"Ce soir de février 2016, j'ai tout perdu." À la veille du procès devant la cour d'assises de Reims, retour sur l'affaire Maxime Beux

Le 13 février 2016, Maxime Beux perdait un œil, à la suite d'incidents en marge d'un match de football opposant Reims à Bastia. Le policier accusé de l'avoir éborgné sera jugé aux assises de Reims du 4 au 7 octobre prochain. Plus de six ans après les faits, Maxime Beux attend sa condamnation.

Plus de six ans après les faits, Maxime Beux dit attendre avec "fermeté, mais sérénité" que justice lui soit enfin rendue. 

Le 4 octobre s'ouvrira le procès devant la cour d'assises de Reims du policier accusé de l'avoir éborgné, ce soir de février 2016, au sortir d'un match de football opposant les Rémois aux Sporting club de Bastia. Un procès d'assises prévu sur quatre jours, et pour la tenue duquel le jeune homme et son conseil ont longtemps bataillé.

La faute à une très longue instruction, retrace Me Benjamin Genuini, son avocat : "Ce dossier, il était très mal parti, avec des policiers responsables de l'opération policière qui a conduit à la blessure de Maxime qui ont eux-mêmes mené les investigations pendant plusieurs jours, avant que l'IGPN (inspection générale de la police nationale), puis un magistrat instructeur, soit saisi du dossier. Il y a eu ensuite cette thèse abracadabrantesque du policier qui est accusé, d'une chute sur un poteau. Et pour écarter ce mensonge énorme et éhonté, il a fallu du temps."

Du temps pour entendre tous les témoins potentiels, détaille-t-il, pour organiser une contre-expertise médicale, réalisée par "deux collèges de médecins experts et qui ont pu écarter cette thèse absurde".

Du temps aussi, trois ans, avant la mise en examen du policier rémois, la tenue d'une confrontation et d'une reconstitution des faits.

Du temps enfin pour que l'accusé ait épuisé "toutes les voies de droit pour essayer d'éviter ce procès d'assises. C'est fait désormais, et il se tiendra bien."

En six années, le dossier "a considérablement changé", estime Me Benjamin Genuini. Lui en est convaincu : "aujourd'hui, nous avons, et la juridiction a toutes les cartes en main pour aller dans le sens de la vérité." Et l'espoir pour Maxime Beux d'obtenir, enfin, cette condamnation du policier qu'il espère depuis le premier jour. "C'est la seule chose que je puisse attendre de la justice."

Son œil perdu, et toutes ces années de combat pour se faire reconnaître en tant que victime, "rien, pas même une décision de justice ne pourra me les rendre. Ce soir-là, j'ai tout perdu."

Avoir une condamnation d'un policier aux assises, ce qui est quand même quelque chose qui n'est pas évident et peu courant, me permettrait de faire le deuil plus facilement de ce qui s'est passé.

Maxime Beux

Aujourd'hui âgé de 29 ans, il déplore, outre sa blessure, le traitement médiatique de l'affaire, pour laquelle il estime avoir été "catalogué" comme un supporter bastiais. "Ce que je suis, je ne le nie absolument pas. Mais d'être pendant des années catalogué uniquement comme ça, pour un jeune de 22 ans qui se lance dans la vie... Ça, aucune décision de justice ne pourra me le rendre."

Néanmoins, conclut-il, réussir "à avoir une condamnation d'un policier aux assises, ce qui est quand même quelque chose qui n'est pas évident et peu courant, me permettrait de faire le deuil plus facilement, si j'ose dire, de ce qui s'est passé."

Deux versions qui s'opposent

Pour rappel, cette nuit du 13 février 2016 Maxime Beux, en compagnie d'autres supporters, fait le déplacement à Reims pour soutenir le SC Bastia, dans le cadre de la 26e journée de Ligue 1.

La rencontre se clôture sur une victoire 1-0 pour le SCB. Mais très vite, la soirée de célébrations dégénère. Des incidents entre forces de l'ordre et "Ultras" se déclarent dans le centre-ville rémois.

Deux récits des événements s'opposent : le premier présente des Ultras "provocants", violents, et chantonnant des "slogans fascistes", forçant les forces de l'ordre à charger pour ramener le calme, puis à escorter les bus des supporters hors de la ville.

Le second dresse une toute autre réalité : selon le club de supporters Bastia 1905, ce serait des forces de police "surexcitées et armées", qui auraient "décidé de charger sans discernement ni maîtrise".

La soirée se clôture avec l'interpellation et le placement en garde à vue de neuf supporters bastiais. Plusieurs sont blessés, dont un gravement : Maxime Beux, alors âgé de 22 ans, qui perd son œil.

Mais là encore, les raisons de cette blessure ne sont pas les mêmes entre la partie civile et la défense. Maxime Beux assure avoir été victime de violences policières. Selon lui un tir de flashball ou un coup de matraque serait à l’origine de son infirmité permanente. Le policier incriminé a quant à lui toujours affirmé que le supporteur corse, déséquilibré par un coup à l'épaule, était tombé tête la première sur un poteau alors qu'il tentait de s'enfuir.

Une version qui a été invalidée trois fois : par le juge d'instruction en charge de l'affaire, par la chambre de l'instruction et par la cour de Cassation, en novembre dernier. Une affaire sur laquelle la cour d'assises de Reims sera donc amenée à trancher le 7 octobre prochain, jour annoncé du verdict.

Les avocats de la défense n'ont pas donné suite à nos sollicitations.

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