Avec une centaine de cas recensés en 2022, la Corse fait apparemment partie des "bons élèves" en ce qui concerne les violences conjugales, et plus généralement celles faites aux femmes. En 2022, on recensait tout de même plus de 150 affaires, et plusieurs féminicides sont venus défrayer la chronique ces dernières années... Ce mardi à 20h45, en compagnie d’un scientifique, d’une avocate et d’une psychologue, Luc Mondoloni nous propose une plongée au cœur des violences faites aux femmes.
Quelques chiffres clés à découvrir dans cette vidéo :
C’est difficile de l’admettre, mais de toutes les espèces vivant sur cette terre, l’espèce humaine est la seule qui, de loin, se montre la plus agressive vis à vis du sexe féminin, la seule à pratiquer des viols de masse, à torturer ses semblables…
Les invités de Luc Mondoloni combattent ce fléau, cherchent à comprendre, à défendre, à prévenir...
Photos et vidéos à l’appui, ils évoqueront leurs combats, leurs moments de doute, de souffrance, d’euphorie, de questionnement…
3 professions pour une vocation.
- Jean Mariani : neurobiologiste originaire de Venaco, il est le directeur de l’Institut de la longévité et un des spécialistes mondiaux du vieillissement.
À l’occasion de la sortie de son nouvel ouvrage, le 14 mars, "Sexe et Violence, ce que le cerveau a à nous dire", il a accepté de venir nous livrer quelques découvertes en exclusivité. - Janine Bonaggiunta : originaire de Corte, elle est avocate au barreau de Paris depuis 1985. C’est là qu’elle a créé un cabinet d’avocats spécialisés en violences conjugales.
Elle s’est distinguée dans de nombreux dossiers emblématiques : Valérie Bacot, Alexandra Lange, Jacqueline Sauvage… - Coralie Marini-Sterenzy : psychologue clinicienne à Bastia et psychothérapeute, elle est aussi la maman d’un fille victime d’abus sexuels.
Explication scientifique des comportements, défense et accompagnements des victimes, nous allons nous intéresser aux 3 domaines de prédilection des invités de l'émission.
La science pour mieux comprendre
Dans son dernier ouvrage "Sexe et violences", le neurobiologiste Jean Mariani tente d'expliquer de façon rationnelle les mécanismes qui amènent ce type de comportement violent.
Les facteurs historiques et sociologiques tout d'abord.
Le poids de 2000 ans de patriarcat, d'une domination masculine et d'une sexualité féminine réprimée et méprisée pèse évidemment énormément.
Cependant, les luttes féministes et la révolution sexuelle du XXe siècle sont venues se confronter à cet état de fait. Ces 5 dernières années, #metoo a accéléré le phénomène, dénonçant des comportements et des actes qui restaient tus jusque-là, et, malgré quelques excès, l'impact de ce mouvement a permis le recul du patriarcat, qui résiste toutefois encore...
La physiologie ensuite, et en particulier l'étude de certaines zones du cerveau, permet également de comprendre l'origine de ces comportements.
La "plasticité" cérébrale permet à tous d'intégrer l'influence des facteurs génétiques et socio-culturels de l'environnement des individus, permettant de réfléchir à la distinction inné-acquis.
Pour Jean Mariani, dans la formidable machine qu'est notre cerveau, qui compte plus de 100 milliards de neurones, il existe un centre spécialisé qui contrôle à la fois sexe et violence.
Partant de ce postulat, des études pourraient permettent un éclairage et un nouvelle façon d'aborder et de prévenir les violences, laissant l'espoir de "guérir" les victimes, mais aussi peut-être les bourreaux, considérant de façon novatrice que les violences sexuelles ne sont pas une fatalité...
La défense des victimes
Selon le Ministère chargé de l'égalité entre les hommes et les femmes, de la diversité et de l'égalité des chances, 125 840 femmes ont été victimes de violences conjugales en 2019 et 1 femme décède tous les 2 jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint. Défendre les femmes, c'est la voie que Janine Bonaggiunta a choisie...
