Le champion de kick-boxing, Cyril Cereyon, comparaît depuis le 20 janvier devant la cour d’Assises de Corse-du-Sud. Il est accusé du viol de Loriane S. Ce lundi, l’avocate générale a requis 6 ans de prison à son encontre.
De la pédagogie. En entamant ses réquisitions, l’avocate générale rappelle à la cour et aux jurés son rôle : « établir que Cyril Cereyon a commis ce viol et d’établir la peine la plus juste. » Depuis le 20 janvier, cet Ajaccien d’une trentaine d’années, est accusé du viol de Loriane S qui serait survenu dans la nuit du 12 au 13 septembre 2017.
Selon la plaignante, l’acte se serait déroulé sur un canapé, dans le logement de l’accusé où est organisé un after après une soirée commencée quelques heures plus tôt au port de l’Amirauté à Ajaccio. Loriane S serait alors dans un état d’ivresse avancé, « au bord du coma », selon certains témoignages. Si pendant quatre ans, Cyril Cereyon nie les faits, au deuxième jour du procès, il indique avoir « une image » des événements. Il dit se voir dans la salle de bain, dans une relation sexuelle consentie avec Loriane S. Il est assis sur la margelle, la plaignante est au dessus de lui.
Toujours pédagogue, l’avocate générale lit l’article 222-23 du code de procédure pénale : « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol. Le viol est puni de quinze ans de réclusion criminelle. »
Pour la représentante du ministère public, dans le dossier, les actes supposés sont caractérisés. « Les rapports gynécologiques montrent qu’il y a eu pénétration, et je vous demande également de retenir la contrainte et la surprise. Il y a ici, une disproportion des forces, Loriane S ne pouvait plus bouger, et à cause de l’alcool, elle était dans un état d’inconscience. »
Consensus
Quant au déroulé de la soirée, l’avocate générale rappelle qu’il y a un consensus entre les divers témoignages. Un consensus établit jusqu’à 6 heures du matin ce 13 septembre 2017. « Le petit groupe a commencé la soirée au lodge, continue au roof top. Et à la fermeture de la boîte de nuit, le groupe se met d’accord et se dirige vers le domicile de Cyril Cereyon et de sa compagne pour prolonger la fête. » La fête continue donc, mais Loriane S se sent mal, elle vomit, est placée dans un hamac se trouvant dans la loggia de l’appartement, en tombe, et passe une partie de la soirée au sol, un coussin placé sous sa tête et une couverture sur le corps. A 6 heures, le groupe d’amis part, Loriane S, elle, reste sur place avec Cyril Cereyon et sa compagne.
Selon les déclarations de la plaignante, « au petit matin, elle se trouve sur le canapé, raconte l’avocate générale. Elle dit qu’à ce moment, Cyril Cereyon a essayé de m’embrasser, m’a touché à divers endroit du corps. Et il la pénètre, elle essaye de se débattre et puis sont corps la lâche. Elle dit avoir le visage enfoncé dans le canapé et elle lâche prise. » Pour la représentante du ministère public, cette déclaration est la seule valable, la seule « qui est répétée dans les mêmes termes à longueur d’auditions. Et quatre ans après, elle répète encore la même chose. »
Le « flash » décrit par Cyril Cereyon. L’avocate générale demande aux jurés de « ne pas le considérer ». « Il n’y a aucun élément pour vérifier ces dires. C’est très étonnant que ce flash arrive à ce moment là. On nous parle du fruit d’un travail d’introspection alors que Cyril Cereyon a arrêté sa thérapie depuis un certain temps », commente-t-elle.
Elle réclame six ans d'emprisonnement à l'encontre de l'accusé et son inscription au fichier des auteurs d'infraction sexuelle.
« Quel intérêt a-t-elle de l’accuser à tort ? »
Depuis le début du procès, Loriane S a le regard dans le vide. Parfois, elle tombe dans les bras de sa mère ou de sa sœur, en pleurs. Ses jambes ne cessent de s’agiter. « Quel intérêt a-t-elle d’accuser Monsieur Cereyon à tort ? Quel intérêt a-t-elle de s’infliger tout ça dans une salle qui lui est hostile ? », interroge Maître Saveriu Felli, avocat des parties civiles.
Selon lui, pour voir la vérité apparaître dans ce dossier il suffit de reprendre les faits de manière chronologique. « Pourquoi part-Elle aussi tôt du domicile de Cyril Cereyon ? A 8h30, c’est qu’il y a eu un problème. De retour chez son amie, elle est décrite comme prostrée, anéantie, elle pleure. Ce n’est pas l’état de quelqu’un qui vient d’avoir une relation sexuelle consentie. Cyril Cereyon sait maîtriser un individu sans faire preuve de violence. Sa simple force a suffi », déclare-t-il.
L’avocat insiste : « L’experte psychologique affirme que Loriane S présente les symptômes typiques de quelqu’un qui a été victime d’un viol. Elle n’a pas de trouble de la personnalité. Sa vie a changé à partir de cette soirée, cela concerne sa relation avec les hommes, elle n’a pas réussi à concrétiser ses projets professionnels. Elle vit de petits boulot, car elle est souvent en arrêt maladie, elle n’arrive pas à se concentrer, ne peut pas travailler avec des hommes. »
Maître Saveriu Felli demande d’entrer en voie de condamnation contre Cyril Cereyon. « Loriane S s’est admirablement battue, la Justice lui doit ça », conclut l’avocat.
Vers une grave erreur judiciaire ?
Pour la défense, « il n’y a pas l’ombre d’une preuve » d’un viol. Les rapport gynécologique prouvent « une relation sexuelle consentie. Le kit de viol revient négatif. Où est la violence dans ce dossier, où est la menace ? »
Selon Maître Virginie Blondio-Mondoloni, la scène décrite par Loriane S, d’un supposé viol sur le canapé, « est tout simplement impossible ». « Il s’agit d’un canapé deux places avec des accoudoirs relevés, Cyril Cereyon mesure 1m96, c’est impossible qu’il puis s’allonger de tout son long sur une surface aussi petite.»
Si Cyril Cereyon est condamné, l’avocate brandit le risque de commettre « une grave erreur judiciaire ». Une idée partagée par sa consoeur Maître Anna-Maria Sollacaro. « J’ai peur de la catastrophe judiciaire », exprime-t-elle. Elle s’interroge sur les motivations qui auraient pu conduire la plaignante à accuser son client de viol : « A-t-elle besoin d’attention ? Y a-t-il une volonté d’appeler au secours ? Mais ce n’est pas aux Assises que l’on se reconstruit. Les Assises ça vous meurtrit », lâche-t-elle.
Pour les deux avocates, la culpabilité n’est pas établie, elles réclament l’acquittement de Cyril Cereyon. L’accusé est le dernier à prendre la parole. En s’adressant à la cour et aux jurés, il demande d’une voix calme, et faible : « Ne m’envoyez pas en prison, rendez-moi ma vie. Je suis innocent. »