Violences conjugales : l'aide financière pour les victimes entre en vigueur ce 1ᵉʳ décembre

Toute victime de violences conjugales pourra bénéficier, à partir de ce 1er décembre, d'une aide financière lui permettant de quitter rapidement son foyer ou de se mettre en sécurité. Une aide de 600€ en moyenne qui variera en fonction des revenus des personnes.

"Accompagner un nouveau départ". À partir du 1er décembre, une aide d'urgence pour les femmes victimes de violences conjugales va être déployée sur tout le territoire français, a annoncé Aurore Bergé, ministre des Solidarités et des Familles au micro de France Inter

Adoptée en février par le parlement, cette aide ira de 243 à 1337€, pour une moyenne de 600€. Un montant qui variera en fonction des ressources de la personne, de si elle a des enfants ou non et de leur nombre. Ce versement sera fait en une seule fois en trois à cinq jours. "Ce n’est pas juste une aide financière. C’est être accompagnée, soutenue, avoir l’ensemble des services de l’État qui se mettent à sa disposition" ajoute la ministre.

Partir... pour revenir

Versée par les caisses d’allocations familiales (CAF), cette aide financière a été mise en place pour permettre aux victimes de fuir leur compagnon violent. "C’est une réponse pratique et opérationnelle à des difficultés que connaissent parfaitement les associations et les professionnels qui accompagnent les femmes victimes de violences qui souvent, se retrouvent dans l’impossibilité matérielle de se séparer de leurs conjoints car elles n’ont pas de ressources financières, ni de logement…" nous apprend Caroline Janvier, députée de la 2e circonscription du Loiret (Renaissance), "pour garantir que le départ soit un départ réel et qu’elle ne retourne pas au domicile." renchérit Aurore Bergé.

"Une femme victime de violence va faire 7 allers-retours avant de prendre la décision de vraiment partir."

Caroline Janvier, députée de la 2e circonscription du Loiret (Renaissance)

"On voit quotidiennement des allers-retours" affirme Ynaée Benaben, cofondatrice et directrice générale de l’association En avant toute(s).

Les raisons sont l’emprise, parfois le harcèlement... "On a des femmes au quotidien qui nous disent "je retourne avec lui sinon je n’ai pas la paix." Dernièrement, une jeune fille subissait 20 à 30 appels par nuit de la part de son ex. Quand elle est venue nous voir elle nous a dit "J’ai besoin de dormir, je vais me remettre avec lui car je n’ai pas dormi depuis 15 jours." 

Selon la directrice de l'association, le problème majeur est le manque de moyens financiers. "L’hébergement est une très grande difficulté en France pour les femmes victimes de violence, sous capacité de réponse aux besoins. Elles passent par la rue, des foyers qui sont trop difficiles… Donc elles retournent chez leur ex parce que ça leur semble moins difficile, et tout ça est lié à des difficultés économiques."

"Il y a des femmes qui sont sous la dépendance financière de leurs maris et qui supportent ces violences car elles ont des enfants et qu’elles savent qu’elles ne peuvent pas financièrement partir. C’est un moyen de les aider et de les encourager au début," complète Stéphanie Rist.

Le coût des violences est énorme. Parfois partir c’est la seule manière d’être en sécurité, de survivre.

Ynaée Benaben, co-fondatrice et directrice de l’association En avant toute(s)

"Aujourd’hui ce sont les femmes qui assument les coûts des violences. Ce sont elles qui déménagent, ce sont elles qui rachètent des meubles, ce sont elles qui changent d’emplois, de villes…"

En 2022, 244 300 victimes de violences conjugales ont été recensées et 118 femmes sont mortes sous les coups de leur compagnon, ce sont donc une femme qui décède tous les trois jours suite à ces violences. Des femmes n’ont parfois pas les moyens de rejoindre leur famille, de trouver un logement… Cette aide est "une première réponse pour organiser son départ" précise le site de la CAF.

Encourager les victimes à porter plainte

Petite précision, pour pouvoir bénéficier de cette aide financière, quelques critères sont prérequis. La CAF précise que les violences doivent être attestées d’un document datant de moins de 12 mois à la date de la demande comme un dépôt de plainte, une ordonnance de protection ou encore un signalement au procureur de la République. La personne peut être en couple ou déjà séparée de son partenaire sous réserve que les violences aient eu lieu moins d’un an avant la demande. 

Il faut donc se rendre dans un commissariat au préalable pour obtenir cette aide, un acte que beaucoup ont du mal à accomplir. Un quart seulement des victimes portent plainte, un chiffre qui a augmenté de 15% en 2022 par rapport à 2021 selon les forces de l'ordre. L'objectif de cette aide, les encourager à entamer des procédures judiciaires. "J’espère que cette aide aidera les femmes à aller porter plainte.", nous confie Stéphanie Rist, députée de la 1ere circonscription du Loiret (Renaissance), pour qui cette mesure est "très concrète et indispensable". "Je préfère voir le chiffre de dépôt de plainte augmenter, parce que les femmes ont moins peur d’aller porter plainte plutôt que l’inverse" ajoute la députée. 

Pour Ynaée Benaben, le travail doit être fait aussi du côté des CAF, en charge de l'attribution de cette aide. "On ne peut pas dire à une femme "vous devez porter plainte sinon vous n’y aurez pas droit." Il y a une pédagogie à avoir. Un dépôt de plainte ça engage pleins de choses."

Le "pack nouveau départ", la solution miracle ?

En plus de cette aide financière, le gouvernement lance un "pack nouveau départ", déjà en test dans plusieurs départements de France, et étendu dans toute la France pour fin 2025. Il s'agit d'une expérimentation pour mieux coordonner la prise en charge des femmes victimes de violences conjugales. Avec ce dispositif, le gouvernement entend créer un interlocuteur unique dans chaque département pour déclencher les aides. Et cet interlocuteur n'est autre que la Caisse d'Allocations Familiales. 

Des guichets permettront de répondre à plusieurs difficultés : ouvrir un compte bancaire, nouveau domicile pour le courrier, prestations familiales… Pour la fondatrice de l'association En avant toutes, l'initiative est bonne mais doit être travaillée. "Le plus important c’est de nous mettre en lien avec les structures. On appelle à ce que ces attributions soient faites avec les associations. Qu’on nous fasse confiance, qu’on écoute nos recommandations."

Pour Ynaée Benaben, le but est tout d'abord de réussir à centraliser les démarches. "Il faut que les associations soient pensées dans le pack et qu’elles soient des maillons de cette politique. La justice ne regardera que la justice, la police que la police, la CAF que le côté des aides ou du cadre familial, les associations ont le regard global d’accompagnement social."

"Nous n’avons pas de feuille de route cohérente qui harmonise une politique pour l’égalité et la lutte contre les violences. C’est ce vers quoi on tend mais on n’y est pas encore." conclut la directrice. 

L’association a mis en place un tchat en ligne sur le site commentonsaime.fr. Ici, toute personne victime de violences peut parler anonymement en ligne avec un professionnel qui répondra à leur question, à l’heure où le numérique prend une place de plus en plus importante, notamment chez les jeunes, alors que 1 jeune femme sur 7 de moins de 25 ans est victime de violences conjugales. 

Pour faire face à toutes les formes de violence, se traduisant par des excès psychologiques, physiques ou sexuelles, plusieurs numéros d’urgences sont mis à disposition comme le 3919, service spécialisé dans les violences faites aux femmes ou encore les 116 006 de l’association France Victimes. 

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