La huitième édition du Salon du diabète s'est déroulée samedi 11 novembre à Porticcio. L'occasion de réunir l'ensemble des professionnels en lien avec la pathologie et d'apporter un maximum d'informations aux diabétiques et à leur entourage.
En ce samedi après-midi, ils sont nombreux à déambuler autour de la quinzaine de stands du huitième Salon du Diabète organisé au centre culturel de Porticcio.
Trois jours avant la Journée Mondiale du Diabète, plusieurs professionnels du secteur (clinique, laboratoire, prestataires de santé, endocrinologues...) se sont réunis le 11 novembre sur la rive sud du golfe d'Ajaccio pour sensibiliser autour de cette maladie chronique caractérisée par la présence d'un excès de sucre dans le sang.
En plus des tables rondes qui se sont déroulées tout au long de la journée dans l'auditorium, un large public - essentiellement composé de personnes diabétiques et de leurs proches - a pu échanger et trouver les réponses qu'il était venu chercher.
"Le but de ce salon est de réunir l'ensemble des professionnels en lien direct ou indirect avec la pathologie pour apporter toutes les informations nécessaires aux patients, à leur entourage et aux aidants", explique Rose-Marie Pasqualaggi, présidente de l'Association des Diabétiques de Corse qui organise l'événement.
Père d'une petite fille de 3 ans à qui on a récemment diagnostiqué un diabète de type 1 (maladie auto-immune où le pancréas ne produit plus d'insuline), Paul-Henri Santini est spécialement venu de l'Île-Rousse :
"Nous sommes là parce que c'est important de sensibiliser les gens. Le quotidien est compliqué car cela prend énormément de temps de s'occuper d'un enfant diabétique. Notre petite n'a que 3 ans et il y a beaucoup de variations au niveau de la glycémie. Que ce soit au niveau des hypers ou des hypos, chez les petits, cela est aussi dû aux émotions qui fluctuent tout le temps, même la nuit avec les rêves. C'est compliqué mais nous sommes quand même assez bien encadrés : on a pas mal de numéros à appeler en cas d'urgence si on a des questions, même la nuit. C'est vraiment bien de se sentir entourés".
Insulinothérapie fonctionnelle
Ces dernières années, la prise en charge des diabétiques ainsi que le matériel médical qu'ils utilisent ont beaucoup évolué. Notamment concernant le calcul du taux de glucose dans le sang. En témoigne le stand de ce prestataire de santé où sont exposés des capteurs de différentes marques destinés à mesurer la glycémie en continu. Des dispositifs innovants qui facilitent le quotidien des patients.
"Aujourd'hui, les traitements ont vraiment évolué, confirme Anne Faivre, 32 ans, diabétique type 1 depuis son enfance. On a des capteurs de glycémie et des pompes à insuline. On peut voir nos résultats de glycémie directement sur notre téléphone. On a aussi des alertes si on est en dessous ou au-dessus du taux. Aujourd'hui, on peut manger absolument comme tout le monde si on calcule bien nos glucides."
À côté d'elle, sa sœur jumelle, Elise, elle aussi diabétique type 1, tourne les pages du livre qu'elles ont écrit ensemble. Elles sont venues spécialement du continent le présenter aux insulaires :
"Ce livre, qui s'appelle "Soyons Glucides", on l'a écrit avec nos mots de patientes pour les patients, précise Elise Faivre. On explique notamment comment on passe de la quantité d'aliments, comment on trouve les glucides que contiennent ces aliments, et comment on calcule ensuite la dose d'insuline pour manger l'aliment en question."
Les deux sœurs, qui animent également une chaîne You Tube où elles partagent leur expérience de diabétiques, ont un leitmotiv : "on n'adapte pas sa vie au diabète mais le diabète à sa vie".
"Quand on a découvert notre diabète à la fin des années 1990, on avait un régime très strict, se souvient Élise. On n'avait pas le droit aux sucreries ni aux bonbons. Avec le temps, les traitements ont changé : les insulines agissent plus rapidement, et on peut adapter la dose à ce que l'on mange. À partir de là, une insulinothérapie fonctionnelle a été créée ; c'est une technique qui permet d'adapter son diabète à sa vie quotidienne, et non plus l'inverse. On peut donc faire des repas un peu plus riches ou plus light. On peut aussi faire du sport maintenant. On a donc écrit ce livre pour que le patient puisse s'initier et se former tout seul chez lui à cette méthode de calcul de glucides, qui doit être validée au préalable par un professionnel de santé."
