Le député de la deuxième circonscription de Haute-Corse estime que la mise en place d'une telle police permettrait de dégager du temps à la police nationale pour concentrer ses forces sur la lutte contre le grand banditisme.
"la sécurité, ce n'est pas uniquement le problème de l'Etat. C'est également celui des élus que nous sommes". C'est ainsi que Jean-Félix Acquaviva, député nationaliste de la deuxième circonscription de Haute-Corse, légitime sa proposition de la création d'une police territoriale.
En clair, cette police territoriale serait une "police de proximité" d'un genre nouveau, qui ne serait ni nationale, ni municipale, mais créée à l'échelon de l'île. Et sous la responsabilité de l'exécutif.
Petite délinquance
Cette proposition peut être vue, avant tout, comme l'une des multiples pistes que les nationalistes entendent explorer, dans le cadre d'une possible autonomie élargie de la Corse, même si les discussions avec Paris ne sont pas franchement au beau fixe...
Il n'est pas pour autant question que cette police territoriale vienne prendre la place de la police nationale, explique Jean-Félix Acquaviva. "La réforme de la police judiciaire, qui suscite une crainte très forte quant à la perte d'indépendance de la police judiciaire, notamment concernant ses capacités à gérer des affaires de grand banditisme, trouve un écho particulier en Corse".
En clair, pour le député, l'existence d'une police territoriale pourrait créer les conditions d'une lutte plus efficace contre les "dérives mafieuses" de l'île.
En effet, elle se chargerait "de la petite délinquance", "de la lutte contre la drogue devant les lycées et les collèges", ferait office de "police environnementale, comportementale" ce qui permettrait à "l'Etat de s'occuper du régalien, à savoir la lutte contre le grand banditisme".
Pas la première fois
Si la proposition semble audacieuse, ce n'est pas la première fois que le l'appellation de police territoriale est évoquée.
En 2013, en effet, le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, souhaite la création d'une police territoriale. Le 26 avril 2013, François Pillet (UMP) et René Vandierendonck (PS) déposent une proposition de loi, basée sur leur rapport d'information sur l'évolution des services de police.
En 2016, le gouvernement oppose une fin de non-recevoir au projet, en raison "du coût trop élevé pour les collectivités".
Mais il ne faut pas se laisser abuser par le nom de "police territoriale". Celle dont il était question à ce moment-là aurait été le résultat de la mutualisation des policiers municipaux et des gardes champêtres... Et n'aurait eu qu'un rapport très relatif avec le projet défendu par Jean-Félix Acquaviva.
Mais, pour autant, une autre police territoriale, plus conforme à ses vœux celle-là existe déjà en France. A quelques milliers de kilomètres de la métropole.
Décentralisation
Saint-Martin, dans les Antilles françaises possède en effet sa propre police territoriale. Le 15 février dernier, la collectivité publiait une offre d'emploi, dont le descriptif était rédigé ainsi : "l'agent de police territoriale exécute les missions de police administrative et judiciaire relevant de la compétence du Président de la Collectivité en matière de prévention et de surveillance du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publique. Il assure une relation de proximité avec la population. Veille et prévention en matière de maintien du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques".
Si cette police est dirigée par l'exécutif, les tâches qui lui incombent sont, pour autant, loin de celles qu'imagine l'élu nationaliste. Elles se rapprochent, dans les faits, de celles des policiers municipaux.
En Espagne, en revanche, les communautés autonomes ont, en vertu de l'article 149-1-29 de la constitution, la possibilité de créer leur propre force de police, une force de police dont les prérogatives sont bien plus proches des attentes nationalistes insulaires. Trois d'entre elles, la Catalogne, le Pays basque et la Navarre l'ont fait.
On le voit, le cas de la Corse, une fois de plus, est particulier, et devrait soulever pas mal de questions. Jean-Félix Acquaviva le reconnaît sans peine : " le projet n'en est encore qu'au stade de l'esquisse, et il mérite d'être affiné, mais dans le cadre du transfert de compétences, c'est un débat qu'il faut lancer".