Régulièrement critiqué, le système des 500 parrainages est le saint graal qui permet à tout prétendant à l'Élysée de participer officiellement à l'élection. On vous explique son fonctionnement, pas si simple que ça, alors que les dépôts commencent ce dimanche 30 janvier.

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Onze candidats en 2017, dix en 2012, douze en 2007. Les élections présidentielles françaises ont de nombreux prétendants, mais une liste finale bien plus réduite. La faute au fameux système des 500 parrainages, sans lesquels un candidat ne peut pas avoir un bulletin à son nom le jour de l'élection. On vous explique son fonctionnement, et pourquoi il fait de plus en plus débat.

1 - Un héritage des années 60

Le système des parrainages est créé en 1962, trois ans avant la première élection présidentielle à suffrage universel direct de la Ve République. À l'époque, seuls 100 parrainages sont nécessaires, mais ils doivent provenir de trente départements ou collectivités d'outre-mer différents. Un moyen de laisser à un collège de grands électeurs une capacité d'influer le déroulement de l'élection, eux qui étaient auparavant chargés d'élire eux-mêmes le président.

Selon le vie-publique.fr, réalisés par les services du Premier ministre, il s'agit bien là d'un "système de filtrage", qui permet de ne pas accumuler les candidats. Avec un certain succès : il y a six candidats en 1965, sept en 1969, et douze en 1974. En 1976, le nombre de parrainages nécessaires passe à 500, toujours dans au moins 30 départements, avec 50 parrainages par département au maximum. Un système inchangé depuis.

2 - Qui peut parrainer ?

En 2017, 42 000 élus composaient le collège de parrains potentiels. La majorité est composée des quelques 36 000 maires, maires de communes déléguées et maires d'arrondissements. La liste, disponible dans la version en vigueur de la loi du 6 novembre 1962, est complétée par :

  • les députés, les sénateurs et les députés européens français
  • les conseillers départementaux, régionaux, de Paris, de la métropole de Lyon, et territoriaux de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Saint-Martin
  • les présidents des organes délibérants des métropoles, des communautés urbaines, des communautés d’agglomération, les présidents des communautés de communes
  • les élus des assemblées de Corse, de Guyane, de Martinique, de la Polynésie française, de Nouvelle-Calédonie et de Wallis-et-Futuna 
  • le président du conseil exécutif de Corse, le président du conseil exécutif de Martinique, le président de la Polynésie française et le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie 
  • les conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger ou les présidents des conseils consulaires

Autant dire qu'il y a du choix pour les candidats à la candidature. 

3 - Quelques subtilités de fonctionnement

Petite note technique qui ne changera absolument pas la façon dont le système est évoqué par les médias et le public : il ne faudrait pas dire parrainage ni signature, mais présentation, comme l'explique le site vie-publique.fr : "Les élus présent[e]nt un candidat à titre individuel et de façon autonome sans qu’il soit nécessaire que la personne présentée ait d’abord manifesté son intention de se porter candidate." Car, n'ayant pas les 500 signatures, les candidats qui les sollicitent n'ont rien d'officiels. 

Les parrainages doivent êtres présentés au Conseil constitutionnel "au plus tard le sixième vendredi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures" selon le texte de la loi, et leur collecte commence "au moins dix semaines avant la date du premier tour". Cette année, les dépôts des parrainages devront donc se faire entre le dimanche 30 janvier et le vendredi 4 mars. La liste des candidats officiels sera ensuite rendue publique quatre semaine au plus tard avant le premier tour, programmé pour le 10 avril. 

Par ailleurs, un élu ne peut parrainer qu'un seul candidat par élection, et ne peut pas changer d'avis après avoir validé son choix auprès du Conseil constitutionnel. Y compris si le candidat parrainé se retire de la course. Les signatures sont envoyés via un formulaire officiel du Conseil constitutionnel, à retourner uniquement par voie postale. Depuis 2016, les parrainages sont rendus publics.

Le Conseil constitutionnel considère qu'une signature "ne peut donner lieu ni à marchandage ni à rémunération". De tels cas constatés formellement entraîneraient une invalidation des parrainages, voire exposeraient les parties prenantes à des poursuites pénales.

Les candidats ayant obtenu 500 parrainages sont d'ailleurs consultés par le Conseil constitutionnel, histoire de vérifier qu'ils sont bien d'accord pour être candidat officiellement. 

4 - Pourquoi ce système est-il remis en cause ?

Le système des parrainages est critiqué par deux camps tout à fait opposés. Le premier estime qu'il est inefficace pour contrôler le nombre de candidatures. L'exemple parfait étant l'élection présidentielle de 2002, qui, avec 16 candidats sur la ligne de départ et une désunion des forces de gauche, aboutit à la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour.

Mais la critique inverse est aussi régulièrement médiatisée, critique faite à un système qui empêcherait des forces politiques importantes de pouvoir accéder à l'élection. Une certaine "incapacité à faire une place à des candidats populaires mais hors système", reconnaît le site vie-publique.fr.

Il est ainsi reproché au système de refouler des candidats bien placés dans les sondages, mais dont le manque d'élus de terrains freine la récolte de signatures. C'était le cas en 2017 pour Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, qui avaient tremblé jusque dans les derniers jours, avant de réussir leur coup. Cette année, rebelotte, avec Éric Zemmour en plus.

"Je considère que Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen et Éric Zemmour doivent pouvoir se présenter à la présidentielle. Ne pas y parvenir serait un mauvais signal pour notre démocratie", déclarait ainsi le président du Sénat Gérard Larcher sur France Inter le 11 janvier. Pour lui, "parrainer n'est pas soutenir".

Finalement, c'est le polémiste d'extrême-droite Éric Zemmour qui est le plus virulent contre le système en place, lui-même ne comptant que peu d'élus dans son nouveau parti Reconquête. Pour lui, avoir rendu les signatures publiques est "un scandale démocratique". Début janvier, il avait proposé à l'association des maires de France la création d'un pool de signatures libres pour les candidats ne parvenant pas à recueillir suffisamment de parrainages. En 2017, un tiers des parrains potentiels avaient fait usage de leur pouvoir. La proposition d'Éric Zemmour a été rapidement balayée par l'AMF, rapporte Le Figaro

À l'opposé, certains candidats se satisfont bien de ce fonctionnement. Interrogé sur Franceinfo le 24 janvier sur les difficultés de Jean-Luc Mélenchon à obtenir ses parrainages, le candidat communiste Fabien Roussel a préféré ironiser face à un concurrent pas "capable de convaincre 500 élus". "Ça pose un problème de convictions", a-t-il justifié, lui qui a déjà réuni des promesses de parrainages suffisantes. En politique comme ailleurs, chacun voit midi à sa porte.

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