Au lendemain du ralliement du député du Loir-et-Cher et conseiller départemental Guillaume Peltier au candidat d'extrême-droite Éric Zemmour, les réactions ont été variées à droite. Si les instances nationales préfèrent balayer ce revers, plusieurs élus de terrains confient leur consternation.
Depuis le mois de novembre, ce n'était plus une question de "si" mais une question de "quand". Le député et conseiller départemental du Loir-et-Cher Guillaume Peltier (ex-numéro 2 de LR) a donc rejoint la campagne d'Éric Zemmour en tant que porte-parole ce 9 janvier, s'excluant de fait de son parti.
"Si à 50 ans t'es pas candidat, t'as raté ta vie"
Pour le député d'Eure-et-Loir et vice-président de LR Olivier Marleix, le ralliement de Guillaume Peltier n'est "pas une grosse perte politique" mais il reconnaît une "déception" sur le plan personnel. "Guillaume est quelqu'un de talentueux, de sympathique, mais ce n'est pas son premier changement de camp de base", observe le député, faisant référence aux virevoltes de Guillaume Peltier depuis le Front national vers le MNR de Bruno Mégret, le MPF de Philippe de Villiers et, enfin, l'UMP devenu LR.
Plus récemment, Guillaume Peltier a soutenu tour-à-tour Xavier Bertrand puis Éric Ciotti comme candidats LR pour la Présidentielle 2022. "Ce que je regrette, c'est un manque de constance et de fidélité. Guillaume a le syndrome du jeune homme pressé", achève Olivier Marleix. "Si à 50 ans t'es pas candidat, t'as raté ta vie."
Dans le Loir-et-Cher, la consternation
Dans le Loir-et-Cher en revanche, où l'ex-LR reste conseiller départemental, la consternation domine, surtout à droite et au centre. "La décision de Guillaume Peltier de rejoindre la candidature d'extrême-droite d'Éric Zemmour me navre", a lâché Pascal Brindeau, député UDI du département dans un communiqué. Le député a aussi vivement réagi aux valeurs gaullistes que prête Guillaume Peltier au candidat d'extrême-droite, proche des milieux fascistes, condamné pour incitation à la haine raciale et apologiste occasionnel du Maréchal Pétain.
"Non, le RPR, celui de Jacques Chirac, de Philippe Séguin et de Charles Pasqua n'a rien de commun avec les valeurs nauséabondes que porte dans la campagne présidentielle l'ancien journaliste polémiste. La droite républicaine et le centre, qui représentent aujourd’hui la seule alternative crédible à Emmanuel Macron, n’ont jamais fait preuve d’ambiguïté par rapport à l’extrême-droite."
Pascal Brindeaudéputé UDI du Loir-et-Cher
Au sein du conseil départemental, l'union de la droite et du centre UPLC a annoncé dans un communiqué que Guillaume Peltier avait démissionné de la présidence du groupe et siégeait désormais comme non-inscrit. Sa prise de position "n'engage en rien le groupe et les élus de la majorité" et se trouve être "incompatible avec la cohérence politique des élus composant le groupe", ont tenu à préciser le président du Département Philippe Gouet et sa première vice-présidente Catherine Lhéritier. "Je suis un peu tombé par terre", confie pour sa part Philippe Sartori, deuxième vice-président et également membre du groupe d'élus. "Je pense qu'il y a des gens qui sont prêts à sacrifier leurs idées, les territoires à leur ambition personnelle. Dans ces conditions, comment voulez-vous que les gens aient encore envie de voter ?"
"Il y en aura d'autres"
"Le sujet, c'est le pouvoir, et pour ça, certains sont capables de tout", assène Philippe Sartori persuadé qu'il "y en aura d'autres" d'ici le premier tour de l'élection présidentielle. "Si les gens travaillaient pour leur territoire plutôt que de faire leur petite tambouille politicienne, ça irait mieux. J'aime bien la cuisine, mais il faut qu'elle soit bien faite ! "
De fait, le secrétaire départemental des Républicains dans le Loiret Emmanuel Tasky confiait début décembre à France 3 que Guillaume Peltier aurait souhaité entraîner avec lui une partie des députés LR déçus par Valérie Pécresse. Le candidat d'extrême-droite, en tout cas, y compte bien.
En m'apportant son soutien, Guillaume Peltier démontre que, comme des millions d'électeurs LR, il a compris l'enjeu vital de cette élection présidentielle.
Éric Zemmourcandidat à l'élection présidentielle
Mais cette perspective n'inquiète guère les instances des Républicains, à en croire Olivier Marleix. "Il y a beaucoup d'adhérents qui trouvent en Éric Zemmour des éléments qui leur plaisent, il ne faut pas se le cacher", juge le vice-président du parti. "Pour autant, est-ce que ça détermine un choix électoral dans une Présidentielle ? Je ne crois pas." Une partie de ce discours, explique le député d'Eure-et-Loir, se retrouve sous une forme "très proche" dans la bouche d'Éric Ciotti, désormais conseiller spécial de la candidate Valérie Pécresse sur le thème de "l'autorité".
Après l'exclusion le jour-même de Guillaume Peltier de LR par Christian Jacob, la candidate a estimé ce 10 janvier que cette défection était un "non-événement", jugeant que "cela fait des mois qu'il nous avait quittés dans sa tête". "La vraie droite, c'est moi" et "pas un commentateur qui ne sera pas au deuxième tour", a assuré Valérie Pécresse, convaincue de "gagner cette élection présidentielle".
Pourtant, alors que le parti LR avait resserré les rangs au lendemain de la victoire de Valérie Pécresse lors du congrès, la porosité entre la droite et l'extrême-droite n'a jamais semblé aussi flagrante. Un mois après, des micro-partis comme le Mouvement conservateur de Laurence Trochu ou le groupe Via de Jean-Frédéric Poisson, la défection de Guillaume Peltier est la plus importante prise de guerre de Reconquête à la droite traditionnelle.
Mais il ne s'agit pas de la première, même en Centre-Val de Loire. En octobre, puis en novembre, de jeunes adhérents LR comme Spike Groen, le maire de Saint-Gilles dans l'Indre ou l'ancien responsable des jeunes LR du Loiret, Valentin Blelly ont rejoint le parti du polémiste d'extrême-droite, sans forcément renier leur liens avec Les Républicains.