La question de l’autonomie de la Corse, longtemps taboue à droite, est sur toutes les lèvres des candidats à la primaire. Mais parlent-ils vraiment de l’autonomie, au sens où l’entend la Constitution française ?
Autonomie et séparation
Pour Alain Juppé, qui était invité à l’antenne de France 3 Corse ViaStella en octobre, « l’autonomie existe, la Corse a un statut particulier depuis des années et des années. […] il ne faut pas avoir peur de ce mot, qui n’est pas nouveau. L’autonomie n’est pas la séparation »En visite sur l’île, Nicolas Sarkozy renchérit : « Je pense qu’il faut faire confiance aux Corses, qu’il faut donner davantage d’autonomie à la Corse. »
Bruno Le Maire est plus prudent. Ce lundi, il s’est dit « confiant » sur le développement économique de la Corse, sur la collectivité unique mais n’a pas manqué de préciser qu’il croyait aussi dans « les liens avec le continent et la continuité territoriale ».
Sens
Mais que signifie cette autonomie, que la plupart des candidats à la primaire de la droite et du centre considèrent établie, déjà existante ?
Dans l’hémicycle de l’Assemblée de Corse, aucun groupe, ni les nationalistes ni la gauche, ni la droite insulaire n’estiment avoir un statut d’autonomie.
Le concept est-il utilisé abusivement ? Pour André Fazi, politologue: « on peut défendre diverses versions de l’autonomie mais la Constitution française en présente bien une qui est très exigeante et restrictive, suivant laquelle certaines collectivités d’outre-mer sont autonomes, parce qu’elles peuvent intervenir dans le domaine de la loi : ce sont elles qui font les règles à la place du Parlement et ces règles peuvent favoriser la population locale en terme d’emploi, d’installation économique ou de protection du patrimoine foncier. »
« Je ne pense pas que ce soit cette conception-là qui soit aujourd’hui défendue par les candidats de la primaire de la droite », estime l’universitaire.
Constitution
En France, seuls les pays d’outre-mer sont effectivement reconnus autonomes. Les indépendantistes polynésiens en visite récemment en Corse dénoncent eux, une autonomie sans attributs. Sur le papier, ils ont au moins le pouvoir de légiférer, de lever l’impôt, d’adapter le droit du travail. Les deux premiers points sont communs à toutes les autonomies régionales d’Europe occidentale.
« Je pense qu’on en est très loin et notamment en matière fiscale parce qu’il faut quand même se rappeler qu’historiquement la première fonction des représentants du peuple c’est de consentir à l’impôt. », estime André Fazi.
« Et sans pouvoir adapter les règles fiscales en fonction des situations régionales comme celles de la Corse par exemple, il n’y a pas de véritable autonomie qui soit concevable », ajoute le politologue.
Impôts
Les statuts particuliers de la Corse ont toujours été adoptés sous la gauche mais jamais avec un gouvernement impopulaire. Le voudrait-il, le gouvernement actuel ne serait pas en mesure de proposer une réforme de la Constitution sur l’autonomie de la Corse.
Pour l’instant les élus insulaires se content de collectivité unique, en-deçà de leurs objectifs, octroyée par ordonnance.
A ce titre, Bruno Le Maire s’est montré plus prudent que ses adversaires à la primaire. Ce lundi, il s’est dit « confiant » sur le développement économique de la Corse, sur la collectivité unique mais n’a pas manqué de préciser qu’il croyait aussi dans « les liens avec le continent et la continuité territoriale ».
En 1975, lors que les deux départements corses avaient été créés, l’un des objectifs était de combattre l’idée d’autonomie. La collectivité unique les fait disparaître. A suivre.