Les services sociaux de la collectivité de Corse ont déposé un préavis de grève unitaire pour le 13 février, pour dénoncer la dégradation des conditions de travail et le manque de moyens affectés à la protection de l'enfance dans l'île. Des négociations sont en cours avec l'Exécutif.
Déficit de moyens, surcharge de travail et manque de places dans les structures d'accueil : à l'appel de l’intersyndicale, les agents des services sociaux de la collectivité de Corse observeront une grève reconductible de 24 heures à partir du 13 février.
Ils entendent ainsi dénoncer la dégradation "exponentielle" de leurs conditions de travail depuis le début de la crise sanitaire et réclamer des moyens supplémentaires au Conseil exécutif. Les négociations, en cours depuis une semaine, n'ont pour le moment pas porté leurs fruits.
Cela fait plusieurs semaines que la crise couve au sein des services affectés à la protection de l'enfance : le 4 février dernier, les syndicats avaient déjà réclamé l'extension des capacités d'accueil lors d'une entrevue en visioconférence avec les services administratifs et les élus de la Collectivité de Corse.
"On manque cruellement de place pour les enfants, on ne sait pas où les placer, expliquait Aurelia Bastiani du Syndicat des travailleurs corses (STC) en amont de la réunion du 4 février. On a l’impression de faire de la maltraitance (institutionnelle) à des enfants maltraités."
Disons-le clairement, les enfants en danger qui habitent en Corse ne seront plus protégés.
— Lyes Louffok (@LyesLouffok) February 2, 2021
Rien qu'en janvier 2021, le nombre d'#EnfantsPlacés a presque atteint le total de 2020.
Le système sature, il n'y a plus de places, et cela ne dérange personne ?https://t.co/zmJbVQMf2z
Le constat de ce manque de moyen était alors partagé par Bianca Fazi, conseillère exécutive en charge des affaires sanitaires et sociales, qui avait reconnu un "problème de places sur l'aide sociale à l'enfance" sur l'île, alors que le nombre d'enfants dont le parquet a ordonné le placement a explosé au cours de l'année 2021 : depuis le début de cette année, on en compte ainsi 28, contre 39 sur toute l'année 2020.
Une nouvelle réunion s'est tenue ce mercredi 10 février à Corte entre les syndicats, des représentants de l'administration et de l'exécutif. "Plusieurs propositions ont été faites au niveau des ressources humaines et du recrutement, le dialogue est quand même constructif", reconnaît Patrick Clemenceau-Fieschi, délégué de la section STC de la CdC.
Mais sur la question des moyens matériels, le bât blesse : ceux-ci sont ainsi jugés insuffisants pour répondre aux besoins grandissants de placement. "Les lieux de vies manquent, plusieurs sont insalubres ou dégradés, explique Patrick Clemenceau-Fieschi. Et la construction d'un centre d'accueil peut prendre au moins 5 ou 6 ans."
"Cela fait des années que ça dure, il n'y a jamais eu d'anticipation, abonde Aurelia Bastiani. La crise sanitaire a porté le coup de grâce."
Recruter et ouvrir des structures d'accueil
Dans un courrier adressé ce lundi au président du Conseil Exécutif, l'intersyndicale CGT, STC, FO, CFDT, SNT a réclamé l'augmentation du nombre de places d’accueil, via l'établissement de nouvelles conventions avec les structures d’accueil existantes et la revalorisation du métier d’assistante familiale et la création de places d'accueil "adaptées aux besoins du territoire".
Pour pallier au manque de personnel, l'intersyndicale réclame également le recrutement rapide d’agents afin de remplir les fonctions "indispensables au bon fonctionnement des services", le raccourcissement des délais de recrutements et l'ouverture en externe de postes de sécrétaires, éducateurs spécialisés, de technicien de l'intervention sociale et familiale et d'éducateur de jeunes enfants.
L'intégralité des "droits et moyens" réclamés par l'intersyndicale au Conseil Exécutif :
- Augmenter le nombre de places d’accueil en passant de nouvelles conventions avec les structures d’accueil existantes, en revalorisant le métier d’assistante familiale.
- Recrutement rapide d’agents pouvant remplir les fonctions indispensables au bon fonctionnement des services.
- Titularisations d'un poste d'instructeur et de tarificatrice ESSMS
- Création d’un comité de dialogue social (agents, encadrants et directions)
- Commande d’un audit externe organisationnel (Organigramme, procédures managériales) de la DGA des affaires sociales et sanitaires.
- Création et mise en œuvre d’une cellule d’aide psychologique pour lutter et prévenir les risques psycho-sociaux.
- Création d’un comité de suivi (administrations – représentants des personnels – syndicats) spécifique à la protection de l’enfance et au social en général.
La grève ayant été annoncée comme reconductible, le conflit pourrait se prolonger en cas d'échec des négociations.