Fièvre catarrhale en Corse : les éleveurs demandent à l'État d'agir face à la propagation du virus

À la suite du retour de la fièvre catarrhale dans l'île, une réunion de crise s'est tenue ce mercredi à Ajaccio, en présence des services de l'État et des représentants de la filière agricole. L'apparition d'un nouveau variant pourrait provoquer des mortalités beaucoup plus importantes sur les ovins. Les agriculteurs demandent notamment une prise en charge financière intégrale de la campagne de vaccination.

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C'est une maladie que redoutent les éleveurs : deux ans après les derniers cas, la fièvre catarrhale ovine est de retour en Corse.

Selon la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF), seize troupeaux de brebis ont été officiellement contaminés pour l'instant, principalement dans le sud de l'île. Des analyses sont toujours en cours concernant d'autres élevages.

Selon nos informations, des centaines de bêtes seraient touchées par cette nouvelle épizootie faisant apparaître un nouveau variant qui inquiète les éleveurs.

Ce mercredi 15 novembre, une réunion de crise s'est donc tenue dans les locaux de la DRAAF, à Ajaccio.

Des représentants des chambres régionales d'agriculture, de l'Odarc, de l'interprofession laitière ovine caprine corse (Ilocc) ainsi que plusieurs éleveurs ont été reçus par les services de l'État.

"Il faut que l’on puisse répondre aux gens qui ont perdu leur capital de bêtes, savoir qu’est-ce qu’on va leur apporter comme solutions financières immédiates pour qu’ils puissent s’en sortir", indique Jean-Louis Paoli, président de l'Ilocc.

Les représentants de la filière pointent "la responsabilité de l'État" quant à la propagation du virus :

"Si on en est là aujourd'hui, c'est parce qu'il est avéré que la responsabilité de l'État est engagée sur la crise que l'on traverse au niveau de la fièvre catarrhale, avance Jean-Louis Paoli. La Corse était indemne au niveau du sérotype 8 qui est aujourd'hui très présent sur la Corse-du-Sud. Il est donc de la responsabilité de l'État de prendre en compte notre demande par rapport à cela. C'est venu de la France, apparemment du Var. Le fait d'avoir aujourd'hui ce virus présent, qui est extrêmement virulent et se propage très vite, met en grand danger notre cheptel."

Contacté, Pierre Bessin, le directeur régional de la DRAAF de Corse, indique : "Il y a un principe de libre circulation des biens et des personnes. Certes, les animaux malades n'ont pas la permission de circuler mais on ne peut pas tout contrôler. Les contrôles ne sont pas obligatoires."

Pour se prémunir contre cette pathologie surnommée "la maladie de la langue bleue", il existe un vaccin qui n'est pas obligatoire. Lors de cette réunion, les représentants de la filière agricole ont aussi mis en avant le fait que la vaccination ne soit pas remboursée.

"Quand vous n’avez pas d’argent pour payer les aliments, comment voulez-vous que l’on puisse dire à des gens : vous n’avez pas vacciné vos bêtes ? Ils n’ont pas d’argent pour alimenter leurs troupeaux, ils ne peuvent donc pas acheter des vaccins. Il faut donc qu'il y ait aussi une prise en charge du vaccin. En tout cas, cela fera partie des propositions pour que l’on puisse protéger nos troupeaux normalement. Le traitement de la mouche, c’est aussi à l’État de le faire."

Pendant cette réunion, il a été signifié par les services de l'État que l'éradication de la maladie n'étant plus une priorité, aucune aide n'est plus prévue. En clair, si aide il y a, celle-ci sera dérogatoire.

"Cette réunion est un appel au secours ; nous en sommes à nous demander si nous pouvons continuer à élever des brebis et des chèvres en Corse, déplore Joseph Colombani, président de la Chambre d'agriculture de Haute-Corse. Nous n’en sommes plus à sauver l’agriculture, l’exploitation, nous en sommes à sauver le berger et sa famille. C’est trop. Chacun doit prendre ses responsabilités. Nous demandons une prise en compte de la situation générale qui ne peut plus continuer comme ça."

Nouveau variant

Apparue en Corse il y a une vingtaine d'années, la fièvre catarrhale est une pathologie virale qui touche les ovins, les caprins et les bovins.

Dans l'île, c'est un moucheron qui est vecteur de la maladie. Il est à l'origine des contaminations de ces dernières semaines. Sur les seize élevages déclarés officiellement touchés par le virus, treize ont été contaminés par le sérotype 8, trois par le sérotype 4. Mais ce nouvel épisode de fièvre catarrhale a une particularité : l'apparition d'un nouveau variant.

"Le sérotype 8, on ne l’avait pas en Corse, explique Jacinta Savidan, animatrice du Groupement territorial des vétérinaires (GTV). Il est sur le continent depuis longtemps. Ce nouveau variant est en fait un sérotype 8 qui a muté et qui provoque des mortalités beaucoup plus importantes que le sérotype 8 qui était déjà connu sur le continent auparavant."

Selon la vétérinaire, "la mutation est vraiment due au virus". Et de préciser : "En revanche, le réchauffement climatique fait que l’on a de plus en plus de vecteurs possibles. On le voit également sur une autre maladie, la MHE, qui circule sur le continent et est transmise par le même vecteur. Concernant le vaccin bivalent contre les sérotypes 4 et 8, cela reste la solution la plus efficace et la seule que l’on ait."

Trois demandes

Dans l'après-midi, une nouvelle réunion s'est tenue dans les locaux de la DRAAF avec les mêmes acteurs. Les représentants de la filière ont formulé trois demandes aux services de l'État :

La prise en charge financière intégrale de la campagne de vaccination, l'indemnisation pour les troupeaux touchés (à la fois pour les brebis mortes et celles qui sont malades), et la mise en place d'une campagne sanitaire dans les troupeaux.

Concernant ces propositions, les agriculteurs attendent une réponse des services de l'État en début de semaine prochaine.

Ce mercredi soir, en plus d'avoir garanti de faire remonter les informations auprès du ministère de l'Agriculture, un premier engagement ferme a été pris sur la vaccination par la DRAAF de Corse : sans attendre la réponse du ministère, elle va financer sur ses fonds propres la vaccination des troupeaux malades et ceux pour lesquels des suspicions de contamination existent.

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