À la fin du mois d'avril, Agnès Valériaud avait envoyé des chaussures usées à Jean Castex et à Bruno Le Maire pour demander une ouverture dès le 3 mai. Dix jours après, sa demande reste sans réponse. Cette commerçante devra patienter jusqu'au 19 mai pour retrouver ses clients.
"Attendez, excusez-moi", ce mardi matin, quand Agnès Valériaud, commerçante à Pithiviers (Loiret) nous répond, le téléphone de sa boutique de chaussures interrompt la conversation à plusieurs reprises. "C’est exceptionnel", assure-t-elle. Ce sont des commandes.
Depuis plus d'un an, la commerçante multiplie les initiatives. Livraison, retrait en magasin, elle a même exposé ces modèles dans les vitrines d’une librairie de la ville ou dans un bar PMU de Puiseaux. "On fait le maximum pour pouvoir vendre", résume-t-elle.
Si son unique salarié (temps partiel) est au chômage partiel, quand son magasin est fermé au public, Agnès Valériaud ne chôme pas. Photos sur les réseaux sociaux, mise à jour de ses papiers administratifs, rangement de la réserve, préparation des commandes des clients, il y a de quoi faire.
Je suis là tous les jours aux mêmes horaires que d’habitude, 9h30/18h, du mardi au samedi pour faire 20 % du chiffre d’affaires.
En juin 2020, à cause du premier confinement, elle a enregistré une baisse de 14 % de son chiffre d’affaires. "En quarante ans, c’est la première fois que j’étais en moins". Et l’année 2020-2021 ne s’annonce pas meilleure.
Pas de réponse de Jean Castex
Comme tous les magasins jugés non essentiels, Agnès Valériaud ne pourra rouvrir que le 19 mai alors qu’elle militait pour la date du 3 mai. "Le 19, c’est tard. Ils annoncent du beau temps en fin de semaine, on aurait dû cartonner. Là, ce ne sera pas le cas. Mai, c’est un gros mois de travail", juge la détaillante installée depuis quatre ans à Pithiviers, après trente-six à Puiseaux.
C’est pour cela qu’elle a, comme d’autres commerçants un peu partout en France, envoyé des chaussures usées à Jean Castex, le Premier Ministre, et à Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance.
On s'est dit qu’on allait leur envoyer de vieilles chaussures pour leur demander comment ils peuvent faire pour marcher avec.
Un colis qui est resté sans réponse. "Qu’ils répondent ou qu’ils ne répondent pas… J’espérais simplement une ouverture au 3 mai", précise Agnès Valériaud
Ce qui l’enrage le plus, c'est la notion de "non-essentiel".
Ça fait quarante ans que je vends des chaussures. Je me rends compte que ça fait quarante ans que je fais un truc qui ne sert à rien puisque nous sommes non-essentiels. Alors que dans la rue, vous ne voyez personne marcher pieds nus !
Les désaccords avec le Gouvernement pourraient ne pas s'arrêter là. Il faudra aussi batailler au sujet des dates des soldes d’été. Elles sont pour l’instant prévues du 23 juin au 20 juillet. "On ne va pas solder des choses que l’on n’a pas vendues. Ce serait bien que ce soit décalé début juillet pour qu'on ait le temps de vendre plein pot. Quand on vend en soldes, il ne nous reste rien. Ça paye juste nos frais. À force de travailler juste pour payer nos frais, c’est un peu triste !"