A l'appel national de la Marche des Solidarités, 160 personnes se sont rassemblées ce samedi 30 mai à Orléans, pour réclamer des papiers pour les migrants, la fermeture des Centres de Rétention Administrative, et manifester leur opposition au "délit de solidarité".
"Nous voulons montrer que, malgré le confinement, la chaîne des solidarités n'est pas rompue." C'est ainsi que Théo Roumier, syndicaliste à Sud Education Loiret, décrit la chaîne humaine formée ce samedi 30 mai après-midi à Orléans.A l'appel de plusieurs collectifs, comme le Cojie-RESF (Collectif de soutien aux jeunes isolés étrangers), de la CGT, de Solidaire, d'Attac ou encore du PCF, 160 personnes selon les organisateurs se sont rassemblées entre 14h et 15h. Un rassemblement distancié, puisque la file des 160 participants s'étalait sur une distance de plus de 300 mètres, entre la place de la République et la préfecture du Loiret.
Une manifestation autorisée par la préfecture, et mettant en place "une distance d'environ 1,50 mètre entre chaque personne", selon Théo Roumier. Pour symboliser une chaîne malgré l'éloignement, les manifestants tenaient, chacun par une extrémité, un ruban de rubalise. "On en avait prévu une centaine, mais c'était trop peu", confie-t-il. "Alors certains ont pris des ficelles rouges. Et 99% des gens avaient un masque, comme on l'avait demandé."
"Les CRA : ni ici, ni ailleurs"
Les mains occupées par la rubalise, les manifestants ont dû se coller des slogans directement sur les vêtements, ou se les accrocher autour du cou. Au programme : "Un toit, une école, des papiers" pour les mineurs isolés, "Des papiers pour toutes et tous", "Fermez les CRA" ou encore "Les CRA : ni ici, ni ailleurs", en référence au Centre de Rétention Administrative qui doit ouvrir à Olivet, au sud d'Orléans, d'ici 2023.
Et à en croire Théo Roumier, les problèmes des CRA sont devenus encore plus visibles ces derniers mois :
Nous sommes pour la fermeture des CRA de façon générale, mais le confinement a encore plus mis en avant leur problématique, que la population ne voit pas. D'habitude, des gens y sont enfermés avant d'être expulsés du pays. Là, ils continuaient d'être enfermés alors que plus aucune expulsion n'avait lieu à cause de l'épidémie. Donc, on maintenait en détention des gens sans raison valable.
A noter que dans certaines régions en France, des centres de rétention administrative se sont vidés pendant le confinement, comme à Lyon, où le juge a ordonné le relâchement des étrangers. Le 27 mars, le Conseil d'Etat a cependant refusé la fermeture des CRA pendant la crise sanitaire.
Un appel aux autorités en faveurs des sans-papiers
Plus généralement, la manifestation souhaite s'opposer au "traitement raciste des autorités" réservé aux "personnes étrangères et sans-papier", précise le syndicaliste, également membre du Cojie-RESF et du collectif COLERE (COLlectif contre les Expulsions et la REtention).
La chaîne orléanaise s'inscrit ainsi dans une mobilisation nationale, déclenchée à l'appel de la "Marche des Solidarités". Dans un texte publié par le blog de Médiapart, le collectif dénonce une "bombe sanitaire" :
La mobilisation du Loiret, et d'autres en France, avaient ainsi pour but de réclamer du gouvernement des tests systématiques dans les foyers, l'isolement des personnes contaminées dans des lieux décents, la suspension des loyers pendant toute la durée de confinement, ainsi que la fermeture des CRA, et la régularisation de tous les sans-papiers. Entre autres.Dans les foyers surpeuplés et abandonnés, aucune distanciation physique n'est possible. Le virus risque de se propager sans frein. C'est aussi le cas dans les centres de rétention [...]. Ajoutons à cela que les sans-papiers sont sans droits, sans revenus et sans espoir d'accès aux allocations proposées par l'Etat. Pour elles, et pour eux, il n’y a pas d'accès gratuit aux soins, et pas d’autre possibilité pour survivre que de chercher des moyens de subsistance.
Refus du "délit de solidarité"
Au milieu de ces revendications générales, d'autres pancartes manifestaient leur "Soutien à Chernoh et Nicolas". Chernoh Ibrahim Bah est "un jeune menacé de ne pas recevoir de titre de séjour par la préfecture. Et Nicolas Desré, enseignant au lycée Jean Zay d'Orléans, est menacé de poursuites, car déclaré hébergeant solidaire de Chernoh", explique Théo Roumier, qui s'oppose avec les autres maillons de la chaîne au "délit de solidarité".
Et les organisateurs ne comptent pas s'arrêter à cette première manifestation post-confinement. "On va continuer à prendre des initiatives", complète le syndicaliste. "On refuse que l'action collective soit muselée alors que le confinement va être acté presque partout le 2 juin et qu'on peut aller librement au Carrefour Place d'Arc."
Il espère qu'une manifestation à l'échelle de la région, et non plus des mobilisations morcelées, pourra se tenir dans les prochaines semaines.