La Commission Libertés et Droits de l’Homme du Conseil national des barreaux a adopté vendredi 4 février un rapport sur l'incident survenu en mars 2021, au cours duquel Me Paul Sollacaro a été expulsé d'une audience par des policiers. L'institution juge partiale les rapports de l'inspection générale de la justice dans cette affaire et fait des propositions pour éviter que de tels faits ne se reproduisent en audience.
L'inspection générale de la justice (IGJ) a rendu deux rapports après que le président du tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence a fait expulser l'avocat Paul Sollacaro par des policiers lors d'une audience en mars 2021.
L'un des rapports portait sur les faits eux-mêmes et l'autre proposait d'améliorer la gestion des incidents opposant magistrats et avocats en audience pénale.
La Commission Libertés et droits de l'homme du Conseil national des barreaux (CNB) a soumis à l'assemblée générale ce 4 février son rapport sur les faits. La Commission juge le rapport de l'IGJ partial. Notamment parce qu'il met en avant la grève des avocats contre la réforme des retraites comme cause de la détérioration des rapports entre avocats et magistrats, sans que les inspecteurs de l'IGJ n'aient posé de questions aux avocats à ce sujet. Le rapport de l'IGJ pointe également quatre autres incidents survenus avant les faits.
Les avocats mis en cause
Pour le CNB, cette présentation de l'affaire "est perçue comme marquant une volonté de l’IGJ de minimiser les faits des 11 et 12 mars et d’imputer aux avocats une part de responsabilité dans tous ces incidents et problèmes de relations entre avocats et magistrats." Selon la Commission, l'IGJ affiche une volonté "très nette" de minimiser "la responsabilité de l'Etat dans les problèmes rencontrés par le Tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence pour le traitement des dossiers dans un délai raisonnable" ainsi que la responsabilité des magistrats mis en cause dans la gestion de cet incident.
Le rapport du CNB préconise une modification des textes relatifs à la police d'audience en améliorant le déroulement de celle-ci et de multiplier les moments et les lieux de rencontre et d'échange. Il émet l'idée de modifier le Code de procédure pénale pour qu'en matière disciplinaire, les avocats ne soient pas traités de la même manière qu'un justiciable ou un "assistant". Le rapport propose par exemple que "si le président estime que l’ordre de l’audience est troublé par un avocat, celle-ci est suspendue et le bâtonnier ou son délégataire est appelé immédiatement. Les chefs de la juridiction en sont aussitôt informés. Ensemble, ils recherchent en chambre du conseil une résolution amiable de l’incident."
A propos du rapport du CNB, Me Paul Sollacaro a réagi auprès du site actu-juridique.fr : "C’est le rapport qu’on attendait de l’inspection et qu’elle n’a pas produit, un véritable travail d’enquête fondé sur les documents et les témoignages qui pointe tous les manquements, toutes les violations, toutes les fautes sans tenter de détourner l’attention sur la grève des avocats qui n’a absolument rien à voir avec ce qu’il s’est passé."
"Le rapport qu'on attendait"
Maître Paul Sollacaro avait été expulsé en mars 2021 lors du procès de onze prévenus dans un dossier de trafic de drogue. Son client ayant été testé positif au Covid-19, l'avocat inscrit au barreau de Nice avait demandé la disjonction de son cas. Une requête aussitôt rejetée par le président d'audience, qui s'est également opposé à ce que le prévenu se présente devant le tribunal. A la suite d'un échange verbal tendu, le président avait demandé à la police d'expulser l'avocat.
Me Sollacaro a porté plainte pour violences aggravées et faux en écriture publique. Il a aussi saisi le Conseil supérieur de la magistrature qui a déclaré sa demande irrecevable. Le 9 septembre dernier, le Premier ministre a pris la décision de ne pas sanctionner le magistrat ayant ordonné l'expulsion de l'avocat.