Et ce sont ses clientes qui l'ont rendue célèbre. Elles s'appellent Jacqueline Sauvage, Valerie Bacot, Alexandra Lange... Toutes en ont eu assez des coups, de l'humiliation, de l'emprise et, un jour, ont dit stop en commettant l'irréparable... Plus que leur avocate, elle est devenue un véritable porte-voix.
Écoutez son témoignage, en 2021, dans magazine "Avec ou sans Filtre", dans lequel elle raconte ses premiers procès pour la cause des femmes battues, et l'une de ses premières grandes victoires, l'affaire Alexandra Lange, il y a près de 15 ans :
L'écoute et l'accompagnement des victimes
Les premiers problèmes sont inhérents à l'écoute "littérale" des victimes, au moment où elles subissent violences et sévices. À ce titre, l'exemple de Julie Douib, assassinée en 2019 par son compagnon, qui vient d'être jugé et condamné à perpétuité, est parlant, comme l'explique son père...
"Il y a eu beaucoup de plaintes. Tout le système était au courant. Moi-même, j’ai porté plainte cinq ou six fois. Ma fille a également porté cinq ou six fois plainte avec justificatifs de coups, certificat médical, lettres de témoignages".
La première remise en cause nécessaire semble donc être celle de l'appareil judiciaire, même si les instances assurent que toute les plaintes reçoivent une suite pénale.
Elles ont toutefois pris conscience de la nécessité de l'orientation des victimes vers des personnels spécifiquement formés et compétents dans ce contexte très particulier...
En Corse, pour mieux mesurer l'impact de ces violences, un observatoire territorial des violences faites aux femmes a été mis en place fin 2021. Son objectif est de susciter une prise de conscience, de renforcer les connaissances sur ces phénomènes et d'apporter des réponses aux question des victimes...
Au-delà de la prise en compte médicale de ces victimes, qu'elle soit publique, au sein des établissement hospitaliers, ou privée, comme c'est le cas pour les psychothérapeutes spécialisés, le rôle des associations est lui aussi fondamental, à la fois dans l'accompagnement, mais aussi à un autre niveau, celui de la prise de conscience publique.
Exemple avec Mylène Jacquet, présidente de l'association "Savannah", du nom de sa fille, victime d'un féminicide en 2016. Elle témoigne dans le magazine "Donna Hè", diffusé samedi dernier sur ViaStella, et que vous pourrez revoir ce vendredi 24 février à 23h50. Dans cet extrait, vous pourrez découvrir son action de sensibilisation auprès des jeunes corses :
Informations utiles :
La plateforme de signalement des violences sexuelles et sexistes
Le ministère de l'Intérieur a créé la plateforme de signalement en ligne des violences sexuelles et sexistes qui prend en compte les violences conjugales.
Elle permet aux victimes et aux témoins d’échanger en direct et en toute discrétion avec un policier ou un gendarme spécialement formé à ces violences, 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Le portail est ouvert à toutes et tous à l’adresse : https://arretonslesviolences.gouv.fr
Les contacts des associations de lutte contre les violences figurent également dans ce site.
Les numéros 3919 & 0800.400.235
Le 3919 Violence Femmes Info constitue le numéro national de référence pour les femmes victimes de violences (conjugales, sexuelles, psychologiques, mariages forcés, mutilations sexuelles, harcèlement...), et leurs entourages. Il propose une écoute, il informe, il oriente vers des dispositifs d'accompagnement et de prise en charge.
Ce numéro garantit l'anonymat des personnes appelantes mais n'est pas un numéro d'urgence comme le 17 ou le 114 qui permettent, en cas de danger immédiat, de téléphoner à la police ou la gendarmerie.
En Corse, vous pouvez également joindre le 0800.400.235, 24H/24-7J/7.