Enseignant décapité : “Quand un fonctionnaire est attaqué, l’administration doit réagir”

Jean-Marc Pupponi, secrétaire du syndicat des enseignants SNES-FSU de Corse, était l’invité du Corsica Sera dimanche, deux jours après l’assassinat de l'enseignant Samuel Paty. Il a notamment évoqué les conditions de travail du corps enseignant ou la liberté d’expression en classe.

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Deux jours après l’assassinat de Samuel Paty, vendredi à Conflans-Sainte-Honorine en région parisienne, de nombreux citoyens ont rendu hommage au professeur d’histoire-géographie.

Parmi eux, beaucoup d’enseignants. À Bastia, Ajaccio ou encore Porto-Vecchio, l’ensemble de la profession était présente en nombre lors des hommages en Corse.

Invité du Corsica Sera, Jean-Marc Pupponi, secrétaire académique du syndicat des enseignants du second degré SNES-FSU en Corse et professeur d’histoire-géographie au lycée Laetitia-Bonaparte à Ajaccio, a évoqué les conditions de travail du corps enseignant, l’islamisme radical en milieu scolaire ou encore le travail sur la liberté d’expression. Entretien.

  • Quel sentiment prédomine, ce dimanche, dans la communauté éducative ?
Il y en a plusieurs. Vendredi, les collègues attendaient les vacances à la suite d’une période compliquée avec le Covid. Et puis vendredi soir, on a basculé dans l’horreur. Le premier sentiment, c’était l’incompréhension, l’incrédulité.

Ensuite l’émotion, la tristesse, beaucoup. Je crois qu’aujourd’hui, les gens étaient très tristes. Et c’est aussi quelque chose qui va perdurer, parce que malheureusement, je ne sais pas s’il y a beaucoup de solutions à apporter pour l'instant. Ça va être un peu compliqué à mettre en place et à résoudre.
  • Cela va-t-il peser sur votre façon de travailler, et la changer ?
Non, je ne pense pas que ça change la façon de travailler de la plupart des collègues. En Corse, on n’est peut-être pas confrontés à ce type de problèmes de façon récurrente, donc ça ne changera pas grand chose. Ça peut peut-être changer pour certains collègues du continent qui sont confrontés à des situations difficiles. En Corse, je ne pense pas.
 

"A partir du moment où on montre une caricature à des élèves pendant un cours, on utilise un outil pédagogique, on ne fait pas de la propagande en expliquant que cette caricature, ce qu’elle dit c’est forcément bien ou pas bien"

Jean-Marc Pupponi

  • Samuel Paty a été assassiné après un cours sur la liberté d’expression - lors duquel il avait montré à ses élèves des caricatures de Mahomet - qui est au programme de la 4ème. Quel outil pédagogique avez-vous à votre disposition pour ce genre de cours-là, est-ce que vous utilisez des caricatures ?
On utilise toutes sortes d’outils pédagogiques, on peut utiliser des caricatures, il y en a dans les manuels. Peut-être pas celles de Charlie Hedbo, mais il y en a d’autres. A partir du moment où on montre une caricature à des élèves pendant un cours, on utilise un outil pédagogique, on ne fait pas de la propagande en expliquant que cette caricature, ce qu’elle dit c’est forcément bien ou pas bien. On n’a pas à donner notre avis, on a à apprendre aux élèves à décortiquer le document, à l’expliquer, le comprendre, savoir lire entre les lignes et comprendre le message. C’est du travail pédagogique.
  • Vous représentez le SNES-FSU en Corse. Avez-vous connaissance de tensions avec des familles sur ces cours-là ?
Non, en Corse on n’a pas véritablement ce genre de problèmes, on n’est pas dans des banlieues difficiles où la précarité et la pauvreté déstabilisent les fondements de la société. On est un petit peu protégés par rapport à ça. Après, il y a des problématiques peut-être différentes selon le primaire, le collège, le lycée. Globalement, comme dans beaucoup de provinces du continent, on est un peu protégés par rapport à ça.

"L'islamisme radical, c’est quelque chose que je n’ai jamais ressenti dans mon lycée"

Jean-Marc Pupponi

  • On a pu lire dans les journaux, depuis deux jours, des enseignants du continent qui parlent de la montée d’un islamisme radical en classe, avec les élèves. Avez-vous ressenti ce phénomène ?
En Corse, non. C’est quelque chose que je n’ai jamais ressenti dans mon lycée. Effectivement, il y a peut-être des endroits sur le continent où il y a des gens qui sont des militants et qui font du prosélytisme religieux, c’est une réalité, il faut en tenir compte. Ce sont dans des endroits relativement restreints et particulièrement difficiles, dans des endroits de grande pauvreté, de grande précarité. Les fonds du problème, avant tout, ils sont sociaux.
  • Jean Castex, le premier Ministre, a promis une riposte encore plus ferme, plus rapide et plus efficace quand un enseignant subit des menaces, même insidieuses. Alors que se tient, ce dimanche soir, un conseil de défense, qu’attendez-vous du gouvernement ?
Ce qu’on attend, c’est du soutien. Depuis deux jours, on est soutenus. Mais par contre, quand le collègue (Samuel Paty) a porté plainte en son nom, on aurait peut-être pu attendre du recteur de Versailles qu’il porte plainte lui aussi. Parce quand un fonctionnaire est attaqué ad hominem dans ses fonctions, l’administration doit réagir aussi. Et visiblement, ça n’a pas été le cas.

Il y a tout un tas de questions qui se posent par rapport au rôle que l'administration rectorale a joué dans cette affaire qui a commencé il y a une dizaine de jours. Le cours a eu lieu il y a eu une dizaine de jours, et ensuite il y a eu ce parent d’élève qui s’est servi des réseaux sociaux pour visiblement orchestrer une certaine manipulation et se servir de cette situation pour faire passer ses idées et mettre le feu aux poudres en se servant des réseaux sociaux.
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