lycée d'Orléans, à l'heure du déjeuner, quelques dizaines d'élèves traînent avant d'aller déjeuner. Alors qu'à des milliers de kilomètres de là, le sort du monde se joue à Charm el-Cheikh, eux mesurent déjà le tribut qu'ils paieront à la crise climatique.
Climat d'anxiété
"C'est un peu angoissant quand même", lâche Lenny, 16 ans. "On sait pas trop à quoi s'attendre, d'année en année la situation empire, ça fait un peu peur." Plus tard, il aimerait travailler dans le design immobilier, et c'est justement un secteur "qui prend de plus en plus en compte ces problématiques", indique-t-il.
Enzo, lui, a 17 ans. Et déjà des regrets : "Moi j'aurais voulu emmener mes enfants faire du ski, mais je crois qu'il n'y aura plus trop de neige. Je suis un peu triste."
Il faut faire attention à l'environnement. On l'aime, quand même, notre planète ! On n'a pas envie de mourir sous le réchauffement climatique
Enzo, 17 ans
"Je comprends même pas comment encore aujourd'hui il y a autant de choses qui font autant de mal à la planète", s'insurge Killyam, 16 ans. "Même des petits trucs comme éteindre l'eau, si tout le monde le faisait ça irait un peu mieux !" Et l'inaction climatique, pour laquelle l'État français a été condamné à deux reprises en 2020 et 2021, le fait sortir de ses gonds. "C'est ça qui me fait chier le plus. Là-haut, ça ne bouge pas. Avec tout l'argent qui existe, on pourrait avoir des projets, mais non, l'environnement ça ne les intéresse pas."
La Terre s'énerve. Moi ça m'inquiète surtout au niveau de la faune et de la flore. C'est notre alimentation, notre oxygène. Plus ça va, plus on détruit la planète, plus nos conditions de vie seront dures.
Kilyam, 16 ans
Inquiétudes face à l'avenir, fatalisme, mais aussi tristesse, colère et révolte : ces jeunes sont pris de ce qui est en passe de devenir le mal du siècle, l'éco-anxiété. Inventé dans les années 70, le terme est revenu à la mode depuis la canicule de 2019. Dans un contexte mondial d'inaction ou d'investissement insuffisant dans la lutte contre le réchauffement, l'éco-anxiété est née.
Et si elle pousse certains à l'apathie, d'autres franchissent le pas de l'engagement, voire de l'activisme. C'est d'ailleurs l'acte de naissance du collectif Extinction Rebellion, qui a lancé plusieurs actions en novembre.
La sensibilisation progresse à l'école
De fait, les informations sur l'urgence climatique sont de plus en plus nombreuses et précises, de moins en moins remises en question, et de mieux en mieux diffusées. Depuis plusieurs années, la dégradation de l'environnement figure au programme de plusieurs matières enseignées au lycée, comme les sciences économiques et sociales (SES).
"En cours, on parle du réchauffement climatique", confirme Imad, élève de Terminale. "Et franchement on est vraiment en train de nuire au capital naturel, c'est aberrant."
Faites vraiment attention à la nature. On nous l'a donnée, et on est en train de la détruire bêtement. Les investisseurs n'y pensent pas assez. Franchement il y a peu de gens qui y pensent.
Imad, 18 ans
"Sincèrement, avant je ne m'inquiétais pas vraiment", confie quant à elle Aïssatou, 18 ans. Cette année, elle abordera la question de l'environnement comme enjeu planétaire à travers son cours d'histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques. Et depuis environ un an, l'idée d'un changement dramatique a fait son chemin, et Aïssatou se rend compte que "ça pourrait vraiment toucher beaucoup de personnes". "Il faut qu'on se réveille !"
Une génération au seuil de l'inconnu
"Je pense qu'on devrait éduquer les jeunes générations encore plus sur le recyclage, et apprendre à consommer moins sous plastique" renchérit son amie Joanna. Encore faut-il que les infrastructures le permettent. "J'ai relevé quelque chose, c'est que que souvent on peut moins recycler quand on vient de la campagne, il y a moins de poubelles jaunes, de passages, c'est plus compliqué."
Je vois beaucoup de jeunes avoir peur pour leur avenir, par exemple ils se demandent s'ils vont faire des enfants un jour. Si la situation ne s'améliore pas, ce sera compliqué d'élever des enfants.
Joanna, 18 ans
En attendant, les petits gestes et les bonnes habitudes s'imposent. On jette ses mégots pour ne pas polluer, on économise l'eau, l'énergie et le chauffage. Beaucoup de ces bonnes pratiques viennent des adultes. "Chez moi, j'éteins aussi la lumière en sortant de ma chambre", raconte Bryan, élève de seconde. "Récemment j'étais à Tours, chez ma tata, là-bas c'est pareil, on doit éteindre, on doit économiser, on doit penser à l'écologie un peu."
Car si aujourd'hui leur vie tourne autour du lycée et des copains, demain ils devront s'adapter à un monde qu'aucun humain n'a jamais connu, et enseigner à leur propre enfant comment y vivre. Bryan en est bien conscient. "Étant jeunes, on sera les futurs parents. On se doit de commencer à faire attention à nos gestes. Tout commence quand on est petits." Pas fatalistes pour un sou, les jeunes générations n'ont pas oublié que l'espoir, aussi, est une énergie renouvelable.