Index glycémique
Dans les allées du salon, on croise également des diabétiques type 2, soit une pathologie chronique qui se développe surtout à l'âge adulte, notamment chez les personnes sédentaires, en surpoids ou en obésité. Il s'agit du type de diabète le plus fréquent dans le monde. En France, selon l'Assurance maladie, 92% des quatre millions diabétiques seraient atteints de ce type-là. C'est le cas de cet homme qui discute avec Marie-Ange Moreau. Chargée de projet en nutrition, elle tient un stand au salon :
"Connaissez-vous l'index glycémique ?", lui demande la jeune professionnelle diplômée d'un Bachelor en diététique et nutrition, avant de développer : "il y a des aliments qui vont faire augmenter votre glycémie, d'autres moyennement, et d'autres énormément. L'important, c'est d'associer les aliments sucrés entre eux pour équilibrer cet index glycémique. Par exemple : si vous prenez un fruit, mieux vaut le manger associé avec des matières grasses et des protéines plutôt que seul ; il faut éviter de prendre du sucre de façon isolée; vous pouvez donc associer votre fruit avec un morceau de fromage ou un yaourt. Pour le déjeuner ou le dîner, le mieux est de faire une assiette équilibrée : moitié légumes et féculents complets ou légumineuses et enfin des protéines afin de ralentir l'arrivée du sucre dans le sang."
"J'encourage donc les personnes diabétiques à consulter un professionnel de la nutrition. Je tiens à rappeler que la prise en charge du diabète est un travail pluridisciplinaire entre les différents professionnels de santé."
Marie-Ange MoreauChargée de projet en nutrition
Si le message semble être passé auprès de cet homme âgé d'une trentaine d'années, Marie-Ange Moreau regrette que "beaucoup de diabétiques ne soient pas suivis à ce niveau-là".
"Beaucoup de gens avec lesquels j'ai discuté sur le salon ne le sont pas, précise-t-elle. Certains médecins donnent quelques conseils mais ce n'est pas forcément leur spécialité et ils n'ont pas forcément le temps. "J'encourage donc les personnes diabétiques à consulter un professionnel de la nutrition. Je tiens à rappeler que la prise en charge du diabète est un travail pluridisciplinaire entre les différents professionnels de santé qu'il faut voir lorsqu'on est atteint de cette pathologie."
Près de 21.000 diabétiques dans l'île
Si beaucoup de diabétiques rencontrés ce samedi à Porticcio disent "mieux vivre" leur maladie que par le passé, notamment grâce aux différentes innovations, certains d'entre eux voudraient désormais "des appareils encore plus performants" : "ce serait bien qu'ils tiennent plus longtemps dans la durée, insiste Anne Faivre. Actuellement, on peut les garder quinze jours maximum. On souhaite aussi un suivi médical avec lequel on a une bonne communication. C'est vraiment très important."
Pour Paul-Henri Santini, "un suivi psychologique" pour les parents ne "serait pas de refus". "C'est quand même un chamboulement dans la vie, ça nous tombe dessus comme ça, confie-t-il. Il y a aussi des aménagements à mettre en place, notamment à l'école. Je remercie d'ailleurs les enseignants pour les efforts consentis avec ma fille. Ils font vraiment plus que ce qu'ils devraient faire. C'est très gentil à eux."
Un comportement qui semble aller de pair avec l'évolution des traitements et une certaine libération de la parole chez les personnes atteintes de cette maladie.
"Ce qui change, c’est que les patients viennent vers nous, souligne Rose-Marie Pasqualaggi, cheville ouvrière de ce salon avec l'Association des Diabétiques de Corse. Ils prennent conscience qu’il faut se faire aider pour être accompagné avec cette pathologie. Ils vont de plus en plus voir les professionnels de santé et les médecins qui sont présents sur le salon, comme les endocrinologues qui sont les spécialistes en charge de cette pathologie. L’important est donc de parler de la maladie et, du coup, on attire de plus en plus de monde."
Selon les chiffres de l'association, près de 21.000 personnes vivent avec un diabète en Corse. Soit un taux de prévalence supérieur de 6,5% à la moyenne nationale.